Présidentielle française : le match Macron-Le Pen n’est pas plié !
Le président sortant et la candidate d’extrême droite s’affrontent aujourd’hui dans un débat télévisé. Marine Le Pen veut faire oublier sa prestation ratée en 2017. Emmanuel Macron devra, lui, convaincre sur son bilan.
Jour J. Les Français attendent avec impatience le match qui opposera, ce soir, à 21 h (19 h GMT), le président sortant Emmanuel Macron et Marine Le Pen, la cheffe de file du Rassemblement national (RN). Un rendez-vous au goût de revanche car la candidate d’extrême droite avait été sèchement «corrigée» par le fondateur de La République en Marche (LREM), lors du dernier face-à-face il y a cinq ans.
«Pour moi, un échec c’est parfois un coup de pied aux fesses», a reconnu Le Pen, qui assure avoir tiré les leçons du débat de l’entre-deux-tours de 2017, où elle était arrivée mal préparée et fatiguée après avoir multiplié les déplacements. C’est pourquoi elle n’a programmé aucun déplacement hier et aujourd’hui, afin de préparer ce passage obligé de la présidentielle, instauré en 1974. Et à quatre jours du second tour, la candidate du RN, qui a axé sa campagne sur la question du pouvoir d’achat, se dit «extrêmement sereine».
Par conséquent, la tâche s’avère plus difficile pour le président sortant qui devra ne pas tomber dans les pièges que pourrait lui tendre son adversaire. Il aura aussi à défendre son bilan face aux attaques de sa rivale qui lui reproche «une forme de profond mépris à l’égard des Français».
Par rapport à 2017, où Emmanuel Macron l’avait largement emporté (66% à 34%), le contexte a changé : les sondages prévoient un résultat plus serré, même si le président sortant est donné vainqueur dans une fourchette de 53 à 55,5%.
Mobiliser les électeurs
Le duel de ce mercredi est d’autant plus attendu que le président sortant n’a participé à aucun débat avant le premier tour. Le RN l’a accusé de «fuir» la discussion, ce qu’Emmanuel Macron récuse, en rappelant qu’aucun de ses prédécesseurs en fonction ne s’était prêté à l’exercice. Discret avant le premier tour, il a lui-même changé de braquet après sa qualification le 10 avril, enchaînant les déplacements, bains de foule et interviews depuis une semaine.
Rappelons que Macron a obtenu 27,85% des voix au premier tour le 10 avril, contre 23,15% à sa rivale. S’il semble vouloir dédramatiser l’événement, Emmanuel Macron a pour autant bien préparé, mardi, ce débat qu’il dit prendre «très au sérieux». D’ailleurs plusieurs de ses soutiens ont tiré le signal d’alarme face à ceux qui seraient tentés de bouder les urnes dimanche en estimant que les jeux étaient déjà faits.
Même si les enquêtes d’opinion lui sont favorables, Macron n’est pas à l’abri d’un faux pas et d’une mobilisation des anti-macronistes autour de Marine Le Pen. Le président-candidat l’a répété lui-même lundi soir sur France 5: «Repensez à ce que les citoyens britanniques disaient quelques heures avant le Brexit ou aux États-Unis avant que le vote Trump n’arrive : je ne vais pas y aller, à quoi ça sert ? Je peux vous dire que le lendemain ils ont regretté», a-t-il souligné.
«Donc si vous voulez éviter l’impensable ou quelque chose qui vous rebute, choisissez pour vous-même.» Claude Chirac, la fille de l’ancien président Jacques Chirac, et son époux Frédéric Salat-Baroux, ex-secrétaire général de l’Élysée, ont appelé mardi à ce que «pas une voix ne manque à Emmanuel Macron» face à Marine Le Pen.
Deux visions pour la France
Pendant la campagne, les deux adversaires se sont jusque-là affrontés à distance, se rendant coup pour coup. Lundi, la candidate du RN s’en est une nouvelle fois prise au président-candidat qui «a fait le choix d’une forme de brutalité, d’outrance, qui n’était pas utile».
«Mais ça cache en fait la vacuité de son projet», a-t-elle dit. Le président sortant a répliqué que «pas beaucoup de choses ont changé» depuis «le triste anniversaire du 21 avril 2002» et la qualification de Jean-Marie Le Pen -père de Marine Le Pen et candidat d’extrême droite- pour le second tour.
«C’est une famille, un clan qui, depuis huit élections présidentielles, défend les mêmes idées». Dans cette dernière ligne droite, les deux candidats s’efforcent de séduire les partisans de Jean-Luc Mélenchon (gauche radicale), arrivé troisième au premier tour avec près de 22% des voix, et qui a appelé à ne pas accorder «une seule voix» à l’extrême droite.
Ce dernier devait s’exprimer, mardi en fin d’après-midi, après la consultation réalisée auprès de ses soutiens en vue du second tour, où le vote blanc ou nul est arrivé en tête avec 37,65% devant le vote Macron (33,4%) et l’abstention (29%), le soutien à Le Pen n’ayant pas été proposé.
Castex annonce sa démission
Mardi, le Premier ministre Jean Castex a annoncé qu’il démissionnerait, ainsi que son gouvernement, «dans les jours qui suivent» une éventuelle réélection d’Emmanuel Macron dimanche. Interrogé sur France Inter pour savoir s’il resterait Premier ministre jusqu’aux législatives des 12 et 19 juin, il a répondu que «tout dépend du sort des urnes dimanche», mais qu’il est «de ceux qui pensent qu’une impulsion nouvelle après la réélection du président doit être trouvée».
«Je suis de ceux qui espèrent fortement que le président Emmanuel Macron sera réélu dimanche», a-t-il souligné. «Après cette réélection, dans les jours qui suivent, comme le veut la tradition, je présenterai ma démission et celle du gouvernement au président de la République», a-t-il expliqué.
Il s’est dit pour l’heure «extrêmement mobilisé» à la veille du second tour de la présidentielle du 24 avril, pour lequel les sondages donnent le président sortant vainqueur face à la candidate d’extrême droite, mais avec une avance moindre que lors de la présidentielle de 2017.
«Rien n’est joué et il ne faudrait surtout pas tirer», des estimations avancées par les sondages, «l’idée que l’élection est pliée, que le match est plié. Il ne l’est pas» et «nous devons convaincre les Français que le programme d’Emmanuel Macron est le meilleur pour la France et pour eux», a insisté Jean Castex.
Sami Nemli avec Agence / Les Inspirations ÉCO