Maroc

SIAM/Changement climatique. Jamal M’Hamdi : Comment le Maroc préserve-t-il sa souveraineté céréalière ?

Jamal M’Hamd
Président de la Fédération interprofessionnelle des activités céréalières et légumineuses (FIAC)

Face aux défis du changement climatique, la filière céréalière marocaine se réinvente. Gestion durable de l’eau, nouvelles semences, pratiques agricoles innovantes, la Stratégie Génération green déploie ses leviers. La FIAC joue un rôle clé dans l’accompagnement, la sensibilisation et l’adoption des nouvelles technologies, pour une production plus résiliente.

Quels sont les principaux défis que pose le changement climatique en termes de résilience et de durabilité pour les systèmes de production céréalière au Maroc ?
Le changement climatique, pour ne pas dire « la dérive climatique», que nous subissons ces dernières années, impacte négativement nos ressources et disponibilités en eau, tout en fragilisant et déstabilisant nos rendements, nos sols, nos systèmes de cultures et, de facto, notre production céréalière. De plus, les températures élevées constatées ces dernières années ont entraîné une augmentation de l’évapotranspiration des cultures, ce qui nous oblige à une gestion plus alerte et raisonnée de l’eau, de manière à contenir le stress hydrique, tout en évitant la propagation de maladies et de ravageurs nuisibles à la production céréalière dans sa globalité.

D’autre part, le changement climatique que nous subissons accentue la dégradation des sols, notamment par l’érosion et la salinisation, avec pour conséquence une réduction de la fertilité des sols conduisant à une baisse des rendements à la fois quantitatifs et qualitatifs de notre production. Notre défi est d’apporter des solutions opérationnelles et pérennes permettant de renforcer la sécurité hydrique en vue d’atteindre nos objectifs de productions et de rendements.

Comment la Stratégie Génération green vise-t-elle à pérenniser la production céréalière au Maroc ?
La Stratégie Génération green vise à accroître la résilience et la durabilité de la production céréalière au Maroc grâce à plusieurs leviers. Tout d’abord, une meilleure gestion de l’eau, cruciale pour les céréales, par la mobilisation d’un stock hydrique stratégique et l’installation de pivots d’irrigation d’appoint.

Ensuite, l’utilisation de semences résistantes à la sécheresse et aux maladies tout en étant adaptées aux différents écosystèmes pour faire face aux changements climatiques. La stratégie préconise également la rotation des cultures céréales/légumineuses pour préserver la fertilité des sols, ainsi que le semis direct pour leur conservation.

En outre, elle vise à sensibiliser les agriculteurs aux bonnes pratiques culturales. Enfin, elle prévoit une assurance contre la sécheresse et un accompagnement pour l’adaptation du secteur céréalier au changement climatique.

Comment faut-il sensibiliser les agriculteurs pour qu’ils adoptent des pratiques culturales plus résilientes face au changement climatique ?
Afin de renforcer la résilience de la production céréalière face à la hausse des températures et au stress hydrique, plusieurs pratiques sont à encourager. Tout d’abord, favoriser l’utilisation de semences certifiées résistantes à la chaleur et à la sécheresse, en partenariat avec les organismes compétents. Ensuite, promouvoir des techniques culturales comme le semis direct, la plantation en courbes de niveau ou encore le développement d’une irrigation d’appoint ciblée.

De nouvelles pratiques agricoles valorisant la conservation des sols, la gestion de l’humidité et la réduction de l’érosion sont également préconisées pour améliorer la rétention d’eau et l’apport en nutriments. Enfin, sensibiliser les agriculteurs aux enjeux du changement climatique et aux pratiques durables et économes en eau s’avère primordial.

Quelles sont les principales pistes envisagées par la FIAC pour une gestion plus durable des ressources en eau face aux pressions du changement climatique ?
Compte tenu de la pression croissante sur les ressources en eau limitées, due notamment au changement climatique, leur gestion durable s’avère cruciale. Au-delà des techniques d’irrigation économes en eau, plusieurs autres leviers, pris en considération par la FIAC, sont à actionner. Tout d’abord, investir dans la modernisation et l’entretien des infrastructures hydrauliques (canaux, systèmes de distribution) afin de réduire les pertes d’eau et améliorer l’efficience globale. Ensuite, encourager l’adoption de pratiques agricoles plus économes en eau comme la gestion de l’irrigation sur la base des besoins des cultures, la rotation des cultures ou l’utilisation de variétés résistantes à la sécheresse.

Enfin, investir dans la R&D pour développer de nouvelles technologies innovantes telles que l’agriculture de précision, le captage des eaux pluviales ou les systèmes d’irrigation intelligents, permettant une utilisation plus rationnelle de cette ressource vitale.

Dans quelle mesure les nouvelles technologies peuvent-elles contribuer à des systèmes céréaliers plus durables et résilients face au climat ?
Les nouvelles technologies numériques offrent de multiples leviers pour une production céréalière plus durable et résiliente. Tout d’abord, les technologies de surveillance et de gestion de l’eau, comme les capteurs d’humidité des sols, l’irrigation intelligente et les prévisions météorologiques, permettent une utilisation plus efficiente de cette ressource rare en ajustant finement les apports aux besoins réels. Ensuite, l’agriculture de précision exploite les données massives (capteurs, drones, satellites) pour cartographier finement les spécificités des sols, cultures et conditions climatiques afin d’appliquer les intrants de manière ultra-ciblée et réduire le gaspillage.

Par ailleurs, les biotechnologies et la génomique peuvent aider à développer des variétés de céréales plus résistantes au stress hydrique, à la chaleur et aux maladies, adaptées aux conditions locales. La télédétection et l’imagerie satellite surveillent également les épidémies et ravageurs pour une intervention rapide. Enfin, le numérique est un support idéal pour former et informer les agriculteurs sur les bonnes pratiques culturales durables et les stratégies d’adaptation au changement climatique. Combinées à des politiques de soutien adéquates, ces innovations technologiques sont de puissants leviers pour la résilience du secteur céréalier.

Comment la FIAC accompagne-t-elle la transition numérique et l’adoption des nouvelles technologies au sein de la filière céréalière ?
Pour sensibiliser sur l’apport des nouvelles technologies, la FIAC déploie plusieurs actions auprès des agriculteurs, opérateurs et investisseurs. Elle ambitionne de mettre en place une marketplace digitale permettant aux adhérents d’accéder à des financements et services technologiques innovants, en contrepartie du respect des bonnes pratiques. Un système d’information dédié gère les activités de la FIAC et diffuse des contenus d’information.

L’Académie FIAC crée également un espace d’échange d’expertises, de réflexions stratégiques et de formations pour accompagner les acteurs de la filière, notamment les jeunes entrepreneurs et porteurs de projets innovants. La FIAC promeut, par ailleurs, la digitalisation à tous les maillons de la chaîne de valeur céréalière. Elle sensibilise aussi sur les bonnes pratiques de valorisation, stockage, commercialisation et favorise l’accès aux e-services agricoles. Autant d’initiatives qui visent à faire du numérique un levier pour développer la compétitivité et la durabilité du secteur.

Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO


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