Taxes aéroportuaires : le Maroc parmi les pays les moins chers d’Afrique

Selon une étude publiée par l’AFRAA, le Maroc se distingue par un niveau très bas de taxes et redevances appliquées aux billets d’avion. Une politique tarifaire qui tranche avec celle de nombreuses nations africaines, et qui pourrait favoriser la compétitivité du pays dans les années à venir.
Voyager coûte cher, mais certains pays semblent l’avoir mieux compris que d’autres. En Afrique, le poids des taxes sur les billets d’avion pèse lourdement sur les passagers, au point de représenter parfois plus de la moitié du prix total.
Pourtant, dans ce paysage contrasté, le Maroc apparaît comme un bon élève, pratiquant l’un des niveaux les plus bas du continent, selon le rapport 2024 de l’Association des compagnies aériennes africaines (AFRAA) sur les taxes, redevances et frais aériens. Une politique qui pourrait bien devenir un atout stratégique pour un pays qui vise à renforcer son attractivité régionale.
Le Maroc, un des pays les plus compétitifs du continent
Le transport aérien est essentiel pour relier les populations, soutenir le tourisme et dynamiser les échanges économiques. Pourtant, sur le continent africain, ce secteur reste structurellement déficitaire. Alors que l’industrie mondiale du transport aérien a dégagé 27 milliards de dollars de bénéfices nets en 2023, les compagnies africaines continuent d’afficher une rentabilité négative. Le rapport souligne notamment que malgré la reprise post-Covid, les compagnies africaines souffrent de coûts d’exploitation élevés, largement imputables à une fiscalité excessive.
«Le transport aérien est encore perçu comme un luxe. Les gouvernements, les aéroports et les prestataires ont tendance à surtaxer les compagnies alors même que ces dernières luttent pour survivre», observe l’AFRAA.
Ces charges se répercutent directement sur les passagers, réduisant leur capacité à voyager et freinant la demande intérieure comme régionale. Une situation paradoxale alors que le continent cherche à renforcer sa connectivité et à stimuler l’intégration économique. Dans cet environnement contraint, le Maroc se distingue positivement.
Le rapport 2024 de l’AFRAA, fondé sur les données de l’IATA collectées en septembre, indique que les passagers au départ du Maroc s’acquittent en moyenne de 25,1 dollars de taxes pour un vol international. Ce chiffre place le Royaume parmi les dix pays africains les moins chers en la matière, aux côtés notamment de l’Algérie (9,8 dollars), de la Tunisie (15,4), ou encore du Botswana (18,9).
À titre de comparaison, certains pays comme le Gabon (297,7 dollars), la Sierra Leone (294) ou le Nigeria (180) appliquent des montants jusqu’à dix fois plus élevés. Pour les vols régionaux, la tendance se confirme, avec une moyenne de seulement 18,7 dollars de taxes par billet au Maroc, contre 163,3 au Bénin ou 116,5 au Sénégal.
Cette modération fiscale permet au Royaume d’émerger comme un modèle de compétitivité tarifaire dans un continent encore marqué par de fortes disparités. Les chiffres régionaux confirment cette dynamique. En Afrique du Nord, les taxes moyennes pour les vols internationaux atteignent 25,27 dollars, soit le niveau le plus bas du continent, suivi de l’Afrique australe à 34,50 dollars. Loin derrière, l’Afrique de l’Ouest (109,5) et l’Afrique centrale (106,6) appliquent des montants quatre fois plus élevés.
Pourtant, l’Afrique du Nord concentre à elle seule 35% du trafic aérien continental, ce qui démontre que volume de trafic et fiscalité modérée peuvent aller de pair.
Une harmonisation attendue pour faire décoller l’Afrique
Dans un contexte marqué par une faible capacité de dépense des citoyens africains, la modération des taxes aériennes devient un véritable levier de politique publique. Le rapport de l’AFRAA insiste sur l’urgence de «revoir le niveau des taxes pour stimuler la demande et rendre le transport aérien plus accessible».
En optant pour une fiscalité plus légère, le Maroc envoie un signal clair aux compagnies et aux voyageurs, le ciel marocain reste ouvert, compétitif et attractif. Ce positionnement est en phase avec la volonté du pays de devenir un hub régional de transport aérien, capable de capter une part croissante du trafic entre l’Europe, l’Afrique subsaharienne et le Moyen-Orient.
Il s’agit aussi d’un atout pour le secteur touristique, essentiel pour l’économie nationale, qui bénéficie ainsi de tarifs plus abordables. Si les écarts sont marqués à l’échelle africaine, ils le sont encore davantage lorsqu’on compare les niveaux de taxation avec ceux de régions voisines. Pour les vols régionaux, un passager africain débourse en moyenne 68 dollars de taxes, contre seulement 32 en Europe et 34 au Moyen-Orient.
Pourtant, ces régions affichent un trafic bien plus dense, preuve que des économies d’échelle et des politiques coordonnées peuvent faire baisser les coûts sans compromettre la qualité des infrastructures. L’AFRAA observe également que le nombre moyen de taxes appliquées en Afrique s’élève à 3,5 par billet, contre 2,53 en Europe. Cette complexité tarifaire constitue un frein supplémentaire au développement du transport aérien sur le continent.
Face à ce constat, l’AFRAA appelle à une réforme en profondeur du système de taxation aérienne en Afrique. L’organisation plaide pour une harmonisation continentale, s’appuyant sur les principes de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), qui recommande notamment la transparence, la non-discrimination, la proportionnalité et la consultation des usagers avant toute modification tarifaire.
«Il est temps de faire du transport aérien un levier de croissance, pas une source de rente immédiate», conclut le rapport.
Le Maroc, en choisissant de ne pas surcharger fiscalement les passagers, semble avoir compris ce message. Une orientation stratégique qui pourrait inspirer d’autres États africains désireux de redonner de l’élan à leur secteur aérien.
Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO