Maroc

Santé au Maroc: une échographie du secteur s’avère cruciale

De plus en plus d’experts de haut niveau insistent sur la nécessité d’une échographie du secteur de la santé pour permettre à celui-ci de faire face à ses nombreux défis.

La pandémie qui sévit à l’échelle nationale et internationale a montré une fois de plus l’urgence pour les États d’œuvrer à la consolidation de leurs systèmes de santé afin d’en accroître la résilience. C’est dans ce contexte que la Chambre de commerce britannique pour le Maroc a organisé, jeudi dernier, un webinaire sur le thème «Les défis du financement de la santé au Maroc face à la pandémie». Quels ont été les défis majeurs ? Quelles sont les mesures prises d’urgence depuis le début de la crise ? Comment rationaliser les dépenses du secteur afin de donner une meilleure couverture sociale au citoyen ? Tour à tour, pendant plus de deux heures, un panel d’experts de haut niveau a tenté de répondre à ces questions d’actualité, en commençant par un état des lieux. À ce propos, on ne peut plus succinct que l’éminent épidémiologiste Jaâfar Heikel pour qui si les dépenses de santé ont évolué de façon plus importante que la croissance économique, plus de dix fois pour certaines prestations, celles-ci sont supérieures dans le secteur public comparativement au privé. Ce qui n’est pas explicable, selon lui, aussi bien au niveau du coût du personnel, des médicaments, des frais de soins ambulatoires et hospitaliers où les charges d’exploitation sont inférieures. Pendant ce temps, le reste à la charge des patients – estimé à plus de 50,7% dans le secteur privé – demeure élevé, constate le docteur en économie soulignant une iniquité régionale des dépenses de santé au Maroc. D’autres constats confirment les rapports de la Cour des comptes, par exemple, sur la couverture médicale universelle, laquelle couverture bien que passant de 16% à 70% entre 2002 et 2020, reste insuffisante. Les secteurs sociaux d’une manière générale, et le secteur de la santé en particulier, nécessitent davantage de cohérence, notamment dans la vision stratégique en termes de gouvernance des politiques publiques, selon les experts. Pourtant, la volonté politique de corriger ces lacunes ne manque pas, semble-t-il.

Les défis à relever
Dans son discours de la Fête du Trône 2020, le roi Mohammed VI a fait savoir que le moment était venu de lancer, au cours des cinq prochaines années, le processus de généralisation de la couverture sociale au profit de tous les Marocains. Le souverain a, dans ce sens, préconisé le déploiement progressif de cette opération à partir du mois de janvier 2021, selon un programme d’action précis. Son ambition est claire : ce projet, qui requiert une réforme rigoureuse des systèmes et programmes sociaux déjà en place, notamment à travers l’opérationnalisation du Registre social unifié (RSU), doit être profitable directement et pleinement aux bénéficiaires. Cela renseigne sur l’extrême souffrance d’une certaine partie de la population marocaine qui peine à accéder à des soins adéquats.

Les grands chantiers de 2021
Une souffrance qui devrait commencer à s’alléger à partir de l’année prochaine si l’on croit Anas Rihani, chef de la division de suivi et de mise en œuvre du RAMED. Dès le 1er janvier, le Maroc enclenchera ce vaste chantier qui doit permettre un accès équitable à la santé pour tous, soutient-il, expliquant que «ce chantier va transformer le parcours santé du patient marocain». Mais d’autres défis demeurent, à savoir la faible capacité litière du royaume. À ce propos , «plus de 5.500 lits hospitaliers verront le jour en 2021», contre une moyenne de 4.000 annuellement, ajoute le haut responsable. À cela s’ajoutent les recrutements et la montée en compétences des ressources humaines. La «rationalisation» et «l’innovation financière» seront au rendez-vous face à un endettement public important, dit-t-on. L’objectif d’atteindre, à terme, un budget de la santé à hauteur de 8% du PIB, contre 6%, actuellement, étant toujours maintenue. Toujours sur ce chapitre, Pr Jaafar Heikel a émis plusieurs propositions. Parmi celles-ci, la mise à disposition, par l’État, de locaux ou établissements inoccupés au profit du secteur privé, contre une prise en charge d’un nombre défini de patients issus du RAMED. L’idée d’une caisse unique de santé et de couverture santé a également été partagée. Une idée saluée par Abdelmounim Bellalia, professeur de stratégie, ancien directeur de l’École nationale de santé publique. Pour ce dernier, «toutes les idées doivent être mises sur la table, y compris celles à l’international». Plusieurs mesures ont été prises ces derniers mois pour répondre à la «crise économique du financement de la santé». Taxes sur les transactions financières, augmentation de la TVA de 1%, augmentation des taxes sur les produits nocifs à la santé (sucre, tabac, boissons sucrées…), le Maroc pourra «étudier ses pistes» à l’avenir. Enfin, Noureddine Afouaiz, directeur général de GSK et vice-président du LEMM (Les entreprises du médicaments du Maroc) s’est inscrit dans le vent des idées en faveur de l’innovation financière pour le secteur de la santé. «Il est nécessaire de repenser à des mesures intégrées d’investissement pour renforcer la résilience des systèmes de santé», a-t-il déclaré ajoutant que «la cohérence des investissements entre les différentes composantes du système de santé doit être assurée pour garantir les conditions permettant d’atteindre l’objectif d’un système accessible à tous».

Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco


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