Quelle place pour le Shadow Banking au Maroc ?
44% des 518 internautes qui ont répondu au sondage online de Flm, ont jugé que le Shadow Banking existe au Maroc. Au contraire, une majorité de 56% pense que le système bancaire de l’ombre n’existe pas au Maroc.
En préambule, rappelons que le Shadow Banking regroupe globalement tous les prêts ou les dépôts, ne transitant pas par le système bancaire classique. C’est le cas notamment des prêts inter-entreprises quand les délais de paiement dépassent le simple cadre normal de la relation fournisseur-client. Il en est de même pour les fonds qui prêtent directement aux entreprises dans un cadre plus ou moins structuré.
Au Maroc, il est difficile de cerner le phénomène notamment à cause de l’importance relative de l’informel et de la sous-bancarisation dans certains secteurs notamment dans le commerce et le négoce. En particulier, il est d’usage que les grossistes financent le BFR de leurs détaillants dans le cadre de relations personnelles ou familiales. Toutefois, certains indicateurs nous donnent une idée sur la tendance. Ainsi, selon des données rendues publiques par Inforisk, le crédit inter-entreprise a atteint en 2015, un encours de 373 MMDH.
À la même date, les crédits bancaires accordés aux sociétés non financières privées, était de 315 MMDH. Par ailleurs, sur 2010-2015, selon la même source, la croissance moyenne des prêts entre les entreprises est de 7%, contre 2,5% pour le crédit bancaire. Par ailleurs, certains spécialistes ont aussi estimé que 40% des actifs totaux des entreprises sont constitués par les créances clients. Ces propos semblent étayés par d’autres chiffres avancés par des officiels. Ainsi, avant la nouvelle réglementation, Hassan Boubrik, le patron de l’ACAPS, avait déclaré que le montant brut des créances des compagnies d’assurances sur les assurés et les intermédiaires, atteint 14 MMDH bruts.
Ainsi, les agents et les courtiers se financeraient essentiellement par les crédits fournisseurs auprès des compagnies. Ainsi, le faisceau de chiffres et de déclarations, semble plutôt plaider pour l’existence d’un Shadow Banking au Maroc dont la taille resterait à déterminer de manière plus précise. En effet, devant l’atonie ou la difficulté de financement bancaire classique, les patrons de sociétés n’ont d’autres choix que de recourir à ce qui ressemble à du Shadow Banking. En particulier, devant l’atonie des affaires, certaines entreprises n’ont d’autres choix que de financer leurs clients, surtout qu’au passage les prix à crédit sont souvent plus élevés que ceux au comptant. Naturellement, le système de Shadow Banking, nous amène à une duplicité.
En effet, l’absence de contrôle des ratios prudentiels par BAM en sus de la difficulté de recouvrement, posent un problème. Notamment, la défaillance d’une entreprise peut provoquer un effet «domino» problématique dans certains secteurs. Toutefois, le côté optimiste est celui de la possibilité de récupérer les clients du Shadow Banking en cas d’offre bancaire raisonnable. Notons enfin que cette pratique de la finance de l’ombre est internationale avec une estimation de 80.000 milliards $, de taille du Shadow Banking contre 135.000 milliards $ pour le secteur bancaire traditionnel.
Farid Mezouar
DG de FL Market
Les Inspirations ÉCO : Que risquent les banques face au Shadow Banking ?
Farid Mezouar : Plus qu’un risque, il s’agit d’une incertitude car les banques, peuvent se trouver à financer indirectement des entreprises qu’elles ont refusé de financer directement, ce qui peut obérer la vision de leur exposition de risque. C’est le cas par exemple quand un débiteur utilise sa facilité de crédit pour rallonger le délai de paiement de ses clients. Ainsi, la faillite d’une entreprise peut durement toucher d’autres entités qui étaient généreuses dans son financement via les crédits fournisseurs.
Comment limiter le Shadow Banking ?
Il faut trouver une solution pour inciter fortement les banques classiques à démocratiser davantage l’accès au crédit. En parallèle, les banques doivent trouver une législation assouplie. À titre d’exemple, il est intéressant de suivre l’initiative du président américain, Donald Trump qui a fait part de sa volonté de revenir sur la loi Dodd-Franck instaurée après la crise de 2008, pour réguler la finance bancaire. Un tel assouplissement pourrait réduire la taille du Shadow Banking.