Maroc : comment l’Etat peut aider l’économie des régions les plus pauvres ?
L’État et les régions les plus pauvres n’ont pas encore trouvé les modalités adéquates d’instauration de la solidarité régionale prévue par la loi. La répartition régionale de l’investissement public sera scrutée dans le dispositif prévu par la loi de Finances 2021.
Après que le dernier rapport du HCP a tiré la sonnette d’alarme à propos de l’ampleur des disparités régionales, l’État et les 12 régions devront initier un programme réaliste pour atténuer les inégalités interrégionales. Il faut dire que la propagation de la Covid-19 a des conséquences inédites, dans la mesure où elle impacte simultanément plusieurs secteurs de l’économie régionale, outre ses répercussions sur les différents agents économiques locaux, notamment dans les régions dépendant des secteurs heurtés de plein fouet par l’arrêt des activités. La préoccupation de la stabilité des finances régionales demeure donc très présente sachant que 15 MDH seront affectés aux 4 catégories de collectivités territoriales, contre 19,5 MDH initialement prévus pour l’année 2020, soit un repli de 23%. L’Exécutif a également procédé au redéploiement des crédits, qu’il s’agisse de ceux destinés aux paiements ou de crédits d’engagement, affectés à certains projets, compte tenu des niveaux d’exécution et des capacités de paiement, sans pour autant impacter leur exécution normale, précise la feuille de route du gouvernement. Concernant le volet institutionnel, la mise en place des comités régionaux de coordination et l’organisation des secrétariats généraux des affaires régionales sont également à l’ordre du jour.
Le dispositif de rééquilibrage
Pour accélérer la cadence de liquidation des dossiers litigieux, plusieurs mécanismes seront mis en œuvre, essentiellement «la mise à la disposition des collectivités territoriales de moyens légaux et financiers pour les aider à améliorer leur niveau d’intervention». La principale difficulté relevée réside dans l’absence de registre fiscal établissant la dette des collectivités territoriales, privant de ce fait les régions de ressources indispensables pour l’équilibre de leurs comptes annuels. Parmi les mesures projetées, certaines devront atténuer les dysfonctionnements dont pâtit le recouvrement des impôts, «en se concentrant sur les dettes importantes, concernées par les procédures de recouvrement obligatoire». L’homogénéisation entre la fiscalité de l’État et celle des collectivités territoriales devra aussi se poursuivre en 2021, avec la mise en place de mesures d’accompagnement dans les services fiscaux relevant des collectivités territoriales, ainsi que du projet de création d’une agence spécialisée dans le recouvrement. Celle-ci permettra aux présidents des collectivités territoriales d’exécuter les programmes de développement et de mettre un terme à la faiblesse des outils de gestion du processus de recouvrement. À noter que l’activation des programmes de requalification des villes et des centres urbains figure aussi en tête des préoccupations, avec l’adoption d’avenants aux conventions de partenariat conclues en tenant compte de la capacité des régions à financer les parts leur incombant.
Une chute des recettes historique
Le budget des régions et des communes devrait connaître sa plus forte baisse depuis la consécration de l’autonomie financière des collectivités territoriales, ce qui pousse les collectivités décentralisées à combler leur déficit budgétaire et à revoir la liste des projets jugés stratégiques. En tête de liste des actions qui seront mises en œuvre pour aider les communes à dépasser cette situation, on retrouve l’activation de nouvelles modalités d’intervention du Fonds d’équipement communal. La nouvelle politique du fonds devra s’accompagner de l’élaboration d’outils d’évaluation «qui doivent être adaptés aux activités du FEC et au marché local», indique la feuille de route de la banque des communes et des régions. La contractualisation avec les conseils régionaux reste l’une des priorités en ce deuxième semestre 2020, avec en ligne de mire la mise en cohérence des plans régionaux de développement (PDR) et les stratégies sectorielles jusqu’à fin 2021. En cette période de baisse des ressources, il est nécessaire de mettre en place des règles encore plus précises pour permettre aux conseils régionaux de se doter des moyens budgétaires qui leur sont conférés par la loi organique des régions. Ces règles doivent leur permettre, par ailleurs, de se préparer à l’entrée en vigueur de la Charte de la déconcentration, qui devrait impacter positivement l’autonomie régionale. Il s’agit également d’assurer un pilotage stratégique tenant compte de la révision des critères de répartition du Budget de l’État et, surtout, de la convergence des politiques publiques et des plans régionaux de développement.
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco