Éco-Business

E-commerce : 500 millions de DH de perte par an

L’Administration des douanes et impôts indirects déclare la guerre aux fraudeurs sur les sites de commerce en ligne. A compter du 1er juillet 2022, les achats effectués via les sites de e-commerce seront exclus de l’exonération des droits de douane à l’importation, quelle qu’en soit la valeur. Une guerre qui pourrait faire beaucoup de bien aux recettes douanières. 

La bamboula est terminée pour les achats via les plateformes internationales de commerce électronique. A compter du 1er juillet 2022, les achats effectués via les sites de e-commerce seront exclus de l’exonération des droits de douane à l’importation, quelle qu’en soit la valeur, prévient l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII).

Le Conseil du gouvernement a d’ailleurs approuvé un décret (2.22.438), jeudi dernier, donnant ainsi carte blanche au gendarme des échanges commerciaux extérieurs qui précise toutefois que cette disposition ne s’applique pas aux envois, à caractère non commercial reçus de l’étranger dont la valeur n’excède pas 1.250 dirhams, qui continueront à bénéficier de l’exonération douanière conformément au décret susvisé.

Enfin, poursuit l’ADII, il convient de souligner que cette mesure ne vise en aucune manière à porter atteinte à la liberté d’achat du consommateur via les plateformes de commerce international, mais elle a plutôt pour objectif de protéger tant le citoyen que l’économie locale. Tout est parti d’un constat pour le moins alarmant.

Alors que le commerce électronique via les plateformes internationales est en pleine explosion, le chiffre d’affaires réalisé au Maroc par certaines de ces plateformes a dépassé le milliard de dirhams en 2021. Un montant qui pourrait atteindre 2 MMDH cette année.

En parallèle, des “pratiques illégales” liées à cette activité se développent. Car, argue l’administration des Douanes, à l’issue de plusieurs enquêtes, il a été constaté que les envois expédiés par certaines plateformes internationales de commerce électronique consistent en réalité en des opérations d’importation de grandes quantités de marchandises, sous couvert de facilités douanières prévues pour les envois exceptionnels n’ayant pas de caractère commercial, ainsi que les marchandises de faible valeur.

Cette situation, poursuit la même source, a conduit à l’émergence d’un marché informel consistant en la revente d’articles acquis via des sites internationaux de commerce électronique, en usant de la fraude sur la valeur déclarée des achats (sous-facturation) ou en les répartissant entre plusieurs bénéficiaires, alors que l’acheteur réel est la même personne, et ce, afin de bénéficier de l’exonération douanière et de contourner les normes de contrôle liées à la protection du consommateur.

Afin de pallier cette situation, le renforcement du contrôle douanier sur les envois du commerce électronique s’est avéré nécessaire, justifie l’administration qui estime que ces pratiques constituent une concurrence déloyale pour l’industrie locale et le commerce formel et un manque à gagner certain pour l’État et peuvent représenter un danger pour la santé du consommateur.

Un argument qui convainc beaucoup d’experts car, selon eux, les revendeurs marocains seront ainsi obligés de revoir à la hausse leurs prix pour se conformer aux tarifs du marché local.

Une manne financière non négligeable
La décision cadrant les envois exceptionnels dénués de tout caractère commercial aura aussi un impact positif certain sur les recettes douanières de l’État. Sur le 1 milliard de dirhams (MMDH) de chiffre d’affaires réalisé au Maroc par certaines de ces plateformes, il y a 200 millions de dirhams (MDH) de pertes de recettes douanières rien que pour la TVA.

Si on y ajoute les droits de douane, il faut compter dans les 500 MDH en gros par an de perte. Une manne financière non négligeable en ces temps de crise où l’État est appelé à colmater les brèches. Mais cette décision qui intervient pour le durcissement du contrôle douanier sur les envois relatifs aux transactions effectuées par les plateformes électroniques fait déjà grincer des dents.

«Il faut s’attendre encore à des pratiques frauduleuses de la part de commerçants locaux véreux qui feront tout pour continuer de bénéficier de l’exonération des droits de douane sur les transactions d’une valeur inférieure à 1.250 dirhams», regrette un spécialiste pour qui il fallait remonter la barre jusqu’à au moins 2.000 DH pour permettre aux jeunes de s’offrir les gadgets que le Maroc ne fabrique pas. Et même à ce niveau, le risque zéro n’existe pas. L’idéal, dit-il, serait qu’on encourage davantage le made in Morocco. «Nous savons fabriquer les produits que nous achetons sur les plateformes internationales. Il suffit d’un petit coup de pouce pour qu’on n’ait plus besoin de dépenser des milliards en ligne au détriment de l’économie nationale», insiste-t-il.

Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO



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