Maroc

Rififi entre administration des Habous et locataires

L’Association des locataires des Habous vient de tenir un meeting pour informer ses membres et le public sur la suite des mises en demeure reçues de la part du ministère des Habous. Les locataires font valoir le principe de la non-rétroactivité du droit et les articles 166 et 168 de la nouvelle Moudawana de 2010.

Depuis quelques mois, à Marrakech et dans d’autres villes du royaume, comme Taroudant et Meknès, les locataires des Habous tentent de serrer les rangs. Pas plus tard que samedi 10 décembre 2016, l’Association des Locataires du Habous de Marrakech a tenu une réunion pour communiquer à ses membres sa volonté de continuer sur la même voie. À entendre par «même voie», militer pour ce qu’elle qualifie «d’acquis légitimes résultant du respect des contrats liant ses membres aux Habous depuis plusieurs années», explique  l’avocat Abdessamad Tâarji, qui occupe le statut de membre et conseiller juridique de l’association, locataire depuis 2004 d’un local Habous. L’association, représentant les 10.000 locataires que compte la ville ocre, a vu le jour le 22 avril 2016 suite à l’envoi multiple de mises en demeure sommant les locataires de libérer leurs locaux pour motif d’expiration des contrats de bail qui lient le ministère aux occupants. À valeur d’aujourd’hui, une partie des locataires a reçu ces avertissements, un fait que d’aucuns expliquent par la volonté du ministère d’éviter un envoi multiple qui risquerait de susciter l’ire de tous les concernés. Les  autres restent dans l’expectative, mais ne devraient  en principe pas tarder à recevoir, à leur tour, le carton jaune.

Que dit la loi ?
MeTâarji est catégorique. Les contrats de bail, précisément ceux actés avant l’entrée en vigueur de la nouvelle Moudawana des Habous en 2010, ont une durée limitée et sont reconduits, selon une loi datant du 26 juin 1913, de manière tacite et avec les mêmes conditions. «Hormis la durée, élément qui échappe à cette reconduction tacite, si l’une des deux parties n’exprime pas la volonté de résilier, avant son terme, le contrat, ce dernier est prolongé», souligne le juriste. Appuyée par le principe constitutionnel et universel de la non-rétroactivité de la loi, la position de l’association est corroborée selon l’avocat par la nouvelle Moudawana, constituée par le dahir 1.09.236 du 23 février 2010.  Dans son article 168, la Moudawana stipule que les contrats signés avant 2010 sont applicables et, donc, validés. L’article 166 est aussi brandi par l’association pour préciser les cas où il peut être question de  résiliation des contrats. «Primo, il s’agit du non paiement du loyer pour une durée de trois mois consécutifs, ce qui entraîne une mise en demeure conditionnée par un délai de paiement de huit jours. Secundo, les autorités des Habous ont le droit, après le terme du contrat, de récupérer le local objet de bail, au cas où elles souhaitent l’exploiter en tant que bureau administratif», poursuit Me Tâarji. À l’exception de ces deux cas, souligne la même source, le contrat de bail est maintenu, dans la légalité.

Son de cloche officiel
Une source bien informée nous explique, sous couvert d’anonymat, que s’il n’y a pas de divergence sur le principe de non-rétroactivité du droit, la possibilité de réviser la loi est, par contre, toujours possible. De plus, il s’agit, selon cette même source, d’une affaire juridique que les tribunaux sont les seuls habilités à trancher, surtout que la loi est claire. En ce qui concerne le regroupement des locataires en association, cette source tient à préciser que les contrats sont individuels et la gestion du Waqf doit être comprise comme une démarche pragmatique et rigoureuse. Cela ne va pas, souligne-t-elle, à l’encontre du caractère social de l’institution des Habous.

Nouvelle loi, nouvelles dispositions
L’article 94 de la nouvelle Moudawana fixe la durée des contrats de bail à trois ans, renouvelable après autorisation des Habous et moyennant une augmentation du loyer à partir de 10%. C’est cet article qui pousse les locataires à rappeler le caractère social et de développement des Habous. «Il est normal que la réputation sociale et de développement des Habous en pâtit. De plus, cela ouvre la voie à la corruption et nous fragilise davantage, car nous sommes désormais objets à l’humeur des employés de l’administration», estime Abdessamad Tâarji. En tout cas, il est fort probable qu’une fédération regroupant plusieurs associations voit le jour. «Il y a eu d’autres contestations à Taroudant, Safi ou encore Meknès, cette dernière étant réputée pour le grand nombre de biens Waqf», rappelle Me Tâarji. Pour l’instant, la position de la délégation des Habous à Marrakech est intransigeante. En face, les locataires campent sur leur position. De quoi présager un long feuilleton…


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