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Abdelmounaïm Madani. “Les dérives de l’année dernière sont intolérables”

Abdelmounaïm Madani. DG de l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (ANAPEC)

 

Le «modèle» de la migration circulaire des travailleuses agricoles saisonnières en Espagne est mis à rude épreuve. Abdelmounaïm Madani, DG de l’ANAPEC, défend ce projet et promet d’apporter les rectificatifs nécessaires en collaboration avec le gouvernement régional d’Andalousie. 

Les travailleuses marocaines se rendront à nouveau en Espagne en 2019. Pourquoi reconduire cette opération après les scandales de cette année ?
Permettez-moi de rappeler un principe de base: cette opération s’inscrit dans le cadre de la liberté de l’être humain à la mobilité transfrontalière de travail. Personne ne peut empêcher ces femmes de saisir cette opportunité.

Quel est le rôle de l’ANAPEC dans cette opération ?
Nous sommes redevables, envers ces citoyennes, d’un encadrement et une sensibilisation sur leurs droits et obligations pour faire en sorte que cette opération leur soit la plus bénéfique possible.

Pourtant, l’ANAPEC n’a pas complètement assuré cette mission l’an dernier…
L’année passée, je n’étais pas à ce poste. Je ne peux dire si ce qui a été rapporté par les médias est vrai ou faux. De même, il serait hâtif de dire que toute l’opération est un fiasco. À l’ANAPEC, nous retenons les aspects positifs: le droit d’une femme à jouir de son droit à la mobilité et l’accès à un revenu. Bien sûr, on pourra se poser des questions sur la qualité de l’encadrement pour faire de cette mobilité un «accélérateur de projet de vie» pour ces femmes. Telle est la nouveauté du programme de cette année.

Concrètement, de quoi s’agit-il ?
Nous allons nous investir à fond dans la sensibilisation des femmes afin qu’elles bénéficient pleinement de leurs droits. Je précise aussi que le milieu professionnel où ces personnes iront travailler est très bien encadré sur le plan des droits, dans une Espagne qui est un État de droit.

Ceci dit, les allégations de harcèlement sexuel étaient récurrentes…
Je ne peux pas me prononcer sur cette affaire qui est aujourd’hui instruite au niveau de la justice espagnole. J’ai eu l’occasion de me rendre sur place, où j’ai pu constater par moi-même les conditions de travail des saisonnières. Les conditions sont ce qu’elles sont car il s’agit bien du secteur agricole. La convention collective est équilibrée. Les conditions d’hébergement ne relèvent pas du haut standing, mais elles sont décentes.

Ces femmes bénéficient de peu de soutien au niveau local. Comment comptez-vous mobiliser les autorités espagnoles sur ce point ?
La politique migratoire est une attribution du gouvernement central à Madrid. Les attributions du gouvernement local se limitent à l’accompagnement et à l’intégration des travailleurs migrants. L’année passée, le gouvernement andalou n’était peut-être pas assez sensibilisé pour jouer ce rôle. Aujourd’hui, nous avons abordé ce point, et ils étaient très réceptifs à nos propositions. Maintenant, rien ne les oblige à le faire. C’est une question de souveraineté nationale, et on ne peut s’immiscer dans leur gestion politique. De notre côté, nous allons déployer tous les efforts pour que ces femmes s’y rendent en connaissance de cause. Ce projet a un enjeu stratégique pour nous. Nous portons un des modèles de migration légale, au lieu d’être toujours taxé de pays de transit de l’émigration illégale.

Vous avez annoncé l’objectif de 20.000 travailleuses agricoles pour 2019. Ne s’agit-il pas d’une prise de risque, alors que ce système a connu une année difficile ?
Pour l’instant, nous n’avons pas les chiffres arrêtés. Ce qui est sûr, c’est que nous dépasserons les 16.000 travailleuses. Le challenge pour nous est de proposer un accompagnement exhaustif au Maroc, car on ne peut agir sur un environnement souverain. J’ai confiance dans le partenariat Maroc-Espagne. Les dérives de l’année dernière sont intolérables, en Espagne comme au Maroc. Quand bien même il n’y aurait qu’un seul cas, celui-ci serait intolérable. 


Régularisation ?

Les ouvrières qui ont déjà travaillé l’an passé et sont revenues au Maroc seront les premières à repartir en Espagne. Après quatre ans, une «répétitrice» pourrait accéder à la régularisation. C’est la promesse des autorités espagnoles pour lutter contre l’immigraton clandestine.  Cette opération est stratégique pour le Maroc. Le pays se positionne en tant que pourvoyeur de solutions de main-d’oeuvre à une Europe asphyxiée du fait de raisons démographiques et du cycle de production économique. «Des solutions innovantes doivent être imaginées pour s’inscrire dans cette démarche», affirme le directeur de l’ANAPEC.


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