Salah Ouardi : « Le système éducatif a toujours besoin de réformes »
Avec la rentrée scolaire, l’école phygitale s’est imposée pour assurer la continuité pédagogique. Salah Ouardi, directeur général Afrique du Nord de HP, explique sa vision du changement du système éducatif national sous l’effet de la Covid-19.
Cette crise sanitaire peut-elle transformer durablement le système éducatif national ?
La dernière année scolaire a été compliquée pour tout le monde. Selon l’Unesco, neuf élèves sur dix de par le monde n’ont pas pu poursuivre leurs études au printemps dernier à cause de la Covid-19, ce qui a induit de profonds bouleversements au sein des familles, mais également de toute la société. La pandémie nous a obligés à revoir nos priorités, à évaluer nos comportements et nos responsabilités, et nous a offert une occasion unique de changer. Et cela a été encore plus le cas dans le secteur de l’éducation. Le fait est que l’éducation a toujours eu besoin de changement, voire de réformes. Selon la récente stratégie de l’Union européenne en matière de compétences, la demande d’experts en informatique augmente rapidement et ne peut être satisfaite. Dans le seul domaine de la cybersécurité, il existe un déficit de compétences de plus d’un quart de million de travailleurs. Et ce n’est que l’un des domaines que nous connaissons; le World Economic Forum (WEF) souligne que 65% des enfants qui intègrent aujourd’hui l’école primaire finiront par travailler dans des métiers qui n’existent pas encore. Je pense que cette crise est déjà en train de transformer le système éducatif national en un meilleur système, dans lequel les étudiants apprennent différemment et sont mieux préparés à l’avenir et à de nouvelles réalités professionnelles.
Se dirige-t-on vers une école phygitale ?
La pandémie de Covid-19 a déjà accéléré la transition numérique dans l’éducation, mettant en évidence des lacunes flagrantes et soulignant des opportunités évidentes. Alors que les éducateurs et les élèves entament cette nouvelle année scolaire, l’école phygitale – longtemps mise en avant pour son potentiel de développement des compétences de demain – deviendra une pratique courante dans de nombreux domaines. L’e-learning peut être un outil remarquablement efficace pour susciter l’intérêt des élèves. Les données du Research Institute of America ont montré qu’en moyenne, les élèves retiennent 25% à 60% de contenu en plus lorsqu’ils étudient en ligne, contre seulement 8% à 10% dans une salle de classe. Avec le brusque passage à l’apprentissage à domicile, la technologie et les outils numériques ne sont plus de simples éléments d’apprentissage ; ils sont devenus indispensables, permettant aux enseignants de communiquer avec leurs élèves, aux élèves de communiquer entre eux et avec les autres, de par le monde. HP s’est engagé à améliorer les compétences des enseignants et à perfectionner les programmes pédagogiques. Il s’agit d’un effort qui nous concerne plus particulièrement car nous pouvons développer et améliorer ce secteur avec la technologie, de sorte à parvenir à de meilleurs résultats d’apprentissage grâce à des initiatives telles que HP LIFE et BeOnline. HP LIFE est un programme de formation gratuit de la Fondation HP qui propose plus de 30 cours en ligne en sept langues pour les entrepreneurs, les propriétaires d’entreprises et les personnes qui étudient en continu dans le monde entier. Le programme BeOnline est une initiative en partenariat avec la Commission de l’Union africaine qui élargit les possibilités d’apprentissage numérique pour l’ensemble des jeunes, et ce dans 55 États membres de l’UA.
Quel est l’intérêt de lancer ces programmes d’éducation ?
La création de programmes pédagogiques pertinents et accessibles n’est que la moitié de la bataille : les étudiants doivent pouvoir y accéder depuis chez eux. Le lieu de résidence ne doit pas définir la façon dont on apprend. Pourtant, pour beaucoup, la géographie joue un rôle essentiel dans la définition de l’accès à l’éducation et à des possibilités de développement. Selon l’Unesco, la moitié des élèves – soit quelque 826 millions d’élèves – ne pouvaient pas aller en classe à cause de la pandémie de Covid-19, n’avaient pas accès à un ordinateur domestique, et 43% (706 millions) n’avaient pas Internet à la maison. La prochaine norme de l’éducation digitale gagnant du terrain, celle-ci doit contribuer à rétablir les bases d’un accès plus égalitaire. Alors que la pandémie oblige de nombreuses personnes à réévaluer l’éducation, nous avons une occasion unique et puissante de créer une nouvelle norme pour les enseignants et les élèves. Avec les bons outils et la bonne approche, nous pourrons mieux préparer les étudiants aux emplois de demain, en utilisant des méthodes qui se sont avérées plus efficaces pour retenir les étudiants, sur des plateformes plus accessibles que jamais. Malgré tous les défis auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés, cela représente un avenir plein de promesses.
Certains voient la fin de l’école physique en raison de l’intelligence artificielle et des outils numériques. Qu’en pensez-vous ?
L’intelligence artificielle s’améliore et s’installe dans tous les secteurs. Grâce à (ou à cause de) cette pandémie, l’intelligence artificielle fait grandement partie de notre quotidien. Le monde d’aujourd’hui est en perpétuelle évolution et l’éducation a besoin de s’adapter à cette nouvelle normalité. Cela dit, un important travail est nécessaire pour garantir la concrétisation du potentiel d’une éducation plus équitable et accessible, qui à mon sens devrait être maintenue.
Sanae Raqui / Les Inspirations Éco