Maroc

Méditerranée : un plan d’action pour harmoniser pêche et biodiversité marine

La Commission générale des pêches pour la Méditerranée lance un plan d’action décennal pour concilier pêche et protection des espèces vulnérables en Méditerranée et mer Noire. Face aux menaces pesant sur la biodiversité marine, l’initiative vise à réduire les captures accidentelles et la déprédation.

La Méditerranée et la mer Noire constituent des points névralgiques de la biodiversité marine mondiale. Ces eaux abritent une grande variété d’espèces, dont beaucoup sont endémiques, rares ou vulnérables. Parmi elles, on trouve des mammifères marins, des tortues marines, des oiseaux marins et diverses espèces de requins et de raies. Ces espèces jouent un rôle écologique important dans les écosystèmes aquatiques.

Cependant, cet environnement marin unique fait face à de nombreuses menaces. Le changement climatique, la pollution, la dégradation des habitats et l’introduction d’espèces non indigènes mettent en péril la santé de ces écosystèmes.

À ces défis s’ajoutent les interactions problématiques entre les activités de pêche et les espèces vulnérables, qui ont des conséquences néfastes tant pour la faune marine que pour les pêcheurs. Les captures accidentelles d’espèces vulnérables dans les engins de pêche sont fréquentes. Ces incidents peuvent causer des blessures graves, voire mortelles, aux animaux.

De plus, certaines espèces comme les dauphins, les phoques moines et les requins peuvent prélever les poissons pris dans les filets ou les lignes, un phénomène appelé déprédation. Cette situation engendre des pertes économiques importantes pour les pêcheurs et peut endommager leur matériel.

Une initiative pour concilier pêche et protection des espèces
Face à ces enjeux, la Commission générale des pêches pour la Méditerranée (CGPM) de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a lancé une initiative ambitieuse. Le Plan d’action régional visant à surveiller et atténuer les interactions entre les pêches et les espèces vulnérables en Méditerranée et en mer Noire a été mis en place pour une durée de dix ans. Ce plan s’inscrit dans la Stratégie 2030 de la CGPM et poursuit deux objectifs principaux. Il s’agit de réduire les captures accidentelles d’espèces vulnérables et de minimiser la déprédation par les dauphins.

Paolo Carpentieri, chargé du suivi des ressources halieutiques à la CGPM, souligne l’importance de cet équilibre, «pour que les pêches soient productives, il faut que les mers soient en bonne santé, et l’un des principaux volets de l’activité de la CGPM est de s’assurer que les pêches n’ont pas d’effet préjudiciable majeur sur l’environnement marin», a-t-il souligné. Pour atteindre ces objectifs, la CGPM aide les pays membres à collecter et évaluer les informations nécessaires. Des protocoles standardisés ont été établis, détaillés dans des guides sur le suivi des captures accidentelles et la déprédation. Cette approche vise à faciliter la définition de priorités et la mise en œuvre efficace de mesures de gestion.

Des projets pilotes innovants à travers la Méditerranée
La CGPM a lancé cinq projets pilotes dans différentes sous-régions de la Méditerranée, en collaboration avec divers partenaires. Ces initiatives visent à renforcer les programmes de surveillance des captures accessoires et à tester des mesures d’atténuation pour réduire les interactions problématiques.

En Espagne, aux Baléares, BirdLife International travaille sur l’atténuation des impacts de la pêche à la palangre de fond sur les oiseaux marins, particulièrement les puffins menacés.

Au Maroc, l’Institut national de recherche halieutique et l’ACCOBAMS (Accord sur la conservation des cétacés de la mer Noire, de la Méditerranée et de la zone Atlantique adjacente) se concentrent sur la réduction des captures accidentelles de requins et de raies dans les chaluts, ainsi que sur la limitation de la déprédation par les dauphins dans les sennes coulissantes.

En Sicile, l’ACCOBAMS et Marecamp cherchent à réduire les déprédations causées par les dauphins dans les pêcheries artisanales. En Turquie, un projet vise à diminuer les captures accidentelles de diverses espèces vulnérables dans les chaluts en mer du Levant septentrionale.

Enfin, en mer Adriatique, WWF-Adria et l’Institut croate d’océanographie et de pêche collaborent pour réduire les captures de requins et de raies dans les filets maillants et combinés. Ces projets pilotes, qui devraient s’achever en 2025, fourniront des données pour l’élaboration de futurs plans de gestion de la CGPM.

Les mesures efficaces seront intégrées, les connaissances synthétisées, et des campagnes de sensibilisation et des programmes de formation seront renforcés.

Focus particulier sur la mer Noire
En mer Noire, le projet CetaByM se concentre spécifiquement sur l’évaluation et la réduction des captures accessoires de cétacés dans les filets maillants utilisés pour la pêche au turbot. Cette espèce, très prisée en mer Noire, est principalement capturée à l’aide de filets maillants qui représentent un danger pour le marsouin commun, l’une des trois espèces de dauphins de la région.

Hüseyin Özbilgin, coordonnateur du programme BlackSea4Fish, explique l’enjeu. «Le taux de mortalité du marsouin commun étant élevé, nous testons différentes mesures pour réduire les captures accidentelles, tout en veillant à ce que la pêche au turbot puisse se poursuivre de manière viable à long terme.»

Ces initiatives en Méditerranée et en mer Noire bénéficient du soutien de nombreux pays et donateurs, dont l’Union européenne, le Fonds pour l’environnement mondial et l’Espagne.

Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO

 


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