Coupe du monde 2030. Pourquoi l’Espagne a lâché le Maroc
Les mises en garde de l’UEFA à l’encontre du gouvernement espagnol ont fini par saborder le projet annoncé unilatéralement par Madrid de briguer une organisation tripartite de la Coupe du monde 2030 avec le Portugal et le Maroc.
La nouvelle a pris tout le monde au dépourvu ce samedi 8 juin. Dans un communiqué,la Fédération royale espagnole de football (FREF) et son homologue portugais (FPF) annoncent, presque timidement, leur projet d’étudier une candidature conjointe à l’organisation de la Coupe du monde de football 2030. «Après diverses réunions ces dernières semaines, les fédérations de football d’Espagne et du Portugal confirment débuter un profond processus d’analyses de la possibilité de présenter une candidature conjointe pour l’organisation de la Coupe du monde 2030». Le communiqué ajoute que «les deux gouvernements sont informés de manière équivalente sur ce processus dont ils seront les parties prenantes». La deuxième partie dudit communiqué renseigne un peu plus sur les raisons de cette annonce surprise.
Flash-back !
En 2018, le président de la FIFA, en visite à Madrid, encourage l’Espagne à se porter candidate. Durant une entrevue avec le chef de gouvernement espagnol, en présence du président de la fédération espagnole, Gianno Infantino a proposé, avec la bénédiction de la FREF, que l’Espagne accueille la grand-messe footballistique. À défaut, le pays ibérique pourrait abriter la Coupe d’Europe 2028, avait insinué Infantino durant cette rencontre. C’était le 13 septembre 2018 et, avant ce jour-là, l’idée n’avait pas encore fait son chemin, pas publiquement du reste. Deux mois plus tard, le chef de gouvernement espagnol Pedro Sanchez prend tout le monde de court, y compris sa propre fédération et le pays tiers invité, à savoir le Portugal, en proposant au Maroc une organisation tripartite.
De fait, Pedro Sanchez voulait venir avec un cadeau sous le bras. Connaissant la volonté du royaume d’abriter cette compétition, Sanchez croit offrir le plus beau des présents à ses hôtes marocains: une candidature tripartite, à cheval entre deux continents. Le gouvernement espagnol y voyait un gage de l’amitié espagnole à l’adresse du Maroc et une nouvelle preuve de la volonté des dirigeants espagnols de cimenter les liens bilatéraux. Toutefois, l’enthousiasme de Sanchez a été mal reçu en Espagne. Luis Rubiales, président de la fédération espagnole, aurait mal digéré cette ingérence. De son côté, le chef de gouvernement portugais, Antonio Costa, s’est empressé de nier tout consultation avec son pays à propos de cette affaire. Un démenti qui sera édulcoré quelques jours plus tard quand Sanchez le recevra au Palais de la Moncloa où Costa affichera, solennellement, son enthousiasme quant à cette «très bonne idée». Mais cela n’a pas calmé l’ire d’Aleksander Ceferin, président slovène de l’Union des associations européennes de football (UEFA). Ce dernier a pesté contre l’ingérence politique dans le champ sportif. «Les politiques devraient savoir une fois pour toutes que l’organisation de la Coupe d’Europe ou de la Coupe du monde ne dépend pas d’eux», a-t-il tonné. Le carton rouge brandi au gouvernement espagnol ne passe pas inaperçu.
Toutefois, l’idée d’une candidature à trois est remise sur le tapis durant le voyage du couple royal d’Espagne au Maroc en février dernier. Selon le portail de la radio et télévision publique espagnole RTVE, le dossier de la candidature suivait son petit bonhomme de chemin, selon les indiscrétions de la délégation qui accompagnait le roi et la reine d’Espagne durant leur séjour sous nos latitudes. Silence radio jusqu’à ce samedi dernier. Contactée par la RTVE, la fédération espagnole a indiqué que les discussions se concentrent aujourd’hui sur l’Espagne et le Portugal. De son côté, la secrétaire d’État espagnole au Sport a souligné, dans une déclaration à la RTVE, que c’est aux fédérations de se mettre d’accord. «Ce n’est pas aux gouvernements mais aux fédérations de construire ce projet (…) l’Espagne a montré qu’elle était en mesure d’organiser de grands événements sportifs ». Il semblerait donc que le carton rouge brandi par l’UEFA à l’adresse du gouvernement espagnol ait fait son effet.