Maître Abdelatif Laamrani : “L’ouverture du bureau de représentation de Saudi EXIM Bank au Maroc contribue à l’élargissement du champ de compétences locales”

Maître Abdelatif Laamrani
Fondateur de Laamrani Law Firm
Saudi Exim Bank pourra désormais informer et conseiller les entreprises via son bureau de représentation à Casablanca, grâce à l’autorisation délivrée par Bank Al-Maghrib dans le cadre de la loi 103-12. Accompagnée par le Cabinet Laamrani Law Firm – confirmant son expertise en droit de la régulation bancaire –, cette implantation stratégique renforce les liens économiques entre le Royaume du Maroc et le Royaume d’Arabie Saoudite. Elle consolide l’attractivité de Casablanca comme hub financier africain incontournable et témoigne de la confiance des investisseurs internationaux dans l’écosystème marocain.
Concrètement, comment l’existence d’accords spécifiques entre le Maroc et l’Arabie Saoudite (Accord de promotion et protection des investissements, Convention fiscale…) a-t-elle facilité ou structuré l’accompagnement juridique de ce bureau ? Ces accords offrent-ils, selon vous, un avantage comparatif décisif face à d’autres hubs africains dépourvus de tels liens institutionnalisés avec le Royaume saoudien ?
Il est indéniable que les relations institutionnalisées entre le Maroc et le Royaume d’Arabie Saoudite ont offert un cadre de confiance propice à la concrétisation d’un projet de cette nature. En tant que conseil juridique, notre mission a consisté à cartographier et mobiliser les instruments bilatéraux existants — notamment l’Accord de promotion et de protection réciproque des investissements et la Convention fiscale — afin de sécuriser le positionnement juridique du bureau de représentation.
Ces instruments assurent une prévisibilité réglementaire et une protection juridique renforcée, constituant un avantage comparatif notable face à d’autres hubs africains où les cadres conventionnels demeurent moins développés.
Toutefois, notre approche est demeurée strictement juridique et institutionnelle : il ne s’agissait pas d’intervenir dans la politique d’investissement saoudienne, mais de garantir la pleine conformité du projet au droit bancaire marocain et aux exigences réglementaires de Bank Al-Maghrib.
Le choix d’un «bureau de représentation» pour Saudi EXIM plutôt qu’une succursale bancaire pleine implique des contraintes opérationnelles spécifiques, notamment l’interdiction d’effectuer des opérations bancaires de base. Quels ont été les arguments juridiques et stratégiques décisifs en faveur de ce modèle pour Saudi EXIM ? Présente-t-il, selon votre expérience, des avantages fiscaux ou réglementaires distincts dans le cadre marocain (CFC) ?
Le choix de ce modèle procède d’une analyse stratégique et réglementaire approfondie. D’un point de vue juridique, le bureau de représentation est prévu et encadré par la loi bancaire n° 103-12. Il permet à une institution financière étrangère d’assurer une présence locale tout en respectant les limites imposées par Bank Al-Maghrib, notamment l’interdiction d’effectuer des opérations de crédit ou de dépôt.
Le rôle essentiel de ce type de structure réside dans l’information et le conseil qu’elle peut fournir à la fois à la banque d’origine et à ses partenaires : aider des exportateurs locaux ou étrangers souhaitant développer leurs marchés à l’international, accompagner des entreprises industrielles désireuses d’investir au Maroc ou dans le pays d’origine de la banque. Ce modèle représente une étape logique pour une banque internationale souhaitant observer, comprendre et interagir avec le marché marocain avant d’envisager un déploiement plus large.
Sur le plan réglementaire, il offre souplesse et visibilité, avec la possibilité de bénéficier du statut Casablanca Finance City (CFC), qui garantit un environnement fiscal et juridique attractif pour les institutions à vocation régionale. Notre rôle a consisté à structurer juridiquement cette présence et à garantir la conformité intégrale du dossier aux normes prudentielles fixées par Bank Al-Maghrib.
La loi bancaire marocaine de 2015 et les directives de Bank Al-Maghrib (BAM) ont été déterminantes dans cette autorisation. Observez-vous des lacunes ou des opportunités d’optimisation dans le cadre fiscal marocain actuel pour attirer davantage d’institutions financières internationales, notamment face aux standards de l’OCDE ou aux exigences de transparence accrues ?
Le cadre marocain est, à bien des égards, robuste et aligné sur les standards internationaux. La réforme bancaire de 2015 a marqué un tournant en introduisant des mécanismes de supervision et de conformité inspirés des meilleures pratiques — notamment celles de l’OCDE et de Bâle III.
Cependant, toute place financière compétitive doit continuellement évoluer. Il existe aujourd’hui des marges d’optimisation, notamment pour : accélérer les procédures d’autorisation, renforcer la digitalisation réglementaire et valoriser le régime fiscal des acteurs à vocation régionale.
Le Maroc conserve un avantage déterminant en matière de stabilité institutionnelle et de sécurité juridique. Les prochains défis relèveront davantage de la fluidité administrative et de la lisibilité internationale du cadre d’agrément.
Votre cabinet a accompagné plusieurs institutions. En comparant le processus et les exigences marocains (BAM, ministère des Finances) avec ceux d’autres juridictions africaines clés (ex: Afrique du Sud, Kenya, Sénégal) ou du Golfe, quels sont les 2-3 points forts distinctifs du cadre marocain qui ont joué en faveur de Casablanca, et quels aspects pourraient nécessiter des adaptations futures pour maintenir son leadership face à une concurrence régionale accrue ?
Comparativement aux autres cadres réglementaires, le Maroc se distingue par trois caractéristiques majeures : la prévisibilité du cadre légal, soutenue par une jurisprudence constante et une pratique administrative stable, une interlocution institutionnelle claire où Bank Al-Maghrib joue un rôle pivot actif, et enfin, le positionnement stratégique de Casablanca Finance City, qui confère au pays un statut de plateforme régionale de référence.
Pour préserver son leadership, le Maroc devra toutefois renforcer l’intégration entre régulation, fiscalité et innovation financière, en particulier dans les domaines de la fintech, de la finance verte et de la conformité numérique.
Au-delà des flux financiers, cette implantation est présentée comme renforçant l’écosystème local. Anticipez-vous un impact tangible sur le développement de compétences spécifiques au Maroc (ex: ingénierie financière dédiée au crédit export/assurance-crédit vers l’Afrique, expertise en conformité réglementaire panafricaine) ? Comment ce type de projet s’inscrit-il, selon vous, dans la stratégie marocaine de montée en gamme des services financiers et de création d’emplois hautement qualifiés ?
L’ouverture du bureau de représentation de Saudi EXIM Bank au Maroc contribue naturellement à l’élargissement du champ de compétences locales, notamment dans le crédit-export, le financement structuré et l’assurance-crédit panafricaine. Ce type d’initiative favorise l’émergence de profils hybrides — juridiques, financiers et technologiques — capables d’interagir avec des institutions internationales.
Sur le plan macroéconomique, ces projets s’inscrivent dans la stratégie marocaine de montée en gamme des services financiers et soutiennent la création d’emplois hautement qualifiés au sein d’un écosystème bancaire de plus en plus intégré. En tant que conseil, notre mission consiste à sécuriser cette dynamique et à veiller à ce qu’elle s’opère dans le respect du droit marocain et des standards internationaux.
En somme, notre accompagnement s’inscrit dans une démarche de conformité, de sécurité juridique et de vision à long terme. Il ne s’agit pas d’un acte isolé, mais d’une étape structurante du positionnement du Maroc en tant que hub financier africain, capable d’attirer des institutions souveraines et des acteurs globaux de premier plan. Nous restons attachés à préserver cet équilibre entre attractivité internationale et rigueur réglementaire, qui constitue, à mon sens, la signature du modèle.
Saudi EXIM Bank à Casablanca, une avancée pour le hub financier marocain
La Saudi Export-Import Bank (Saudi EXIM), institution publique saoudienne dédiée à la promotion des exportations non pétrolières du Royaume d’Arabie Saoudite, a officiellement ouvert un bureau de représentation à Casablanca. Cette implantation, autorisée par Bank Al-Maghrib dans le cadre de la loi bancaire n°103-12, s’est opérée avec l’accompagnement juridique du cabinet Laamrani Law Firm, spécialisé en régulation financière.
Créée en 2020, Saudi EXIM Bank soutient les entreprises saoudiennes à travers des solutions de financement à l’export, de garanties, d’assurance-crédit et d’assistance technique. Elle agit comme un levier de développement pour les secteurs industriels et les échanges commerciaux du Royaume, en particulier avec les marchés émergents.
Le bureau de représentation à Casablanca, bien qu’il ne soit pas habilité à effectuer des opérations bancaires, jouera un rôle d’interface stratégique. Il permettra à Saudi EXIM d’accompagner des projets communs, de nouer des partenariats avec les acteurs financiers marocains et de faciliter les synergies régionales en matière de commerce et d’investissement.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO