Maroc

Violence : un fléau qui se conjugue aussi au masculin

C’est un sujet qui revient rarement dans les débats sur le genre : la violence faite aux hommes. Selon une récente enquête du HCP, si l’on considère la violence durant toute la vie, 70% d’hommes ont subi au moins un acte de maltraitance.

Les violences faites aux femmes sont régulièrement au cœur des débats sur le genre, à tel point qu’il est difficile de croire que les hommes sont également violentés. C’est ce qu’a essayé de démontrer une enquête réalisée par le Haut-commissariat au plan (HCP) auprès d’un échantillon de 3.000 Marocains âgés de 15 à 74 ans. Pour une meilleure compréhension de cette étude, l’analyse des résultats de la violence subie par les hommes est scindée en deux volets. Le premier volet, objet de cette publication, retrace les aspects liés aux violences subies par les hommes, notamment leurs prévalences dans les différents contextes de vie et sous ses différentes formes ainsi que leurs déterminants, souligne le HCP, indiquant que le deuxième volet, qui sera présenté ultérieurement, s’intéresse aux perceptions masculines vis-à-vis du phénomène de la violence qui permettraient de comprendre quelques enjeux de pouvoir et de domination liés aux rapports de genre dans la société. Dans le détail, et concernant les résultats disponibles, plus de quatre hommes sur dix ont subi au moins un acte de violence durant les 12 mois précédant l’enquête, estiment les rédacteurs du présent rapport.

Prédominance des violences psychologiques
Toujours selon le HCP, si l’on considère la violence durant toute la vie, 70% d’hommes ont subi au moins un acte de violence, 75% parmi les citadins et 61% parmi les ruraux. Durant les 12 mois précédant l’enquête, poursuit la même source, 42% des hommes ont subi au moins un acte de violence, 46% en milieu urbain et 35% en milieu rural. «Cette violence est plus répandue parmi les jeunes âgés de 15 à 34 ans (47% contre 29% parmi ceux âgés de 60 à 74 ans), parmi les célibataires (46% contre 40% parmi les mariés) et parmi ceux ayant un niveau scolaire supérieur (46% contre 33% pour ceux sans niveau scolaire)», soulignent les enquêteurs. Et concernant les formes de violence, il faut savoir que 37% des hommes ont subi la violence psychologique au cours des 12 mois précédant l’enquête, 11% la violence physique, 2% la violence sexuelle et 1% la violence économique. «Ainsi, 73% de l’ensemble des violences subies par les hommes sont dues aux violences psychologiques, 20% aux violences physiques, 4% aux violences sexuelles et 3% aux violences économiques», dira-t-on. Autre détail important : près du tiers des hommes a vécu la violence conjugale. Et dans ce lot, ce sont les célibataires, les plus jeunes et les plus instruits qui sont les plus touchés. En effet, la prévalence de la violence conjugale, établie à 31% durant les 12 mois précédant l’enquête, varie selon les caractéristiques démographiques et socio-économiques des hommes victimes de violence. «Elle est plus élevée parmi les citadins avec 33% (27% en milieu rural), les plus jeunes âgés de 15 à 24 ans avec 61% (24% parmi ceux ayant 60 à 74 ans) et ceux ayant un niveau scolaire supérieur avec 41% (24% parmi ceux n’ayant aucun niveau scolaire)», explique le HCP.

Les ados, la catégorie la plus touchée
S’agissant des adolescents, ils demeurent la catégorie la plus touchée par la violence familiale perpétrée principalement par les pères et les frères. Si on s’appuie sur les résultats de ladite enquête, le contexte familial où 12% des hommes ont déclaré être victimes d’au moins un acte de violence perpétré par un membre de leur famille, excepté la conjointe, ou de leur belle-famille, 9% des hommes ont dû subir une violence psychologique, dont 6% sous forme de comportements dominateurs et 6% sous forme de violence psychologique émotionnelle. Pour ce qui est des autres formes, 3% ont subi la violence physique et moins de 1% la violence sexuelle ou économique. Le HCP indique qu’à l’instar du contexte conjugal, les citadins (13%) sont plus exposés à la violence familiale que les ruraux (10%). À ce propos, les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont aussi les plus touchés par la violence familiale (21%), comparés aux autres tranches d’âge ; 8% parmi ceux de 35 à 59 ans et 7% parmi ceux de 60 à 74 ans. En outre, les hommes, ayant un niveau scolaire secondaire qualifiant ou collégial, sont plus victimes de violence familiale avec des taux respectifs de 17% et 14%, comparés à leurs homologues sans niveau scolaire (8%). En dehors des espaces publics, le HCP a également constaté l’émergence d’une nouvelle forme de violence qui touche les hommes. Il s’agit de la violence électronique (ou cyberviolence) qui touche plus de 10% des hommes, soit 13% en milieu urbain, contre moins de 5% en milieu rural. L’organisme chargé de la production, de l’analyse et de la publication des statistiques officielles au Maroc explique que cette forme de violence est plus prépondérante parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (18%) et de 25 à 34 ans (14%), les célibataires (17%), les élèves et étudiants (23%). Selon le niveau scolaire, les hommes ayant un niveau supérieur (21%), secondaire qualifiant (13%), ou secondaire collégial (10%) enregistrent des taux nettement plus élevés, comparés aux hommes n’ayant aucun niveau scolaire (3%). Selon le type d’activité, les chômeurs (17%) et les inactifs (14%) sont plus vulnérables que les hommes actifs occupés (9%).

Ne pas minimiser la souffrance des femmes
En définitive, l’analyse de la violence subie par les hommes montre qu’en somme, la violence psychologique est la forme qui domine dans tous les contextes de vie, puisqu’elle représente, à elle seule, 73% de l’ensemble des violences subies par les hommes. La violence physique, qui vient en deuxième position avec une part de 20%, est perpétrée dans plus de 44% des cas dans les espaces publics. Même si l’espace conjugal affiche le taux de prévalence de la violence le plus élevé, la violence, majoritairement psychologique, touche plus les célibataires (ayant/ayant eu une fiancée ou une partenaire intime au cours des 12 mois précédant l’enquête) que les mariés. Enfin, insiste le HCP, le but n’est certainement pas de minimiser les violences endurées par les femmes, mais plutôt d’apporter plus d’éclairage au phénomène social de la violence dans son aspect bidimensionnel, et d’élargir son appréhension du côté des victimes et des auteurs dans leur double source féminine et masculine.

Violence professionnelle

Dans le milieu professionnel, 16% des hommes ayant exercé une activité économique durant les 12 mois précédant l’enquête sont victimes d’au moins un acte de violence, 19% parmi les citadins et 11% parmi les ruraux. La quasi-totalité des actes de violence dans le lieu de travail sont des comportements psychologiques violents subis par 15% des hommes actifs. La violence dans ce contexte prédomine parmi les salariés (18%), les commerçants (21%), les artisans et ouvriers qualifiés (20%), les cadres moyens et employés de bureau (19%) et les travailleurs de petits métiers (18%).

Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco


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