Innovation dans l’enseignement supérieur : encore du chemin à parcourir
Aujourd’hui, l’enseignement supérieur privé représente près de 5% des effectifs des étudiants au Maroc. Un chiffre bien en deçà des prévisions établies il y a dix ans, et qui tablaient plutôt sur 10 à 15%. Néanmoins, selon les experts, c’est un secteur qui a assez rapidement pris ses marques, même s’il n’est pas, à ce jour, au niveau de croissance attendu.
L’État marocain a voulu, il y a quelques années, via un système d’autorisation et de reconnaissance, développer le secteur de l’enseignement supérieur privé. Cela se justifiait notamment par l’explosion démographique et la croissance exponentielle du nombre d’étudiants que le secteur public ne pouvait plus absorber. Ainsi, les universités privées ont commencé à essaimer. Certaines ont été reconnues et proposent des diplômes accrédités par l’État. L’émergence de ces universités privées s’est révélée une alternative tant pour les étudiants marocains qu’étrangers.
Alternative crédible
«L’idée de la création et le soutien à ce secteur de l’enseignement supérieur privé, c’était justement de proposer des alternatives et de faire en sorte que des élèves, finalement, trouvent de la qualité sur le territoire sans avoir à traverser l’Atlantique ou la Méditerranée pour pouvoir obtenir ce niveau de qualité», indique Olivier Aptel, doyen et directeur général de Rabat Business School (RBS).
Pour sa part, Ahmed Ennasri, directeur académique de RBS, indique que cette alternative ne concerne pas uniquement les étudiants marocains, mais aussi «les autres étudiants africains, de manière générale, ainsi que ceux du Moyen-Orient et d’Asie». L’idée étant de faire de l’enseignement privé au Maroc un HUB régional en la matière. Une alternative qui, d’ailleurs, s’avère protectrice tant pour les étudiants que pour le pays.
«On s’aperçoit que beaucoup d’élèves, après le baccalauréat notamment, ou après leur diplôme de licence, par exemple, n’ont qu’une envie, c’est d’aller poursuivre à l’étranger. Ce qui n’est pas en soi une mauvaise chose. Ça se fait partout. Mais on peut quand même remarquer qu’il y a une forme de fuite des cerveaux qui, quelque part, n’est pas bonne pour un pays, pour son développement», souligne encore Olivier Aptel.
L’émergence des universités privées a, en somme, donné «la possibilité aux étudiants de passer une partie de leur parcours ici au Maroc, peut-être une autre partie à l’étranger, et de faire ce lien qui reflète finalement le Maroc, qui est un pays d’accueil, d’échange et d’ouverture sur le monde», souligne le directeur général de RBS.
Exigences
En dépit des efforts consentis et de quelques réussites, beaucoup d’exigences restent à remplir afin de capter encore plus d’étudiants, notamment en matière de qualité académique afin que les universités privées marocaines puissent être reconnues à l’échelle internationale via des systèmes d’accréditation. Si on prend l’exemple des Business Schools, un étudiant marocain qui dispose, à deux pas de chez lui, d’une université accréditée par CISB, ou l’EFMD, aura une sérieuse alternative à des études à l’étranger.
«La qualité académique est un paramètre qui se travaille. Il y a des standards, des normes et des taux d’encadrement. Il y a des niveaux de recherche scientifiques à atteindre. Il faut aussi que les établissements d’enseignement supérieur soient capables de proposer dans leur cursus des opportunités d’expérimenter des périodes, notamment de mobilité internationale. Donc, il est important que, quels que soient les établissements, sur un programme de licence ou un programme de master, ils puissent proposer un ou deux semestres à l’étranger, en partenariat avec d’autres établissements à l’étranger», analyse le directeur général de RBS.
De récentes statistiques indiquent, qu’aujourd’hui, les étudiants ou les lauréats ne recherchent plus seulement la qualité de la formation, mais aussi la qualité des partenariats et des accréditations. Ces dernières permettront aux établissements d’enseignement supérieur privé au Maroc d’être encore plus attractifs pour les étudiants et les enseignants étrangers.
«Beaucoup d’étudiants veulent se retrouver dans des salles de classe avec des étudiants d’autres pays, et être en face de professeurs qui eux-mêmes ont eu un vécu, une expérience à l’étranger, donc des professeurs internationaux. Quand on arrive à mettre tout ça en place, on constitue un cocktail qui commence à devenir attractif et même, bien souvent, supérieur à ce qu’on peut trouver dans certains pays. Et donc, c’est là qu’on peut éventuellement gagner et faire rester au pays les étudiants», explique Olivier Aptel.
Vision internationale
Pour gagner en attractivité et, justement, pouvoir se positionner sur les standards de qualité académique internationale, l’enseignement supérieur privé doit adopter une vision internationale. Une vison basée, notamment, sur l’innovation de son offre. «Il faut innover tant dans l’approche que le choix des partenariats et des accréditations», insiste le doyen de RBS.
Ahmed Ibn Abdeljalil / Les Inspirations ÉCO