Edito. Impôt refuge

C’est un signal fort. En hausse de 36,6% à fin mai, l’IS affiche un rythme inédit, largement supérieur à celui de la croissance économique nationale, au point d’atteindre 40,5 MMDH. Jamais, cet impôt n’avait réalisé une telle performance depuis la réforme de 1990.
À ce rythme, le record de 72,7 MMDH réalisé en 2024 pourrait être effacé bien avant la clôture de l’exercice. Hors norme, cette performance incombe, cependant, à un cercle restreint de grandes entreprises, pas plus de 150 sur les 420.000 que compte le tissu économique marocain. Réalisant chacune plus de 100 millions de dirhams de bénéfices, elles constituent le socle des rentrées d’IS s’adjugeant près de 90% des recettes, pulvérisant ainsi la fameuse règle des 20-80. OCP contribue justement, à lui seul, à 20% des recettes de l’IS.
Ce degré de concentration, bien que courant dans les économies modernes, interpelle cependant ! Considéré comme l’impôt refuge du système fiscal, l’IS est une valeur sûre tant ses performances dépassent régulièrement les hypothèses budgétaires et que sa forte élasticité à l’activité en fait un indicateur avancé de la dynamique des grands groupes. Reste que cette dynamique n’est pas perçue de la même manière par l’ensemble des contribuables.
Pour les PME, dont le bénéfice médian est inférieur à 300.000 dirhams, la réforme de l’IS se traduira par un doublement du taux, passant de 10% à 20% d’ici janvier 2026. Une bascule qui change la donne pour des structures moins solides, moins visibles, mais numériquement majoritaires. Ce delta entre concentration des recettes et diffusion de la charge fiscale interroge, cependant, sur la notion d’équité. Une notion dont la préservation en matière fiscale est indispensable !
Moulay Ahmed Belghiti / Les Inspirations ÉCO