Maroc

Outsourcing : nouvelle législation en France, menace ou opportunité pour le Maroc ?

Le démarchage téléphonique sans consentement est en passe d’être interdit en France, mettant un coup d’arrêt à une pratique jugée intrusive et souvent abusive. Cette mesure pourrait avoir des répercussions majeures au Maroc, principal sous-traitant de la relation client française, engendrant des suppressions d’emplois, particulièrement dans les petites structures. Mais ce bouleversement pourrait aussi accélérer la transformation du secteur vers des services à plus forte valeur ajoutée.

Le démarchage téléphonique impromptu a fini par avoir raison de la patience des consommateurs en France. L’affaire a été portée devant l’Assemblée nationale, qui a récemment voté l’interdiction du démarchage téléphonique sans le consentement préalable du consommateur.

En plus de mettre un frein à une démarche jugée intrusive, voire agressive, cette mesure a été introduite afin de renforcer l’arsenal juridique pour réprimer les fraudes aux aides publiques. Ainsi, la disposition votée propose d’inverser le principe du démarchage téléphonique, en obligeant les professionnels à obtenir le consentement préalable de tous les consommateurs.

Sauf que cette activité fait vivre au Maroc, principal sous-traitant de la relation client de la France, bon nombre de centres d’appels notamment de petite taille. En France, la fédération de la vente directe craint que la nouvelle loi entraîne la suppression de dizaines de milliers d’emplois. Au Maroc, les répercussions peuvent être encore plus denses.

Selon des professionnels du secteur de l’outsourcing, l’impact est indéniable auprès des prestataires, notamment ceux qui basent leur activité sur la prospection commerciale sortante, mais relativement limité chez les outsourceurs généralistes.

«C’est toutefois une excellente mesure pour protéger les consommateurs, qui étaient sursollicités à toute heure de la journée, de manière répétée, intrusive et désagréable. Les besoins d’achat des consommateurs ne vont toutefois pas changer et il est déjà possible de répondre à leurs attentes via d’autres canaux et d’autres méthodes de manière plus respectueuse, plus intelligente et laissant une expérience très positive», indique Youssef El Aoufir, Deputy CEO et CEO des marchés francophones au sein d’Intelcia.

Les petites structures plus vulnérables
Pour les petits centres d’appels la nouvelle loi signifie la fin des campagnes de prospections massives et à l’aveugle.

De plus, à en croire Youssef El Aoufir, ce type de campagne est devenu de plus en plus inefficace ces dernières années, créant de la souffrance à tous les niveaux, aussi bien chez le client final qui est harcelé, le télévendeur dont le métier est devenu extrêmement pénible, la marque dont l’image se dégrade, et l’outsourceur qui peine à couvrir ses coûts dans ce genre d’opérations.

En outre, ce nouveau procédé, à savoir l’obtention du consentement du client avant de pouvoir le programmer dans des opérations de prospection va réduire considérablement le volume de contacts disponibles et, par ricochet, la réduction des effectifs nécessaires pour traiter ces contacts. Les prestataires de service qui font de la pure conquête traditionnelle vont forcément en subir les conséquences et des emplois seront perdus.

Vers un changement de paradigme
Mais, la balance pourrait éventuellement s’inverser. «Cette contrainte va également réduire la capacité d’acquisition de clients et poussera les marques à envisager de nouvelles approches pour identifier des prospects consentants et de nouveaux canaux entrants de vente. Elle les encouragera également à privilégier les interactions avec les clients existants pour en faire des moments de création de valeur additionnelle.

Ce qui se traduira par une transformation progressive des traitements faits en assistance client en vrais moments de découverte de besoins, de conseil et de création d’opportunités commerciales. Donc un besoin pour plus de temps et plus d’effectifs pour ajouter cette nouvelle dimension à la relation client traditionnelle. Il est donc très probable que la balance soit finalement positive en faveur de la création d’emplois», rassure le patron des marchés francophones d’Intelcia.

Notons qu’au Maroc le secteur de l’outsourcing est en pleine transformation, et les avancées réalisées sont remarquables. Preuve en est, la position en tant que hub stratégique pour la relation client externalisée avec près de 120.000 emplois directs dans le secteur. Quant à l’évolution vers des services à plus forte valeur ajoutée, sur le marché français, plus de 60% des interactions client sont désormais traitées de manière hybride (téléphone+ digital).

Le Maroc représente également la deuxième meilleure destination pour l’outsourcing en Afrique. Le pays a gagné 12 places au niveau international, pour se positionner au 28e rang mondial.

Au niveau du chiffre d’affaires, l’outsourcing est passé de 14,7 à 17,9 milliards de dirhams au cours des deux dernières années, soit une augmentation de 20% et de 17 MMDH à l’export en 2023.

Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO



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