Le bilan économique et social d’une année difficile
Une année après la nomination du gouvernement El Othmani, Les Inspirations ÉCO fait le bilan des principales réalisations et actions. Une année, qui, dans un contexte rythmé par les contestations populaires à Al Hoceima puis à Jerada, est jugée comme difficile.
Une année est passée depuis la nomination le 5 avril 2017 de l’actuel gouvernement dirigé par Saâd-Eddine El Othmani. Une année, le moins qu’on puisse dire est qu’elle était difficile dans un contexte rythmé par les contestations populaires à Al Hoceima puis à Jerada. Le bilan d’un an doit être donc considéré à travers le prisme d’une situation sociale tendue. Les attentes citoyennes se sont faites plus pressantes encore. Il fallait trouver des solutions et vite. Des enquêtes sur le terrain ont été menées et des têtes ont sauté dont des ministres et de hauts responsables. Les priorités ont été définies et un coup d’accélérateur a été donné au programme Al Hoceima Manarat Al Moutawassit. D’un point de vue purement économique, une mesure en particulier a fait sensation à savoir la flexibilité du dirham. D’autres réalisations sont aussi à mettre au compte du gouvernement El Othmani, comme la mise en œuvre du programme de développement rural, les exonérations pour booster l’investissement et la création d’entreprise, le programme national de promotion de l’emploi et tout récemment la mise en œuvre de la programmation trisannuel du Budget de l’État, le fonds de soutien des startups et projets innovants…
Flexibilité du dirham : actée mais avec prudence
Le 15 janvier dernier, le pays a franchi un pas décisif en élargissant la bande de fluctuation de la monnaie à plus ou moins 2,5%, contre 0,3%. Après un débat houleux et un long travail d’explication et d’études d’impact, ce choix économique auquel le FMI a toujours exhorté le gouvernement est devenu réalité. Redoutée par les politiques, cette réforme du régime de change arrive pourtant à un moment où l’économie marocaine a besoin de perspectives et surtout d’un nouveau souffle. Comme expliquée par le ministre des Finances, la flexibilité est susceptible de renforcer la résilience de l’économie nationale aux chocs exogènes, de soutenir sa compétitivité et d’améliorer son niveau de croissance. On en attend un meilleur soutien des changements économiques qu’a connus le pays : diversification des partenaires économiques, l’ouverture et l’intégration dans l’économie mondiale.
L’industrialisation : un choix stratégique
Moins d’un mois après sa nomination, le gouvernement El Othmani a livré le ton montrant un intérêt particulier pour l’industrie. En effet, à la première Commission nationale des investissements que le nouveau chef du gouvernement a présidé, les deux tiers des engagements sont allés dans l’industrie, soit 43 MMDH sur 67 MMDH. Cette prédominance de l’industrie s’est confirmée lors de la deuxième Commission nationale des investissements de janvier dernier, où le secteur de l’industrie a occupé la première place, avec de 19 MMDH, soit 59% du total des investissements prévus. Dans le secteur de l’automobile, les travaux de l’usine Peugeot-Citroën à Kénitra ont été lancés en juin 2017 et les perspectives d’un secteur de l’automobile en plein essor s’annonçaient bonnes. Avec l’objectif de créer 500.000 emplois dans le secteur à l’horizon 2020, le gouvernement confirme cette volonté d’industrialisation qui trouve son écho dans le développement des métiers mondiaux, automobile et aéronautique en particulier, mais aussi dans la politique des écosystèmes menée avec brio par le ministre de l’Industrie, Moulay Hafid Elalamy. Il y a aussi un programme de relance des zones industrielles que l’actuel gouvernement compte bien mettre en œuvre pour créer un équilibre spatial en matière d’activité industrielle et de création de l’emploi.
Startups innovantes : un fonds de soutien de 700 MDH
Le fonds Innov Invest, doté de 700 MDH sur cinq ans, vise à financer les startups et les entreprises innovantes avec la garantie de la CCG. Longtemps ignorés les porteurs de projets dans le cadre de startups viennent alors de bénéficier d’une attention particulière notamment dans des filières comme l’économie verte. Il s’agit de booster ces startups qui opèrent dans des domaines aussi variés que les nouvelles technologies, les finances, les énergies renouvelables et bien d’autres domaines du futur. Parmi les objectifs de ce nouvel outil de financement : dynamiser le marché du capital-risque des startups marocaines et soutenir les jeunes entrepreneurs marocains en vue de leur permettre l’accès aux financements. La CCG qui participe à raison de 300 MDH au fonds avait alors signé quatre conventions avec les sociétés de gestion des quatre fonds d’amorçage retenus (Azur Innovation, Seaf Morocco Growth Fund, Maroc Numeric Fund II et Green Innov Invest) et des investisseurs nationaux et étrangers.
Budget trisannuel : la rigueur budgétaire entre en jeu
La disposition est motivée par la loi organique des finances et par l’esprit de la Constitution, à savoir garantir une meilleure visibilité en matière de ressources et d’engagements. Il s’agit pour les différents départements ministériels et institutions de l’État de se serrer la ceinture pour pouvoir réaliser une croissance de 4,5 à 5,5% à l’horizon 2021. Ces derniers doivent soumettre, avant le 15 avril, leurs propositions de programmation budgétaire 2019-2021, accompagnées des indicateurs de performance. Le chef de gouvernement a insisté dans ce sens sur la maîtrise de la masse salariale en limitant la création de postes budgétaires dans les besoins essentiels de l’administration. Dans ce sens, l’on retrouve d’ores et déjà un exemple concret, à savoir la contractualisation dans l’enseignement à travers le recrutement de 24.000 enseignants contractuels. Il a également insisté sur la rationalisation des dépenses et la réduction du train de vie de l’État. Il n’a pas omis de mettre l’accent sur la nécessité d’accélérer la cadence de réalisation des programmes d’investissement en accordant une attention particulière aux projets signés devant le souverain et ceux faisant l’objet de conventions nationales et internationales.
Dialogue social : une revalorisation des revenus dans le pipe
Trois commissions sur l’amélioration des revenus, les législations du travail et les libertés syndicales, ainsi que les questions liées à l’administration publique ont été mises en place pour accélérer la cadence. Par ailleurs, des dispositions concrètes sont attendues avant le 1er mai. El Othmani a témoigné une disposition gouvernementale à parvenir à un accord en ce mois d’avril, soit avant le 1er mai, Fête du travail. En d’autres termes, après le round du dialogue social d’octobre 2017, qui a laissé les centrales sur leur faim -surtout après l’adoption de la loi de Finances 2018 sans mesure répondant au cahier revendicatif- El Othmani veut institutionnaliser les contacts et les pourparlers avec les syndicats en respect d’un agenda précis. Il fallait donner un signal fort pour contenir une tension sociale qui risquerait de prendre de l’ampleur si un geste dans le sens de l’ouverture n’était pas effectué.