Maroc Digital 2020 : Nouvelle tentative de connexion
Le ministère de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique a présenté le contenu de «Maroc Digital 2020» aux professionnels du secteur IT. Les détails sur l’agenda de la mise en œuvre.
Un tête-à-tête à huis clos, de plus quatre heures et demi, entre les membres de la Fédération des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (APEBI) et deux ministres du gouvernement autour de la nouvelle stratégie numérique 2020, s’est tenu le 26 juillet à Casablanca. Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique (MICINET) et Mamoum Bouhdoud, ministre délégué, se sont relayés pour expliquer la vision, les piliers et les détails de cette nouvelle feuille de route du secteur numérique, une stratégie très attendue par les acteurs de ce domaine.
Un arbitrage royal
La copie de la stratégie était prête depuis six mois. Sa présentation a été suspendue à l’arbitrage royal. Certains départements ministériels n’ont pas donné leur feu vert pour la création de cette nouvelle agence dédiée à l’économie numérique et à l’e-gouvernement. «Plusieurs ministères ont exprimé leurs réserves concernant la création de cette agence sous prétexte de l’existence de nombreuses structures similaires dans d’autres domaines qui demeurent inefficaces», explique Saloua Karkri-Belkeziz, présidente de l’APEBI, jointe par téléphone par Les Inspirations ÉCO.
Finalement, l’arbitrage royal et la présentation de la stratégie le 4 juillet à Casablanca donneront raison aux défenseurs de la création de cette nouvelle agence. «Ce secteur horizontal mérite une agence», défend la présidente de l’APEBI. Et d’ajouter : «L’absence d’un mécanisme institutionnel était parmi les freins qui n’ont pas permis la réussite de Maroc Numeric 2013».
En plus de raisons budgétaires, les ministères circonspects s’inquiétaient de perdre le contrôle sur leur stratégie en matière numérique et de système d’information. La future agence aura pour première mission de dissiper cette crainte. Pour mettre sur les rails cette structure, Elalamy s’est engagé, auprès des membres de l’APEBI, à présenter le projet de loi, créant cette agence, au Conseil de gouvernement de cette semaine. L’objectif : faire adopter le texte lors de la session extraordinaire prévue dans les prochains jours. «Les textes techniques comme celui concernant l’agence devrait être votés rapidement», prévoit Karkri-Belkeziz, avec l’assurance de l’ex-parlementaire. «Notre crainte était de ne pas pouvoir lancer cette stratégie avant la fin du mandat du gouvernement. Aujourd’hui, nous pouvons être satisfaits des engagements du ministère», se réjouit-elle.
Le contenu de la stratégie
Pour l’élaboration de cette stratégie, deux démarches de réflexion ont été conduites. Une première menée par l’APEBI et une deuxième par le ministère. L’APEBI avait sélectionné un cabinet conseil pour travailler avec elle sur sa Vision 2020. «Nous avions partagé les résultats avec le ministère», rappelle Karkri-Belkeziz. Ensuite, le ministère a sélectionné le cabinet McKinsey pour préparer son propre document de travail pour «challenger» la proposition de l’APEBI. Des réunions ont eu lieu entre le ministère et le cabinet mandaté par l’APEBI, ainsi qu’entre l’équipe McKinsey et l’APEBI.
Ce travail d’échange a permis d’aboutir à la stratégie actuelle. Le contenu de la stratégie ne diffère pas des grands axes de Maroc Numeric 2013. La copie développée par l’ancien gouvernement prévoyait quatre prioritaires stratégiques : Transformation sociale, mise en œuvre des services publics orientés usagers, informatisation des PME et développement de l’industrie IT. La nouvelle stratégie reprend, en partie, ces axes et y ajoute des objectifs en termes d’export vers l’Afrique subsaharienne.
Elle se divise en cinq piliers :
1. Transformation profonde de l’administration publique ;
2. Relance de la dynamique d’investissement IT ;
3. Gouvernance du numérique ;
4. Intégration et interopérabilité des SI ;
5. Compétitivité de la PME par l’IT.
Chaque pilier est accompagné d’outils de mise en œuvre opérationnels. Le premier pilier prévoit la création d’un label digital 2020 avec des projets prioritaires. Le deuxième pilier s’accompagnera de la création d’un E-Gov Fund, financé par la nouvelle agence et le ministère. Le troisième pilier se traduira par la création de l’agence. Le quatrième pilier nécessitera le développement d’un schéma directeur des SI des ministères. Enfin, le cinquième pilier sera développé par Maroc PME. Un des temps forts pour présenter la nouvelle stratégie digitale sera l’Africa IT Expo (AITEX), prévue en septembre prochain.
Objectifs pour 2020
Réduire de 50%
la fracture numérique
Digitalisation de 50%
minimum des démarches administratives
Équiper et connecter 20% des PME
Se transformer en 1er hub numérique en Afrique francophone
Former 30.000 professionnels dans les IT
Saloua Karkri-Belkeziz
Présidente de l’APEBI
La transformation digitale est vitale pour l’économie et l’administration. Cette transition est bénéfique pour le citoyen comme pour l’investisseur. L’attractivité du pays et l’emploi s’amélioreront. La nouvelle stratégie est satisfaisante. À la charge des professionnels de se structurer pour accompagner ces projets importants. Nous devons être vigilants pour que la nouvelle agence joue pleinement son rôle.
Les prérogatives de l’agence numérique
Cette agence aura les pleins pouvoirs pour gérer le digital au Maroc. Parmi ses missions : le pilotage de la stratégie du secteur, appui au ministère en charge de l’économie numérique, donner son avis consultatif sur tout projet de SI ministériel, sensibilisation et vulgarisation, interlocuteur des opérateurs publics et privés. Son principal défi sera d’assurer une homogénéité des projets SI auprès des administrations. Dès l’adoption du texte de loi relatif à cette agence, le ministère s’engage aussi à recruter son directeur d’ici septembre. Le budget et les RH dédiés à l’agence resteront à définir par la LF 2017.