Maroc-France : nouveau pacte
La visite du Chef d’État français s’achève sur une note optimiste. En réaffirmant les liens forts qui unissent Paris à Rabat, les deux pays se projettent désormais dans l’avenir, portés par une ambition commune de coopération renforcée.
Entre le Maroc et la France, les tensions diplomatiques sont désormais reléguées au passé. Après près de trois ans de relations marquées par un refroidissement notable, Emmanuel Macron a entamé lundi 28 octobre une visite d’État de 48 heures à Rabat, sous le signe de la réconciliation.
Le Roi Mohammed VI a réservé au président français un accueil à la hauteur des enjeux, soulignant la volonté des deux nations d’écrire un «nouveau livre». L’Élysée évoque pour sa part une «ambition renouvelée pour les trente prochaines années».
Dès son arrivée, les discussions se sont focalisées sur les questions économiques, avec l’annonce de plusieurs accords stratégiques, dont la signature a été scellée dans l’atmosphère feutrée du Palais royal. Totalisant plus de 100 milliards de dirhams, ces conventions couvrent des secteurs clés tels que les infrastructures, les énergies renouvelables et l’industrie ferroviaire. Ce partenariat va bien au-delà d’un simple échange de biens ou de services.
Il incarne la construction d’un avenir commun pour répondre aux défis du 21e siècle comme l’a affirmé Emmanuel Macron dans son discours prononcé devant le Parlement, mardi : «Alors nous avons, avec Sa Majesté le Roi Mohammed VI, décidé d’écrire un nouveau livre ensemble. Je veux partager avec vous ma certitude que ces liens vont aller se renforçant sans cesse».
La dimension diplomatique n’a pas été en reste. Le moment le plus attendu de cette visite s’est déroulé sous les ors du Parlement marocain, où Emmanuel Macron, devant un parterre de députés et responsables marocains, a prononcé un discours que beaucoup qualifient déjà d’historique. Le président français y a réaffirmé avec force le soutien de la France au Plan d’autonomie du Maroc pour les provinces du Sud.
«Pour la France, le présent et l’avenir de ce territoire s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine», a-t-il déclaré, sous les acclamations unanimes de l’assemblée.
Cette prise de position, loin d’être anodine, marque une rupture nette avec la prudence affichée par Paris ces dernières années. Un geste qui devrait résonner autant à Rabat qu’à Paris, renforçant la place du Maroc comme partenaire stratégique, et ce, au détriment d’Alger.
«Made with Morocco»
Sur le volet économique, mardi dernier a été une journée dense dans l’agenda d’Emmanuel Macron, avec la rencontre entre les patrons français et marocains, réunis sous l’égide de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et du Mouvement des entreprises de France (MEDEF).
Le concept de «Made with Morocco» a été au cœur des échanges, symbolisant cette volonté de colocalisation industrielle entre les deux nations. Ce projet s’inscrit dans une dynamique visant à intégrer les chaînes de valeur industrielles et à promouvoir des partenariats dans des secteurs aussi stratégiques que l’aéronautique, l’automobile et l’énergie verte, dans une conjoncture internationale marquée par la fluctuation des prix de l’énergie.
«Ce que nous mettons en place ici, c’est une coopération tournée vers l’avenir, axée sur la durabilité et l’innovation. Le Maroc est un acteur clé dans cette transition», a souligné Emmanuel Macron dans son allocution de clôture de la rencontre Maroc-France, marquant un moment de forte communion avec les deux sphères privées des deux rives de la Méditerranée.
Hub régional
Cela est à même de booster davantage l’activité déjà florissantes entre les deux pays, comme l’explique Jean-Charles Damblin, directeur général de la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM): «Les échanges commerciaux entre la France et le Maroc n’ont cessé de croître ces dernières années, atteignant près de 14 milliards d’euros en 2023».
Ce dynamisme est la résultante d’une collaboration étroite dans les secteurs de pointe, et témoigne du rôle clé que le Maroc joue désormais dans la stratégie de développement des entreprises françaises, notamment en matière de transition énergétique.
«Le Maroc est aujourd’hui un hub incontournable pour les entreprises françaises souhaitant se développer en Afrique. Avec ses projets phares d’hydrogène vert, le Royaume se positionne comme un leader dans la région», a ajouté Damblin, soulignant l’importance croissante de Rabat sur l’échiquier énergétique régional.
Dimension culturelle, omniprésente
A l’heure où les échanges économiques s’intensifient, Emmanuel Macron n’a pas manqué de rappeler que cette visite s’inscrit dans une dynamique plus large, celle de la «réinvention des liens historiques entre la France et le Maroc». Les deux pays, unis par une «communauté de destin», partagent plus que jamais des ambitions communes pour répondre aux défis globaux.
La transition énergétique, la modernisation industrielle et le renforcement des infrastructures sont au cœur de ce nouvel élan, qui devra également intégrer les dimensions sociale et culturelle, autre pierre angulaire du partenariat franco-marocain. Un moment clé de cette visite a été l’annonce par le président français d’un accord historique imminent.
Lors de son discours au Parlement, Emmanuel Macron a évoqué la mise en place d’un nouveau cadre stratégique entre la France et le Maroc, 70 ans après la déclaration de La Celle-Saint-Cloud. Ce partenariat, qui sera formalisé lors de la prochaine visite d’État du Roi Mohammed VI en France, conférera au Royaume un statut unique, faisant de lui le seul pays hors de l’Union européenne à bénéficier d’un tel accord.
«Le Royaume du Maroc sera ainsi le seul pays hors de l’Union européenne à bénéficier d’un tel partenariat», a précisé le président français, marquant ainsi le début d’une nouvelle ère dans les relations bilatérales entre les deux nations.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO