Maroc

Innovation : un axe stratégique sous-coté

La Fondation Gen J, en partenariat avec l’OMPM et W-Adviser, a dévoilé mardi au Technopark de Casablanca les résultats de la première enquête nationale sur l’innovation au Maroc. Si 77% des entreprises interrogées affirment mener des actions innovantes, seules 31% en font un axe central de leur stratégie. L’accès au financement, la faiblesse des partenariats académiques et les freins culturels demeurent des obstacles majeurs. Mais la dynamique progresse, portée par l’innovation produit, les pratiques collaboratives et l’open innovation.

Où en sont nos entreprises en matière d’innovation ? C’est l’une des questions auxquelles répond la Fondation Gen J, en partenariat avec l’Observatoire marocain des pratiques de management (OMPM) et W-Adviser, à travers les résultats de la première Enquête nationale sur l’innovation au Maroc.

Présentée le 29 septembre 2025 au Technopark de Casablanca, cette étude constitue un diagnostic inédit sur l’état de l’innovation dans le Royaume, mettant en lumière une dynamique prometteuse mais encore insuffisamment structurée.

«Cette enquête n’est pas seulement un diagnostic : c’est une feuille de route collective. Elle démontre que le Royaume dispose des talents et des dynamiques nécessaires, mais qu’il faut structurer et coordonner l’action pour transformer l’innovation en véritable levier de compétitivité et de croissance. Avec GEN J, nous voulons affirmer l’ambition du Maroc de devenir une Innovation Nation d’ici 2030, pour sortir de la trappe des pays à revenu intermédiaire, et créer des dynamiques collectives autour de projets structurants concrets dans ce contexte», souligne Tarik Haddi, président de la Fondation Gen J.

Des signaux positifs et des dynamiques émergentes
Ainsi, les résultats de cette enquête révèlent que 77% des entreprises marocaines déclarent mener des actions innovantes, mais seulement 31% les intègrent en tant qu’axe central de leur stratégie. En outre, l’accès au financement reste un obstacle majeur à l’innovation, affectant une entreprise sur deux.

De plus, la collaboration avec le monde académique demeure limitée : seules 33% des organisations travaillent en partenariat avec des laboratoires universitaires, indique l’enquête. Malgré ces freins, la tendance n’est pas dénuée de leviers. Au total, 82% des entreprises sondées privilégient l’innovation produit, axée sur la personnalisation client et l’amélioration continue.

L’open innovation, elle, progresse également, avec près de 48% des acteurs collaborant avec des partenaires externes. Pour sa part, l’innovation managériale et RH gagne du terrain, notamment grâce à la montée en puissance de nouvelles pratiques collaboratives et à la valorisation des talents. Ces constats mettent en évidence l’urgence de passer d’une simple volonté à une stratégie structurée, via un véritable Système national de l’innovation.

«Les chiffres de cette enquête parlent d’eux-mêmes : une entreprise sur deux estime que le financement reste un frein, et seules trois sur dix placent l’innovation au cœur de leur stratégie. Il est donc essentiel de renforcer les passerelles entre entreprises, universités et acteurs publics afin de transformer cette prise de conscience en résultats tangibles pour l’économie et la société», recommande de son côté Lamia Hannaoui, directrice générale de W-Adviser.

Parmi les recommandations issues de cette enquête figurent également la nécessité d’investir davantage dans l’éducation et la recherche, d’adapter les financements disponibles, d’intégrer l’innovation dans les politiques industrielles et de créer une gouvernance dédiée pour coordonner l’action des différents acteurs.
À travers cette enquête et les débats qu’elle suscite, la Fondation Gen J confirme son rôle de catalyseur. Sa mission reste claire : stimuler une culture globale de l’innovation et enclencher des dynamiques collectives pour accompagner la transition du Maroc vers une économie compétitive, durable et tournée vers l’avenir.

Vers un Maroc «Innovation Nation» à l’horizon 2030
La présentation des résultats de cette enquête a réuni au Technopark plus de 370 acteurs économiques, académiques et institutionnels. L’événement a été marqué par une keynote internationale sur l’innovation frugale de l’expert Sanjeev Rao et deux tables rondes thématiques. La première avait pour thème «l’innovation à l’épreuve du réel : freins, solutions et retours d’expérience».

Lors de son intervention à cette table ronde, Siham El Mejjad, présidente de Tookeez, a souligné que la nature des freins à l’innovation dépend de la taille de l’entreprise. Ainsi, explique-t-elle, les plus petites d’entre elles n’ont pas forcément assez de ressources (RH, temps…) pour innover. À l’opposé, les grandes entreprises qui, elles, ont suffisamment de ressources, ont souvent un problème de culture de l’innovation. Autre frein marquant, ajoute-t-elle, le fait de «se dire que ce qui marche aujourd’hui continuera de marcher demain».

Pour sa part, Mehdi Bouamrani, directeur général de Dislog a rappelé que l’innovation est surtout une question de mindset et qu’un entrepreneur doit s’entourer de collaborateurs qui sont dans ce même état d’esprit. Il a ensuite expliqué que le financement continue d’être l’un des principaux freins à la croissance. De plus, ajoute-t-il, le foncier/immobilier continue de peser lourd dans les business plans, limitant ainsi les investissements innovants. Par ailleurs, le leadership doit mettre en place des processus qui ne limitent pas l’innovation, recommande-t-il.

La deuxième table ronde s’est tenue sur le thème «Maroc, future Innovation Nation ?». À cette question, Tarik Haddi répond que le Royaume dispose du référentiel culturel propice. De son côté, le Dr. Saif Allah Allouani, fondateur de HFEI, rappelle la construction en cours du système national de l’innovation. Les pièces nécessaires au puzzle semblent donc toutes présentes.

«La dynamique est là. D’ici 2030, c’est jouable !», estime Allouani. Il est même recommandé de viser le top 3 africain à cet horizon, recommande Gen J. Cependant, pour réussir ce défi, nuance Tarik Haddi, la gouvernance de l’innovation reste de loin le chantier le plus critique. Une fois ce levier traité avec efficacité, la part des entreprises générant plus de 30% de leur chiffre d’affaires grâce à l’innovation ira en augmentant et le pari sera gagné.

Tarik Haddi
Président de Gen J

«Nous voulons affirmer l’ambition du Maroc de devenir une Innovation Nation d’ici 2030.»

Lamiae Benmakhlouf
DG de Technopark

«L’innovation ne se limite pas aux startups. Elle est transversale et concerne toutes les institutions.»

Mehdi Bouamrani
DG de Dislog

«En entreprise, le leadership doit mettre en place des processus qui ne limitent pas l’innovation.»

Abdelhafid Marzak / Les Inspirations ÉCO



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