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Hydrocarbure : le Niger, producteur d’or noir, confronté à une pénurie inédite d’essence

Le Niger traverse une crise énergétique sans précédent, marquée par une pénurie grave d’essence Super, une ressource vitale pour le pays. Depuis le début du mois, les stations-service du pays, notamment à Niamey, font face à une situation de rupture de stock. Les habitants, en plein ramadan, sont contraints de s’adapter à cette pénurie : certains poussent leurs motos ou marchent avec des bidons vides à la main.

Assis sur le banc d’une station-service à Niamey, la capitale du Niger, Amadou Sani fait de grands gestes de la main aux usagers qui rebroussent aussitôt chemin.

«Ils ont compris qu’il n’y a plus d’essence», confie ce pompiste à l’AFP.

Le pays est confronté depuis le début du mois à une pénurie inédite de l’essence Super, la plus utilisée dans cet État sahélien de 26 millions d’habitants. «Nos réservoirs sont à sec depuis trois jours, personne ne peut vous dire quand nous serons ravitaillés, c’est l’incertitude», explique le gérant d’une station en banlieue de Niamey. «Vous voyez ce taxi là-bas, son conducteur a fait le tour de la ville et a fini par tomber en panne sèche ici», raconte-t-il.

Une raffinerie aux abois
Sous un soleil de plomb et en plein ramadan, on peut voir des habitants à bout de souffle sillonner Niamey en poussant leurs motos ou marchant bidon vide à la main. Le pays, qui produit du pétrole mais en raffine peu, a déjà connu des pénuries de carburant, mais qui n’ont jamais atteint cette ampleur. L’unique raffinerie du pays, la Soraz, «n’arrive plus à satisfaire la demande intérieure» qui a explosé «depuis plus d’un an», affirmait samedi soir la Société nigérienne des produits pétroliers (SONIDEP, publique).

En cause notamment, l’assèchement du florissant marché noir alimenté à partir du Nigéria voisin, géant économique et l’un des premiers producteurs mondiaux de pétrole. En 2023, les prix y ont triplé, après la suppression des subventions sur l’essence par le gouvernement.

Le carburant qui arrivait frauduleusement du Nigéria «représentait jusqu’à 50% des parts du marché» et alimentait les grandes régions proches du Nigéria, comme Zinder, Maradi (sud), Tahoua et Dosso (sud-ouest), selon le directeur commercial de la SONIDEP, Maazou Oumani Aboubacar. La pénurie a d’abord touché plusieurs villes nigériennes avant de gagner la capitale, Niamey, où de nombreuses stations-service n’ont plus de carburant à vendre.

Dimanche, dans le centre de la ville, le trafic routier a été moins dense que d’habitude. Les rares stations servant encore de l’essence sont prises d’assaut par des dizaines d’automobilistes et de motocyclistes.

«J’espère avoir deux litres d’essence pour faire des courses très urgentes», lance Moussa Saidou. Juché sur sa moto, casque et lunettes noires, Issa Mahamadou ne décolère pas. «Je veux visiter mes chantiers mais je n’ai plus d’essence!», s’impatiente ce maçon.

Conjoncture compliquée
Avec le déclin du marché noir, «toute la consommation du pays repose désormais sur la production nationale», constate Oumani Aboubacar, de la SONIDEP. Depuis 2011, le Niger produit quelque 20.000 barils d’essence et gasoil raffinés par jour, et n’a jusqu’ici pas augmenté ses capacités. Il a arrêté ses exportations l’année dernière. La raffinerie du pays ne fournit à la SONIDEP que «25 camions-citernes d’essence par jour», quand les besoins quotidiens nationaux atteignent «jusqu’à 50 camions-citernes», souligne Oumani Aboubacar.

Pour combler le déficit, «nous procédons depuis un an à des importations, essentiellement du Nigéria», assure-t-il.

La SONIDEP dispose également «d’un stock considérable d’essence» au port de Lomé, au Togo, qui devra être acheminé dans les prochains jours à Niamey grâce à «des escortes (militaires) spéciales» à travers l’est du Burkina Faso, frappé par des attaques jihadistes meurtrières. Les baisses des prix du carburant récemment décidées par le régime militaire au pouvoir depuis 2023 au Niger ont aussi dopé la consommation nationale, selon les syndicats.

Le pays exporte par ailleurs son pétrole brut, acheminé via un oléoduc reliant Agadem (nord-est du Niger) au port béninois de Sèmè-Kpodji. Une brouille entre la junte nigérienne et le Bénin a perturbé ces exportations pendant plusieurs mois.

Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO



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