Tewfik Jallab : Jeune premier et hors-la-loi !
Il ressemble à un d’Indien d’Amérique pourtant il porte dans ses gènes trois pays de Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie). Un patrimoine génétique qu’il assume avec fierté. Tewfik Jallab a été révélé par «Né quelque part» et «La Marche», avec Jamel Debbouze.
Les Inspirations ÉCO : Dans «Le Convoi», vous jouez un voyou. Comment prépare-t-on un tel personnage ?
Tewfik Jallab : On s’enferme dans sa chambre, on traîne avec des voyous…(Rires). Non, on essaye de préparer ce rôle comme on prépare n’importe quel rôle finalement, sauf que c’est un peu plus délicat. On ne fréquente plus les mêmes personnages, on ne regarde plus les mêmes films, on n’écoute plus la même musique. On change d’atmosphère pour se confondre dans ce qu’est le personnage. On re-fréquente des gens qui n’étaient plus d’actualité. Ce sont des personnages tellement riches et profonds, qui me touchent énormément, c’est une partie de mon enfance, ce sont des gens que j’ai connus, que j’ai côtoyés, avec qui j’ai grandi. C’est toujours intéressant d’avoir un tel rapport à ces personnages, ils sont pour moi une source de plaisir à jouer.
Et on apprend à aimer son personnage malgré ses failles ?
Oui même s’il n’est pas très réglo…(Rires). Moi je défendrai toujours mes personnages, jusqu’à la mort ! Il faut aimer son personnage sans jamais le juger. C’est sûrement une phrase bateau, mais j’essaie toujours d’être le plus humble possible, de me mettre en dessous et d’avoir un peu d’admiration pour lui. C’est le cinéma de genre qui m’a poussé à faire ce métier, le cinéma de Copolla, de Scorsese, de Frédéric Schoendoerffer !
Et c’est comment de travailler avec Frédéric Schoendoerffer ?
C’est une très belle rencontre et une très belle expérience ! J’espère que ce ne sera pas le dernier film qu’on fera ensemble. C’est un passionné ! C’est très rare, un réalisateur qui d’un point de vue technique, réussit à filmer des films de voyous, de genre, de cette manière-là. À ce niveau-là, il n’y en a pratiquement pas en France. C’est une référence dans le genre, je rêvais de travailler avec lui. Quand on regarde «Le Convoi», la scène du début avec un gros plan sur Benoît Magimel, une cigarette à la main, est un des plus beaux plans de cinéma que j’ai vu ! La première fois que j’ai vu ça, j’ai eu des frissons. Il a fait ce plan, sur un fond de musique, et ce cadre splendide, et tout ça donne le «La» du film.
Dans un cinéma français aussi riche, arrivez-vous à trouver votre place et à vous voir proposer des rôles aussi riches que ce cinéma ?
Je suis vraiment à un endroit où je pourrais me plaindre ou ne pas me plaindre. Je ne sais pas comment répondre à cela… On en veut toujours plus. On exige plus et je pense qu’on est en droit de demander davantage ! On fait un métier très difficile et on a envie de travailler le plus possible dans des choses complètement différentes. Cette année a été, pour moi, l’une des plus riches ! D’un point de vue de rencontres et de qualité de rôles. Quand je fais «Le Convoi», je fais un film de genre, je fais une série qui s’appelle «Trepalium» sur Arte, une série d’anticipation extraordinaire, je travaille avec Cedric Klapish, je joue un trader sur l’affaire Kerviel, je fais une série où je joue un Indien d’Amérique… Sur une année, j’ai eu 5 vies ! C’est extraordinaire ! Ce qui est sûr, c’est que les événements qui se passent en France font peur pour l’avenir parce que malheureusement, il va falloir coller à la réalité, parler de Daesh, des convertis, du Bataclan. C’est important, ça fait partie de notre métier. Mais c’est important qu’on continue à nous proposer autre chose…Ce que les décideurs ne savent pas, c’est que beaucoup de jeunes s’identifient à nous, soit via les origines, soit à travers les mêmes quartiers dans lesquels nous avons grandi. À travers le cinéma, mais aussi la musique, la danse… tous les arts. Je m’identifiais beaucoup à Jamel Debbouze, à Smain qui était pour moi un révélateur ! Mais on n’en avait pas assez des idoles comme ça ! C’est important d’avoir un large choix pour la jeunesse !
À vous seul, vous êtes Marocain, Algérien et Tunisien. Vous voyez-vous jouer dans une production, marocaine, maghrébine ?
Ce réalisateur-là n’est pas là pour rien (ndlr :Le réalisateur marocain Othman Naciri était assis à quelques mètres). On est en train de préparer un projet qui s’apprête à être exceptionnel, je pense, sur une partie de l’histoire qui n’a jamais été traitée. Mais je ne peux pas en dire plus.
J’aimerais jouer un cowboy. J’adorerais faire des films d’époque. On ne m’en a jamais proposés. Peu importe en fait. Si le personnage me fait vibrer, j’y vais. Mais c’est toujours bien de jouer des choses qui sont loin de nous…