Stockage d’énergie : MASEN lance sa première plateforme expérimentale

Porté par l’Agence marocaine pour l’énergie durable (MASEN), un ambitieux projet d’expérimentation des technologies de stockage d’énergie voit le jour, avec un financement international et une feuille de route rigoureusement encadrée. Objectif, structurer un écosystème local autour d’un enjeu stratégique pour la transition énergétique.

Dans un contexte où les défis de l’intermittence des énergies renouvelables s’imposent comme un obstacle majeur à leur déploiement massif, le Maroc s’attaque à l’un des maillons importants de sa transition énergétique, le stockage.

La Banque mondiale a approuvé le plan de passation des marchés pour la mise en œuvre du Morocco Energy Storage Testbed Project, une plateforme de test inédite dédiée aux technologies de stockage, portée par l’Agence marocaine pour l’énergie durable (MASEN). Derrière ce projet, un constat clair, l’avenir des systèmes électriques repose non seulement sur la production décarbonée, mais aussi sur la capacité à stocker l’électricité propre de manière fiable et compétitive.

Or, à l’échelle nationale, cette capacité reste encore en phase de développement. Le projet entend y remédier en dotant le pays d’une infrastructure expérimentale de pointe, permettant d’évaluer, d’adapter et de fiabiliser les solutions techniques dans des conditions réelles.

Une plateforme test pour un tournant stratégique
Avec une enveloppe initiale de 3,45 millions de dollars, le projet prévoit deux volets principaux. D’une part, la conception et l’exploitation de la plateforme expérimentale, confiées à un cabinet de conseil international selon la procédure QCBS (Qualité-Coût), pour un montant estimé à 200.000 dollars.

D’autre part, l’acquisition des équipements techniques de test – batteries, systèmes de gestion, capteurs – pour un total de 3,25 millions de dollars, via un appel d’offres international prévu entre juin et décembre 2026.

Ce calendrier, encadré par les standards de transparence et d’exigence de la Banque mondiale, permet d’assurer un déploiement méthodique, avec une montée en puissance progressive jusqu’à avril 2027.

Structurer une filière nationale du stockage
Au-delà de l’infrastructure physique, l’enjeu est aussi industriel et technologique. En facilitant l’expérimentation locale, MASEN accélère l’émergence d’une filière marocaine du stockage d’énergie, capable de répondre aux besoins du marché intérieur, notamment dans les zones isolées et les réseaux en forte croissance, tout en positionnant le pays comme une plateforme régionale d’innovation dans ce domaine.

Ce projet s’inscrit dans une logique de continuité avec les ambitions affichées dans la Stratégie nationale de la transition énergétique, mais il marque aussi un changement d’échelle, en traduisant les ambitions en dispositifs concrets. En testant des solutions réelles, avec un suivi rigoureux des performances et de l’impact, MASEN jette les bases d’un écosystème où start-ups, laboratoires, institutions publiques et industriels pourront collaborer. Le timing du projet n’est pas anodin. Avec un mix électrique de plus en plus tourné vers le solaire et l’éolien, la question du stockage devient primordiale pour garantir la stabilité du réseau.

Le Maroc, qui ambitionne de dépasser les 52% de capacité renouvelable d’ici 2030, ne peut faire l’économie d’une stratégie solide dans ce domaine. Le Morocco Energy Storage Testbed Project pourrait bien être la première brique d’un pilier stratégique d’une souveraineté énergétique fondée sur l’innovation locale. Et un message envoyé à l’international, le Maroc ne se contente plus d’être un terrain d’installation pour les énergies renouvelables, il devient aussi un laboratoire technologique.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO