Tilda Swinton : Lion d’or à un caméléon d’argent
Pour sa 77e édition, le Festival international du film de Venise a rendu hommage à une actrice aussi singulière que charismatique, la comédienne britannique Tilda Swinton. En lui remettant un Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière, le festival met en lumière des choix artistiques authentiques et une incroyable liberté dans le travail. Retour sur la carrière d’un ovni du grand écran qui a dispensé une masterclass passionnée et habitée.
Après avoir été la présidente du Jury de la dernière édition du Festival international du film de Marrakech (FIFM) et reçu un Lion d’Or des mains de Cate Blanchett, présidente du jury de la Mostra, Tilda Swinton a ouvert son coeur lors d’une masterclass ce jeudi matin. D’entrée de jeu, l’actrice parle de son amour inconditionnel du cinéma, passion qu’elle s’est trouvée très jeune. Pour elle, la place des festivals est capitale, et les films sont le moteur de la vie. Elle arborait un t-shirt de «Caravaggio», premier film où Tilda Swinton travaille avec Derek Jarman en 1986.
Les festivals, boosters de sa carrière
Alors que la pandémie a paralysé le secteur du cinéma et que les festivals sont annulés les uns après les autres, Tilda Swinton s’est dite honorée et heureuse de participer à la Mostra, qui a résisté malgré les risques de contamination. «Les festivals ont fait de moi qui je suis ! Je venais de ma Grande-Bretagne natale, je ne connaissais rien au monde, Les festivals m’ont ouvert les yeux», a confié l’actrice qui souligne l’importance de pareille fête du cinéma. Selon elle, il n’est pas seulement question de projectins de films projetés ou de divertissement, mais d’une ouverture sur les cultures et les problèmes du monde. «C’est ici que j’ai rencontré des réalisateurs étrangers avec lesquels j’ai joué, j’ai appris.» Un festival auquel elle doit beaucoup puisque Venise l’a récompensée en début de carrière pour son rôle dans «Edward» II, qui lui a permis de remporter la Coupe Volpi de la meilleure actrice en 1991. Celle qui n’a pas d’âge mais qui fête tout de même ses 59 ans cette année a une carrière incroyablement riche derrière elle. Après des études politiques, elle intègre la prestigieuse Shakespeare Academy en 1984, où elle se spécialise dans le théâtre.
Carrière plurielle
Le choix est très important pour elle, dès ses débuts. Et ce n’est pas donné à tout le monde, elle-même a conscience du fait qu’un acteur doit travailler très tôt. Mais l’actrice affirme avoir toujours gardé cette préoccupation en tête : «Ne pas tout accepter, même s’il fallait trouver des boulots à côté pour boucler les fins de mois.» L’actrice, entière, ne peut défendre un rôle si elle ne l’assume pas. Dès le départ, elle jongle entre des projets au théâtre, des films d’auteur ou encore des grosses productions comme Le Monde de Narnia qui lui confère une renommée mondiale. Elle y incarne la Sorcière blanche, rôle qu’elle continue à camper avec grâce dans «Le Monde de Narnia : Le Prince Caspian» et «L’Odyssée du Passeur d’Aurore». Elle remporte l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle pour son interprétation de l’avocate Karen Crowder, opposée à George Clooney dans «Tony Gilroy», et n’hésite pas à se transformer physiquement, adoptant des looks extravagants ou androgynes dans «Julia» (2008), «We Need to Talk about Kevin» (2011), «Snowpiercer» (2013), The «Zero Theorem» (2013) ou encore «The Grand Budapest Hotel» (2014). L’actrice évoque aussi son amour pour l’Italie et sa grande amitié avec le réalisateur Luca Guadagnino, avec qui elle a joué dans plusieurs films dont «Amore», «The Bigger Splash» ou encore «Suspira». Des projets qu’elle choisit avec le coeur puisqu’elle doit entretenir une «relation saine et belle» avec son réalisateur. L’actrice intemporelle continue sa carrière aussi impressionnante qu’inspirante et enchaîne les projets. Le confinement lui a appris ô combien il était important de s’ouvrir à l’autre et, selon elle, «seul le cinéma en est capable».
Jihane Bougrine , DNES à Venise / Les Inspirations Éco