Maroc-Espagne: le recadrage de Bourita
Suite à «l’hostilité médiatique inédite» lancée en Espagne contre le Maroc, le ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, remet les pendules à l’heure. Le chef de la diplomatie a notamment déclaré que «les manœuvres espagnoles pour détourner l’attention sur les véritables origines de cette crise ne trompent personne», avant d’ajouter que «la crise durera tant que sa véritable cause ne sera pas résolue». Morceaux choisis.
Le ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, est sorti de sa «réserve» pour remettre les pendules à l’heure dans la crise maroco-espagnole relative à l’accueil par Madrid du dénommé Brahim Ghali, qui est pourtant poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, viol et violations des droits de l’homme.
Cette sortie médiatique fait notamment suite à «l’hostilité médiatique inédite» lancée en Espagne contre le Maroc. Elle vise à apporter l’éclairage nécessaire à l’opinion publique sur cette crise où l’Espagne tente d’utiliser ce qui s’est passé dans le préside occupé de Sebta comme «le salut pour sortir du débat réel», a indiqué le ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger dans une interview accordée à l’agence de presse officielle.
Selon Bourita, «les autorités espagnoles doivent d’abord être transparentes avec leur propre opinion publique et avec leurs propres forces vives, car ce n’est pas à coup de reportages et d’insultes et de bombardement médiatique qu’on occultera la réalité». En effet, «concernant la lutte contre la migration clandestine, le registre du Maroc est connu», a notamment déclaré Bourita.
«Le bon voisinage et le partenariat ne sont pas des slogans. On doit les incarner»
«Le Maroc n’a pas besoin d’être noté par l’Espagne et ses médias en matière de lutte contre la migration illégale», a-t-il indiqué, rappelant, dans ce cadre, que le Maroc a avorté 13.000 tentatives d’immigration irrégulière depuis 2017, démantelé 4.163 réseaux de trafics et enregistré 48 tentatives d’assaut sur Sebta. «Il y a une réalité, il y a des chiffres qui méritent reconnaissance», a soutenu Bourita, avant d’ajouter que ce qui s’est passé dans le préside occupé rappelle aussi «le coût financier que le Maroc assume pour ce bon voisinage, que certains ont malmené ces derniers jours».
«L’Europe ne nous donne même pas 20% du coût que le Maroc assume dans la lutte contre la migration clandestine», a-t-il dit, précisant que les événements de ces derniers jours ont montré que 99% de l’effort de lutte est fait par le Maroc contre «rien de l’autre côté».
Bourita rejette ainsi les accusations de chantage de l’Espagne contre le Maroc «qui mobilise ses forces de sécurité et qui paie de son budget pour préserver son voisinage». «Le Maroc n’est pas le gendarme, mais il est toujours un acteur responsable» en matière de lutte contre la migration clandestine, a dit le ministre des Affaires étrangères, soulignant que le Royaume est également en droit d’exiger la même responsabilité, le même engagement et la même confiance de ses partenaires.
Poursuivant son propos, il a également expliqué que «le bon voisinage et le partenariat ne sont pas des slogans. On doit les incarner.» Or, «malheureusement, les réponses que le Maroc a reçues depuis le 17 avril ne sont pas des preuve de bon voisinage ni de partenariat», a-t-il remarqué. Et de marteler que «le Maroc d’aujourd’hui n’accepte plus ce genre de double langage».
«L’Espagne fait payer à l’Europe le prix de sa maladresse»
Fournissant sa lecture sur les répercussions de la crise sur l’Europe, le chef de la diplomatie marocaine a noté que «l’Espagne fait payer à l’Europe le prix de sa maladresse et doit lui expliquer comment un pays membre de l’UE admet sur le territoire européen des gens avec une fausse identité».
Madrid, a-t-il ajouté, doit également expliquer à ses pairs européens comment elle peut abriter sur le territoire européen quelqu’un qui est poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, viol et violations des droits de l’homme et comment une femme violée, qui demande son droit, doit attendre que les deux ministres espagnol et algérien des Affaires étrangères se coordonnent pour statuer sur son cas. Une autre bourde, et non des moindres, de la diplomatie espagnole révélée par Bourita est celle relative à la convocation de l’Ambassadeure du Maroc à Madrid, Karima Benyaich. «Les autorités espagnoles ont donné à la diplomate marocaine 30 minutes pour venir au ministère des Affaires étrangères, ce qui est un acte inédit, très inhabituel dans les relations entre pays voisins et rare dans la pratique diplomatique», a également souligné le ministre, précisant que l’ambassadeur de SM le Roi ne reçoit d’instructions que de son pays.
Bref, «le Maroc refuse de recevoir ce genre d’intimidations, basées sur des clichés du passé, et restera clair par rapport à l’origine de cette crise, sa genèse et ses responsables», a annoncé Bourita, qui a clos le débat en déclarant que «la crise durera tant que sa véritable cause ne sera pas résolue ».
«L’humanitaire ne se fait pas en cachette»
Dans l’interview qu’il a accordée à la MAP, le chef de la diplomatie marocaine a balayé d’un revers de main l’argument avancé par l’Espagne pour justifier l’accueil de Brahim Ghali, qui est pourtant poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, viol et violations des droits de l’homme. Selon Bourita, «l’humanitaire n’a jamais dicté qu’on passe par la manigance. L’humanitaire ne se fait pas en cachette», a-t-il estimé, appelant l’Espagne à reconnaître et à assumer «ses graves attitudes» et à éviter «le double langage». «Le Maroc ne procède pas au chantage, le Maroc est clair par rapport à ses positions, ses actions et son attitude», a-t-il expliqué.
Aziz Diouf / Les Inspirations Éco