Le CMC dissèque la stratégie de l’emploi
Rehausser la qualité de la formation, promouvoir des secteurs dynamiques et de meilleures coordination et cohérence sectorielles…Le Centre marocain de conjoncture (CMC) livre sa recette pour relancer l’emploi et
dépasser l’«échec» des différentes stratégies gouvernementales.
Le Centre marocain de conjoncture (CMC) s’est montré très critique à l’égard de la stratégie nationale de l’emploi dans le cadre de sa dernière lettre de conjoncture. Consacrée au nouveau modèle de développement du Maroc, la publication consacre une importante partie à l’analyse de la politique du royaume en matière d’emploi et de lutte contre le chômage. Le constat du CMC est peu reluisant : «qu’il s’agisse du ciblage des entreprises, de l’auto-emploi ou encore de l’émancipation des acteurs de l’économie sociale et solidaire, la stratégie souffre de l’absence de mécanismes pour réduire le chômage». Le Centre s’appuie sur les résultats de l’emploi et du chômage enregistrés en 2016 et qui restent particulièrement préoccupants.
Les statistiques du HCP attestent d’un recul du taux d’emploi qui s’est établi à 42% dont 79,5% seulement sont rémunérés (contre environ 42% et 78.106 en 2015). Le taux de chômage estimé globalement à 9,4% atteint 22,5% pour les jeunes de moins de 25 ans. La participation des femmes à l’emploi ne dépasse guère 25,9% au niveau national, pour n’être que de 19,2% en milieu urbain. Par ailleurs, l’indemnité pour perte d’emploi (IPE) instaurée par la loi 03.14 ne peut être considérée comme une réelle mesure d’atténuation de l’exclusion. Son montant ne peut dépasser le SMIG et elle demeure assujettie à des conditions suspensives. «Ainsi, en dépit de la multiplicité des programmes supposés promouvoir l’emploi, le marché du travail marocain continue d’être desservi par de nombreux dysfonctionnements qui en grèvent l’efficacité», critique le CMC pour qui le chômage des jeunes diplômés reste la préoccupation majeure à laquelle devrait s’atteler toute politique en quête d’efficacité. L’Exécutif doit également relever le défi d’une meilleure adéquation, tant qualitative que quantitative, entre la formation et l’emploi. De surcroît, selon le CMC, l’investissement en capital humain ne semble pas produire la valorisation escomptée de cette ressource primordiale. La prolifération de l’informel fait que «la recherche de compétitivité a tendance à s’accommoder de l’ambiguïté de l’offre de travail, qui lui permet de recruter dans des bassins où les exigences salariales et la protection sociale sont étouffées». Un cercle vicieux que l’Exécutif doit rompre définitivement en vue d’assurer un emploi de qualité et enclencher une vraie dynamique du marché de l’emploi. Le centre dirigé par Habib El Malki constate dans son analyse l’échec des Lois de finances successives à gérer les déséquilibres, structurels et fonctionnels que connaît le marché du travail sous l’effet d’une baisse substantielle de l’élasticité de l’emploi par rapport au PIB. Dans ce sens, le CMC propose des pistes d’amélioration de la stratégie gouvernementale en la matière.
Pour le CMC, la levée des contraintes matérielles à l’accès à l’emploi doit être recherchée dans l’innovation sociale pour mettre au point un nouveau type d’emploi qui mette l’accent sur le développement des activités solidaires, particulièrement en territoires fragiles. L’accent doit, par ailleurs, être mis sur l’élargissement des opportunités d’accès à la formation et une meilleure adaptation de cette formation aux besoins de l’entreprise. Le Maroc est appelé à redoubler d’efforts en matière d’investissements dans les infrastructures et dans le capital humain, en veillant à encourager l’employabilité des programmes sectoriels et régionaux selon une stratégie qui favorise l’inclusion, la création et la qualité de l’emploi. Le gouvernement est également invité à renforcer l’investissement dans les infrastructures et le capital humain et à déployer des politiques régionales et sectorielles susceptibles de dynamiser l’employabilité.
Forte pression
Selon les estimations du HCP, la situation du marché de l’emploi risque d’empirer durant les prochains mois. Durant l’année 2018, la croissance économique serait accompagnée par des créations d’emplois qui ne permettraient pas de répondre à la demande additionnelle en augmentation continue sur le marché du travail. Dans ce cadre, le taux de chômage devrait atteindre 10,5% en 2018 au lieu de 10,2% pour 2017 et 9,4% en 2016. Pour rappel, le Produit intérieur brut devrait s’accroître de 2,8% en 2018 en ralentissement par rapport à 4% estimés pour 2017. Aux prix courants, le PIB devrait s’accroître de 4,3% sur la même année. L’inflation exprimée par le prix implicite du PIB, serait de 1,5%, en 2018 après avoir enregistré 0,2% en 2017 et 1,6% en 2016.