Maroc

Réforme de la fonction publique : La Cour des comptes liste les défis

La mission d’évaluation du système de la fonction publique réalisée par la plus haute juridiction financière a débouché sur 13 recommandations phares. En plus de la réhabilitation du système des valeurs du service public, la cour a plaidé en faveur de l’obligation des administrations à se conformer aux mesures de simplification des procédures ainsi que la révision du système de gouvernance de la fonction publique.

Le rapport très attendu de la Cour des comptes sur la fonction publique est finalement tombé. Et il faut dire qu’il n’a pas dérogé à la série des diagnostics réalisés sur le fonctionnement de l’administration. En effet, les magistrats de la plus juridiction financière de l’État ont formulé plusieurs pistes de réformes, qui entrent dans le cadre de référence qui a été tracé par les discours royaux relatifs à cette problématique qui hante, plus que jamais, l’esprit des décideurs marocains. À l’issue de la mission d’évaluation menée par la Cour, 13 recommandations ont été formulées pour que le rendement des fonctionnaires de l’État, mais aussi de l’administration territoriale, soient conformes à la pléthore des lois et règlements qui régissent la fonction publique. L’ambition de l’instance présidée par Driss Jettou est grande avec «une administration rénovée foncièrement de l’administration traditionnelle et qui se doit d’être performante, compétente, efficace, innovante et réactive», selon les juges de la cour.

Instaurer des mécanismes pour améliorer la qualité du service public
«La responsabilité de l’Administration et surtout des fonctionnaires dans l’exécution des prestations publiques n’est pas encadrée dans la pratique par des procédures et des mesures rigoureuses qui en garantissent la portée». Ce constat a amené la cour à exiger l’organisation périodique des évaluations de la qualité des prestations publiques, accompagnée des mesures de sanction. L’essentiel est d’institutionnaliser dans chaque administration une pratique d’évaluation périodique de la qualité du service public y compris les mesures de satisfaction des usagers et veiller à améliorer la qualité et les conditions des prestations du service public à la lumière de ces évaluations, sans oublier d’instituer des mécanismes pour la responsabilisation des administrations et des agents au sujet des réclamations des usagers.

Réhabiliter le système de valeurs du service public
La culture de l’Administration publique doit impérativement évoluer pour s’inscrire dans la logique de la gestion par la performance et par les résultats. La Cour recommande «d’entreprendre des actions profondes pour réhabiliter le système de valeurs, à l’échelle de toute l’Administration, en mettant en avant l’honneur de servir le citoyen, le patriotisme, la rigueur, la qualité, l’intégrité et l’engagement pour l’intérêt général», sans oublier d’instaurer des dispositifs rigoureux pour combattre les mauvaises pratiques comme l’absentéisme, la procrastination ou la lenteur excessive dans le traitement des dossiers des citoyens et des investisseurs. Obliger les administrations à se conformer aux mesures de simplification des procédures. La Cour recommande de mieux profiter des grands projets (notamment l’exemple de la carte biométrique) ou ceux entamés et non achevés. À ce titre, «il importe de revoir en permanence les processus en simplifiant les procédures et en réduisant au minimum le nombre de documents exigés par l’Administration et renforcer les efforts pour l’exploitation du projet relatif à la «Gateway gouvernementale» et convenir d’un délai pour atteindre l’objectif de réduction du nombre de démarches administratives». La cour insiste aussi sur l’obligation pour l’Administration en charge d’une procédure administrative de s’adresser elle-même aux autres administrations pour obtenir les documents ou les données nécessaires à l’accomplissement de ladite procédure et «éviter le chevauchement des doubles canaux (classique et numérique) et fixer des délais ambitieux pour basculer vers le tout numérique». En attendant, les services numériques techniquement mâtures devraient devenir la règle et non l’exception comme c’est le cas jusqu’à présent.

Maîtriser le temps effectif de travail
La maîtrise de ce temps s’avère aussi comme étant une urgence pour la Cour des comptes, qui recommande de rétablir la rigueur dans le respect du temps administratif. Quatre mesures ont été indiquées que sont la sanction de l’absence des agents publics, la généralisation des systèmes de contrôle d’accès dans les différentes administrations afin de maîtriser le temps de présence des fonctionnaires et veiller à sanctionner toute absence non justifiée par des retenues sur salaire et surtout de «penser à l’introduction, pour les fonctions qui ne nécessitent pas une présence régulière au sein des locaux des administrations, de procédures qui permettent le travail à distance, ou à temps partiel, tout en veillant à un suivi personnalisé de la performance et des résultats de chaque fonctionnaire», précise le rapport final de la cour.

Revoir la gouvernance des réformes de la fonction publique
La vision de la Cour des comptes conçoit la révision de la gouvernance à partir de la mise en place d’une stratégie globale de réforme du système de la fonction publique, «dûment déclinée en actions précises avec des objectifs priorisés, des horizons temporels réfléchis, tenant compte de l’impact budgétaire estimé et en identifiant les responsables de chaque action». Les pistes préconisées varient en fonction de l’optique choisie par le gouvernement selon qu’il confie ce chantier au ministère chargé de la Fonction publique et qui doit être investi des missions d’arbitrage entre les différentes entités et de veiller à ce que «le ministère chargé de la Fonction publique, en raison de ses agendas transverses, tire pleinement profit de son rattachement au chef de gouvernement en évitant de se contenter d’agir comme un département sectoriel». Il a aussi insisté sur la mise en place d’une base de données informatisée sur le personnel des administrations publiques et qui doit être accessible à tous les acteurs concernés par la réforme.

Accélérer la déconcentration des actes de gestion des RH
Enclencher une politique effective de déconcentration administrative passe avant tout par la mise en œuvre de la déconcentration «surtout dans la perspective de la régionalisation avancée et avec l’exigence croissante des citoyens d’un service public de qualité», indique le rapport qui ajoute qu’il faudra dépasser les rigidités actuelles dans la répartition des compétences entre les niveaux central et déconcentré et qui se traduisent par une concentration du pouvoir de décision. Deux solutions majeures ont été identifiées, que sont «la déconcentration des actes courants liés à la gestion des ressources humaines à l’échelle de l’ensemble des administrations et doter les services déconcentrés de ressources humaines nécessaires sur la base d’une identification précise de leurs missions». Pour ce faire, des mécanismes incitatifs différenciés devraient être prévus pour rendre ces services déconcentrés plus attractifs.

Une refonte globale  du système de rémunération
«Le système de rémunération en vigueur dans la fonction publique s’avère complexe, inéquitable et surtout sans finalité managériale puisque l’accroissement continu de la masse salariale n’a pas d’impact perceptible sur la qualité du service public». Ce constat amer de la cour devra donc logiquement conduire à «revoir le système de rémunération en exploitant notamment les études déjà réalisées sur ce système et revoir, en premier lieu, la composition de la rémunération dans le sens de rétablir la prééminence du salaire de base et de réduire le poids des indemnités pour correspondre à leur véritable sens». Dans la même optique, une cohérence entre le système de rémunération et le système d’évaluation et de promotion doivent être trouvés, de même qu’au cas où une rémunération liée à la performance serait envisagée, la cour recommande de veiller à prévenir le risque de son évolution vers un acquis permanent et généralisé. 


La fonction publique au Maroc…
chiffres clés

Près de 32% des fonctionnaires ont un âge supérieur à 45 ans.

La masse salariale au Maroc en 2016 a atteint 120 MMDH (environ 12,5 milliards de dollars), soit 11,84% du PIB. Entre 2008 et 2016, la masse salariale est passée de 75,4 à 120 MMDH, soit, respectivement de 11,38% à 11,84% du PIB.

En 2016, le secteur public employait un effectif de personnel d’environ 860.253 dont 583.071 fonctionnaires civils de l’Etat, 147.637 fonctionnaires dans les collectivités territoriales et 129.545 agents des établissements publics.

Près de 82,5% des fonctionnaires civils sont concentrés au niveau de quatre départements ministériels.

Le département de l’Éducation nationale est le premier en termes d’effectifs avec 94,4%, suivi des départements de l’Intérieur, la Santé et l’Enseignement Supérieur avec, respectivement 02,5%, 8,9% et 4,0%.


La fonction publique au Maroc…
chiffres clés

Le salaire net moyen dans la fonction publique de l’Etat représente environ 3 fois le PIB par habitant contre 1,2 en France et 1 en Espagne.

Le salaire mensuel net moyen a atteint 7.700 DH en 2016, avec une évolution de 51,6% par rapport à 2006. Le salaire net minimum s’élève à 3.000 DH, marquant une évolution de 89,2% par rapport à 2007.


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