Le temps presse pour El Othmani
À trois mois de la date limite fixée pour la présentation du cadre de préparation du PLF 2018, le gouvernement El Othmani s’apprête à approuver aujourd’hui le PLF 2017, avant de l’embarquer dans la navette législative. La première Chambre a 30 jours pour se prononcer et seulement 22 jours du côté de la Chambre des conseillers. «Les débats seront courts et les délais raccourcis», assure Abdellah Bouanou, président de la Commission des finances à la Chambre des représentants, mais pour l’heure, rien n’est gagné !
Un agenda chargé attend le ministre de l’Économie et des finances, Mohamed Boussaïd, à peine revenu des réunions annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale à Washington. Le Conseil de gouvernement se réunit aujourd’hui avec comme sujet principal le Projet de loi de finances (PLF) 2017. L’on sait d’ores et déjà que la première mouture déposée en octobre 2016 par le gouvernement Benkirane ne subira pas de grandes modifications.
Le chef du gouvernement Saad- Eddine El Othmani l’a clairement annoncé lors de son tout premier Conseil de gouvernement. «Après réflexion et concertation, le PLF 2017 sera maintenu par souci de gain de temps. Si nous le remplaçons et que nous recommençons de zéro, cela nous prendra encore des mois», a-t-il affirmé. Aujourd’hui, devant ses nouveaux collègues du gouvernement, l’argentier du royaume ne fera donc que répéter la même présentation du mois d’octobre dernier. L’occasion de discuter des amendements que l’Exécutif sera amené à introduire au niveau de la Commission des finances, notamment l’incontournable adaptation budgétaire suite à la nouvelle architecture de l’Exécutif. Il s’agit par exemple de regrouper les budgets de l’Habitat et de l’urbanisme ; ou bien d’affecter de nouvelles lignes budgétaires pour les départements nouvellement créés (Droits de l’homme, développement rural).
Situation exceptionnelle
Si tout se passe comme prévu, une fois le projet approuvé par le Conseil de gouvernement, Mohamed Boussaïd ne tardera pas à le présenter en séance plénière en présence des deux Chambres, le cas échéant jeudi après-midi. S’ensuivra immédiatement une réunion de la Commission des finances de la Chambre des représentants, présidée par le député du PJD, Abdellah Bouanou. Un calendrier et des règles précises (temps de parole, etc) seront fixés pour les discussions qui porteront, dans une première étape, sur les ressources du budget et les amendements.
La deuxième partie, consacrée aux charges et dépenses des différents ministères, implique quant à elle l’ensemble des commissions sectorielles. Une fois le projet voté en séance plénière, la Chambre des conseillers prend le relais et enchaîne le débat selon la même logique d’approbation (ressources-amendements-charges-vote). En vertu de la loi organique de la loi de Finances, soit le texte constitutionnel encadrant le processus d’élaboration et d’approbation des PLF, la première Chambre a 30 jours pour se prononcer et seulement 22 jours pour la deuxième. Sans compter le délai de six jours autorisé en fin de parcours aux élus de la Chambre basse pour examiner les amendements validés par les conseillers et adopter, en dernier ressort, le PLF 2017. «Ces délais sont valables dans une situation normale lorsque le PLF est déposé avant la date limite du 20 octobre. Or, nous sommes aujourd’hui face à une situation exceptionnelle et un retard de six mois. Vraisemblablement, les débats seront courts et les délais raccourcis», anticipe Abdellah Bouanou.
En l’absence d’une loi de Finances pleinement approuvée, la continuité du service public reste assurée grâce à deux décrets sortis à la fin du mandat de Benkirane, autorisant le déblocage des dépenses nécessaires au fonctionnement de l’État, en particulier la masse salariale publique. En revanche, l’approbation du PLF 2017 aura le mérite de débloquer les 190 MMDH d’investissements publics initialement prévus à la fois pour l’administration publique, les entreprises publiques et les collectivités territoriales.
Ce sera une aubaine pour les entreprises et la croissance marocaine qui a du mal à décoller. «Le retard de la loi de Finances a eu pour effet le gel de l’investissement public, ce qui freine la dynamique des PME dont certaines ont fini par disparaître. Nous invitons le gouvernement à accélérer le règlement des arriérés de paiement des entreprise publiques selon un calendrier à définir, tout en introduisant les amendements nécessaires dans le texte du PLF», a clamé Abdelilah Hifdi, conseiller à la deuxième Chambre, dans un discours prononcé mardi au nom du groupe parlementaire de la CGEM, à l’occasion du débat sur le programme gouvernemental. Le patronat s’est montré inquiet des effets néfastes de ce retard, se traduisant par une révision à la baisse des prévisions de croissance de la Banque mondiale, ramenées de 4 à 3,8% pour l’année 2017, malgré une conjoncture économique favorable, marquée par une stabilité des cours des produits pétroliers à des niveaux relativement bas et surtout une saison agricole record. Selon le PAM, principal parti de l’opposition, le retard dans l’exécution du Budget 2017 a fait subir au Maroc un manque à gagner de 18 MMDH.