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Défense commerciale : Le Maroc sur tous les fronts

Depuis l’adoption de la loi 15-09 sur la défense commerciale, le Maroc multiplie les mesures de défense commerciale, notamment les enquêtes anti-dumping. Si la légitimité de la politique marocaine ne laisse aucune place au doute, celle-ci peut avoir d’autres implications sur les rapports avec certains partenaires commerciaux. Décryptage.

Le Maroc ne lâche pas prise ! Depuis l’adoption de la loi 15-09 sur la défense commerciale en 2011 le Maroc a lancé une vingtaine d’enquête antidumping et de mesures de sauvegarde. Aujourd’hui, le Secrétariat d’État chargé du Commerce extérieur est impliqué dans au moins 5 enquêtes antidumping simultanément. La plupart ont été entamées durant les 6 derniers mois. Il s’agit notamment de l’enquête sur les réfrigérateurs importés de Turquie, de Thaïlande et de Chine, de l’enquête sur les importations de cahiers originaires de Tunisie, de celle portant sur les importations de carreaux céramiques originaires d’Espagne ou encore des réexamens du droit antidumping sur le contreplaqué chinois et sur le papier portugais. Une activité intense pour le Maroc qui s’est engagé en 2014 dans une politique de limitation des importations, que ce soit à travers une politique de rationalisation ou une défense commerciale renforcée.

Intensité
Le secrétariat de l’OMC note dans son rapport sur l’examen de la politique commerciale (EPC) du Maroc rendu en 2016 que ce dernier, qui n’avait pris aucune action en matière de droits compensateurs ou antidumping lors de son dernier EPC en 2009, a instauré depuis des mesures antidumping sur les importations de contreplaqué, de polychlorure de vinyle (PVC), de tôles d’acier laminées à chaud, de papier A4 et d’insuline. En février 2013, un droit antidumping définitif de 25% pour une durée de 5 ans est appliqué sur les importations de contreplaqué originaires de Chine. En janvier 2014, un droit antidumping définitif en fonction des exportateurs est appliqué pour une durée de 5 ans sur les importations de PVC sous forme primaire, non mélangé à d’autres substances originaires des États-Unis. Parallèlement, un droit antidumping provisoire allant jusqu’à 22% est appliqué sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’UE et de Turquie. En juin 2014, à la conclusion de l’enquête, certaines entreprises européennes ont vu leurs droits divisés par deux alors que dans le cas des entreprises turques, les droits sont désormais à 11%. Plus récemment, en 2014, un droit antidumping définitif de 10,6% pour une durée de 5 ans a été appliqué sur les importations de papier A4 originaires du Portugal.

Légitimité
L’activation systématique des boucliers commerciaux est une pratique de plus en plus répandue à l’international. Elle intervient en réponse à la prolifération de pratiques anticoncurrentielles et permet de limiter les dégâts, notamment pour les industries naissantes des pays en développement. Le Maroc, qui se trouve en libre-échange avec 55 pays, se retrouve donc particulièrement exposé à ce genre de vulnérabilités. Le département du Commerce extérieur a, depuis l’adoption du plan de développement des échanges commerciaux 2014-2016, érigé la rationalisation des importations en priorité. Parmi les leviers activés, celui de la défense commerciale. Le département du Commerce extérieur a également travaillé sur le renforcement des moyens du service de défense commerciale à travers l’amélioration de leurs moyens humains et budgétaires. L’objectif est d’accélérer l’instruction des dossiers de défense commerciale. Le département du Commerce extérieur a également engagé un travail de sensibilisation afin d’encourager les opérateurs qui se sentent lésés par une concurrence déloyale à formuler leurs requête auprès de lui.

Réactions
Toutefois, la multiplication de ces mesures n’a pas manqué d’interpeller plusieurs de nos partenaires commerciaux, certains allant même jusqu’à alerter contre un risque de protectionnisme, à l’instar de l’Union européenne. En 2014, les services de la délégation de l’Union européenne au Maroc avaient même dénoncé une faiblesse argumentaire dans les dossiers élaborés par le Maroc. Le royaume a répondu en assurant que les services chargés de la défense commerciale respectaient à la lettre les normes de l’OMC en matière de preuve de l’existence d’un dommage pour les industries locales et pour attester de l’existence de pratique anti-concurrentielles et déloyales. Plus récemment, la Turquie a même décidé d’engager une procédure contentieuse devant l’organe de règlement des différends (ORD) en vue de contester le droit antidumping appliqué par le Maroc sur les importations d’acier laminé à chaud en provenance de Turquie et de l’Union européenne. Une procédure sur laquelle se sont greffés notamment l’Union européenne, la Chine, l’Égypte et l’Inde en tant que tierce partie.

L’ouverture de cette procédure juridictionnelle devant l’ORD de l’OMC est en tout cas annonciateur d’une plus grande difficulté pour le Maroc afin de gérer ses enquêtes antidumping. L’issue de la procédure, qui s’est ouverte le 17 mai dernier suite à la composition du groupe spécial de l’ORD, permettra soit de conforter le royaume dans sa politique, soit d’ouvrir une brèche dans la position défensive qu’il a choisie.



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