Maroc

Mohamed Moufid : «Nous cherchons de nouvelles opportunités dans le nord de la Méditerranée»

Mohamed Moufid 
PDG de Somalev

Le succès du «Made in Morocco» dans le secteur éolien est vraiment remarquable. Comment avez-vous réussi à accomplir votre mission ?
Chez Somalev, tout a commencé en 2014 quand nous avons décidé de nous lancer dans le domaine de la logistique intégrée, avec un focus stratégique sur le secteur de l’énergie, notamment l’éolien. À cette époque, nous avons exploré différentes opportunités pour entrer sur ce marché très fermé. Le principal défi était l’investissement élevé nécessaire pour les moyens de levage, y compris les grues mobiles et sur chenilles, où une grue peut coûter entre 5 et 7 millions d’euros, selon sa capacité (750 t à 1.200 t). Cela représentait une barrière financière importante. Un autre défi était la qualification de nos techniciens, en particulier nos opérateurs de grues, qui nécessitait une expertise technique spécifique. En plus, il y avait la question d’établir des références avec les principaux donneurs d’ordre, comme les fabricants de turbines.

Pour y parvenir, nous avons commencé modestement par des activités auxiliaires telles que les opérations de déchargement, chargement et transport liés à la réception des composants des turbines dans les ports et sur les sites de construction des parcs éoliens. Nous avons progressivement élargi notre expérience à des activités de pré-installation. Ce n’est qu’en 2021 que General Electric nous a accordé sa confiance dans le cadre d’un groupement avec des partenaires italiens pour le montage de 27 turbines lors de la première phase du parc de Taza. Cette opportunité a été une référence significative pour nous, ouvrant les portes de ce marché. Cela a permis à Somalev et à ses équipes de livrer plus de 200 mégawatts au cours de l’année 2023.

Vous avez mentionné les défis liés aux ressources humaines. Est-il difficile de trouver les compétences nécessaires pour ce type d’activité ?
Oui, c’est effectivement un défi majeur. Actuellement, il existe une initiative dans le secteur des énergies renouvelables, en particulier dans l’éolien et le solaire, impliquant des institutions comme l’Institut de formation aux métiers des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (IFMEREE).

Toutefois, cette formation se concentre principalement sur les compétences électriques et mécaniques, ainsi que sur le travail en hauteur. Le problème est que ces formations ne couvrent pas les spécificités des machines utilisées par les fabricants. Les constructeurs exigent des certifications particulières pour les techniciens travaillant sur leurs équipements. Cela représente un obstacle significatif, car les techniciens doivent être certifiés pour chaque type de machine afin de réaliser des opérations d’installation ou de maintenance. Le coût de la certification par technicien peut varier de 4.000 à 10.000 euros, en fonction du type de machine. C’est un défi majeur, surtout lorsqu’on doit former une équipe compétente pour plusieurs marques de turbines.

Pour relever ce défi, nous avons massivement investi dans la formation. Récemment, fin 2023, nous avons acquis une participation majoritaire de 51% dans une société turque possédant à la fois les références et les compétences nécessaires. Cela nous permet de proposer une offre complète qui inclut les activités portuaires, l’ingénierie de levage, le montage, l’installation électrique et mécanique, ainsi que l’opération et la maintenance (O&M) pour toute la durée de vie du parc éolien.

Vous avez entamé l’année avec le projet Dakhla. Quelles autres initiatives sont prévues ?
Grâce à la vision et aux orientations stratégique de Sa Majesté, le Maroc bénéficie d’un grand nombre de projets d’énergies renouvelables en cours, offrant ainsi une opportunité importante pour notre industrie locale. Chez Somalev, nous sommes déterminés à consolider notre position sur le marché national, tout en cherchant de nouvelles opportunités dans le nord de la Méditerranée. Nous avons observé une pénurie de main-d’œuvre qualifiée en Europe, et nous ambitionnons d’exporter nos compétences dans cette région.

En parallèle, nous menons des discussions avancées pour des projets en Tunisie et en Égypte, démontrant notre engagement à partager notre expertise à travers la Méditerranée et en Afrique. Notre objectif est d’exporter les compétences marocaines à l’international. Cependant, l’intégration de la préférence nationale dans les projets d’énergies renouvelables reste un défi.

À ce jour, il n’y a pas de mesures spécifiques pour soutenir l’intégration locale dans ces projets. En outre, le manque de soutien financier pour les secteurs spécifiques au Maroc pose des problèmes, notamment pour l’acquisition de nouvelles machines et la formation de techniciens spécialisés. En comparaison, l’Europe offre des aides qui peuvent couvrir jusqu’à 55% du coût d’investissement, facilitant ainsi le développement de ces secteurs. C’est un déséquilibre que nous cherchons à surmonter par nos propres moyens et initiatives.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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