Retraite : 29 ans de service, 2.168 DH de pension !

Avec une pension de retraite moyenne de 2.168 dirhams, soit moitié moins que le revenu médian (5.609 DH) au Maroc, la majorité des personnes n’ayant cotisé qu’au régime de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) durant leur carrière est condamnée à vivre dans la précarité, voire la pauvreté à la retraite. La solidarité familiale et les transferts sociaux (subventions) jouent le rôle d’amortisseurs, mais il va falloir briser le tabou du plafond du salaire (6.000 dirhams) qui sert de base aux cotisations sociales au régime de la CNSS.
Au regard du montant de leur pension, soit 2.168 dirhams par mois en moyenne, les retraités du privé relevant du régime CNSS forment un gros contingent des 1,42 million de pauvres, recensés par le Haut-commissariat au Plan (HCP) dans sa dernière enquête sur le niveau de vie des ménages. Ils sont encore plus nombreux parmi les 4,75 millions de «personnes économiquement vulnérables».
Au mieux, une personne ayant exercé toute sa carrière dans le secteur privé ne peut espérer gagner plus de 4.200 dirhams, en raison de l’étrange plafonnement du salaire servant de base aux cotisations sociales qui est de 6.000 dirhams, quel que soit le montant de la rémunération brute. Au mieux, une personne ayant travaillé dans le privé et qui justifie de toutes ses annuités, ne peut espérer au maximum que 70% du plafond de cotisations, soit 4.200 dirhams mensuels.
Selon les données de la CNSS, moins de 10% des 753.297 retraités sont dans ce cas. Les autres, notamment ceux qui n’ont pas de retraite complémentaire ou de patrimoine personnel qui leur génère des revenus, doivent compter sur la solidarité familiale. Sinon, c’est la galère permanente d’autant plus qu’il s’agit d’une population très consommatrice de prestations médicales. Même avec le tiers-payant, il faudrait quand même avancer le reste à charge. D’où la forte présence de cette population dans l’ex-Ramed. Mais la situation est encore pire pour ceux qui, pour diverses raisons (non déclaration à la CNSS par leur employeur, entre autres), se retrouvent à la charge de leurs enfants.
Parmi les pensionnés couverts par l’AMO en 2023, 35% perçoivent une retraite mensuelle moyenne comprise entre 1.000 – considéré dorénavant comme un minimum – et 1.500 DH, la majorité d’entre eux étant des retraités bénéficiant d’une pension de vieillesse.
Par ailleurs, 20% des pensionnés touchent une pension mensuelle moyenne comprise entre 500 DH et 1.000 DH, dont la majorité sont des bénéficiaires de pensions de survivants. Pour ceux-là, la défiscalisation de pensions de retraite de base ne changera pas grand-chose. Depuis le 1er janvier 2025, il est appliqué une réduction de 50% de l’impôt sur le revenu sur les pensions de retraite et rentes viagères, acquises dans le cadre des régimes de retraite de base. Et dès l’année prochaine, l’exonération sera totale.
Cette exemption fiscale concerne les retraites de base versées par la CNSS, la Caisse marocaine des retraites (CMR), le Régime collectif d’allocation de retraite (RCAR) ainsi que les pensions versées par les Caisses internes de retraite dans les établissements publics. On en trouve encore à l’ONEE et à Bank Al-Maghrib par exemple. Très peu de personnes disposent en effet d’une pension de retraite complémentaire de type CIMR, un «privilège» qui ne concerne qu’un noyau de sociétés «4-5 étoiles» et des grandes entreprises publiques.
A fin 2023, le régime CIMR comptait 7.197 entreprises adhérentes contre 330.000 à la CNSS, et 203.848 attributaires de la pension de retraite, toutes catégories confondues (vieillesse, invalidité, pension de survivants, etc.) La CNSS a servi 15,88 milliards de dirhams à plus de 753.000 bénéficiaires de pensions en 2023, ce qui représente une augmentation de 6%.
Le rapport démographique est de 6,2 actifs cotisants pour chaque pensionné. La pension moyenne s’établit à 1.814 dirhams, contre 1.796 dirhams en 2022. La cartographie des pensions de retraite relève que 83% sont des pensions de vieillesse, tandis que 16% concernent des pensions de survivants.
Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO