Les Cahiers des ÉCO

«Nous attendons les investisseurs marocains dans la transformation agricole en Côte d’Ivoire»

Mamadou Sangafowa Coulibaly : Ministre ivoirien de l’Agriculture et du développement rural

Menant une imposante délégation au SIAM, le ministre ivoirien de l’Agriculture et du développement rural, Mamadou Sangafowa Coulibaly, revient ici sur la coopération agricole entre le Maroc et la Côte d’Ivoire. Il en profite également pour inviter les investisseurs marocains à se lancer dans les industries de transformation des produits agricoles en Côte d’Ivoire.

Les Inspirations ÉCO : Qu’est-ce qui a motivé la présence en force de la Côte d’Ivoire à la 11e édition du SIAM ?
Mamadou S.Coulibaly  : Tout d’abord, il faut savoir que par la volonté de sa majesté le roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste et de son excellence, le président Alassane Ouattara, la coopération entre la Côte d’Ivoire et le Maroc, qui était déjà excellente du temps des pères fondateurs, a été renforcée. Le résultat concret de ce renforcement est que le Maroc est devenu en 2015 le premier investisseur étranger en Côte d’Ivoire, devant la France. Notre coopération bilatérale repose sur plusieurs secteurs, notamment celui agricole. Dans ce cadre, j’ai même effectué une visite officielle au Maroc en juillet 2014. À cette occasion, mon homologue marocain, Aziz Akhannouch et moi-même avions revisité notre accord de coopération. Nous l’avons actualisé et renforcé. Ce fut une visite qui a été pleine d’espoirs. Nous sommes venus au SIAM 2016 pour nous assurer que les fruits vont tenir la promesse des fleurs. Je crois qu’il n’y a pas de raisons qu’il en soit autrement, puisque nous avons déjà commencé à enregistrer des résultats tangibles en matière de coopération agricole avec le Maroc.

Quelle filière agricole la Côte d’Ivoire a-t-elle mis en avant cette année ?
Cette année, je suis venu avec la filière ivoirienne des fruits et légumes, parce qu’elle est en dialogue avec les partenaires marocains évoluant dans le même domaine pour la mise en place de la plateforme logistique au port d’Abidjan. Nous comptons beaucoup sur cette plateforme afin que les fruits et légumes marocains puissent accéder au marché ouest-africain via le port d’Abidjan et en même temps que les fruits et légumes de la Côte d’Ivoire puissent accéder au marché marocain, mais aussi au Moyen-Orient via le Maroc. Je pense que la coopération entre le Maroc et la Côte d’Ivoire mérite d’être citée en exemple sur le plan continental. Très souvent, nous allons chercher très loin alors que nous avons à nos portes des expériences réussies et à moindre coût.

Avez-vous de la visibilité sur la date de lancement de cette plateforme logistique ?
Bien sûr ! La Côte d’Ivoire a mis à disposition dans la zone portuaire d’Abidjan, 5 hectares. Cet espace est en train d’être aménagé. Nous attendons à présent que les investisseurs marocains puissent finaliser la mobilisation des financements. L’enveloppe financière pour la concrétisation de ce projet est estimée à 17 milliards de francs CFA (1DH = 60 FCFA). Nous espérons que d’ici 2017, cette plateforme logistique sera mise en place.

Selon vous, comment le Maroc peut-il aider la Côte d’Ivoire à l’émergence de son agriculture ?
Lorsque nous sommes venus au Maroc en juillet 2014, l’un de nos objectifs était de jumeler le Plan Maroc vert (PMV) et le Programme national ivoirien d’investissement agricole (PNIA). Nous avons ainsi passé en revue ces deux stratégies et nous sommes parvenus à la conclusion qu’ils sont d’égale qualité en termes de conception et d’adaptation aux réalités des pays. La différence résidait juste au niveau de la mobilisation des ressources. Le PMV l’a réussi de façon probante. Nous avons ainsi essayé de faire de même durant les 3 premières années de notre PNIA et nous avons également obtenu des résultats satisfaisants. À présent, nous cherchons à consolider ce résultat parce que le Maroc a atteint un niveau que la Côte d’Ivoire souhaiterait atteindre, à savoir la valorisation locale des productions agricoles, c’est-à-dire la transformation par l’industrie locale.

Peut-on dire que le PMV et le PNIA sont des exemples en Afrique ?
Comme vous le savez, le Plan Maroc vert est cité en exemple par la FAO. Il en est de même pour notre Programme national d’investissement agricole. D’ailleurs, cela a poussé les États africains à confier à la Côte d’Ivoire la tenue de la 29e Conférence régionale de la FAO. À ce propos, j’ai l’honneur et la responsabilité de présider la Conférence ministérielle pour la zone Afrique durant les deux années à venir. Tout ceci montre que le Maroc et la Côte d’Ivoire sont des exemples en matière agricole.

Au SIAM 2016, vous avez
particulièrement mis l’accent sur le financement et la réassurance. Quelles sont vos attentes dans ce sens ?
Le Maroc a fait face aux contraintes auxquelles nous faisons face aujourd’hui dans certains domaines. Le royaume est parvenu, malgré tout, à réaliser un certain nombre de résultats. Le Maroc a pu trouver une solution à la question du financement de l’agriculture par la mise en place d’une banque de financement de l’agriculture. Nous voulons que le Maroc nous accompagne à remettre en place notre système bancaire dédié au financement agricole. La deuxième attente est liée à l’assurance. Le Maroc est un exemple dans ce domaine et nous avons déjà signé un accord dans ce sens. Nous souhaitons donc bénéficier d’un accompagnement dans ce sens afin de mettre en place une assurance agricole en Côte d’Ivoire.

Cela dit, comment se porte le secteur agricole en Côte d’Ivoire ?
Notre pays est une puissance agricole. Nous sommes le premier pays producteur mondial de cacao. Depuis 2015, nous sommes aussi devenus le premier pays producteur mondial d’anacarde. Nous occupons aussi la première place mondiale de producteur de noix de colas, avec près de 300.000 tonnes. La Côte d’Ivoire est également le premier pays africain producteur d’huile de palme, d’hévéa, etc. Au-delà de ces résultats, il nous reste désormais à passer à l’étape suivante, à savoir la transformation locale de nos productions. Et sur ce point, nous avons une expérience à tirer du Maroc. C’est la raison pour laquelle, j’invite le secteur privé marocain à venir investir dans la transformation, la valorisation et la modernisation de l’agriculture en Côte d’Ivoire. Les Marocains ont acquis beaucoup d’expérience dans plusieurs domaines dont la Côte d’Ivoire pourra s’inspirer.

Quelles sont les performances de l’agriculture ivoirienne, surtout à l’export ?
Nous avons accru notre production de rente de 14%, celle vivrière de 28%. Aujourd’hui, l’agriculture ivoirienne totalise une production de 24 millions de tonnes, soit une moyenne de plus d’1 million de tonnes par tête d’habitant. Ces résultats font de la Côte d’Ivoire une puissance agricole. Notre objectif est de consolider cette position de puissance agricole en passant à l’étape de la transformation. Actuellement, seuls 20% de notre production sont transformés localement. Nous voulons hausser ce chiffre à 100% afin de moderniser par la même occasion nos systèmes de production et de commercialisation.

Comment la Côte d’Ivoire fait-elle face à la chute des prix des matières ?
La seule façon de résister à la chute des prix des matières premières, c’est de les valoriser sur place. Cela permet non seulement d’avoir une prise sur l’évolution des prix des matières premières, mais surtout de diversifier l’économie afin qu’elle ne repose pas uniquement sur l’exploitation brute des ressources naturelles. Le développement de l’industrie soutient l’essor du secteur tertiaire et celui des services. Ceci contribue à la diversification de l’économie et nous aide à résister aux chocs extérieurs.


 

Nouveaux accords de partenariat entre le Maroc et la Côte d’Ivoire
Le Maroc et la Côte d’Ivoire ont procédé, mercredi 27 avril à Meknès, à la signature d’accords-cadres de partenariat en marge de la 11e édition du Salon international de l’agriculture au Maroc. Ces accords ont été conclus du côté marocain par l’Agence de développement agricole (ADA) et l’Agence marocaine de coopération internationale (AMCI) et du côté ivoirien par l’Agence nationale d’appui au développement rural (ANADER) et l’Agropôle Afrique (APA). En vertu de ces conventions, les parties signataires veulent, entre autres, promouvoir le financement des formations et transferts de technologies dans le cadre de la Coopération technique triangulaire (CTT) ainsi que le partage d’expériences dans le domaine des productions animales et végétales. Elles ambitionnent aussi de favoriser l’accompagnement dans le processus d’homologation des produits de production, la promotion et la distribution d’aliments pour bétails et volailles ainsi que des produits vétérinaires fabriqués au Maroc.



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