LGV Kénitra-Marrakech : un mégaprojet à haute portée stratégique

Le Roi Mohammed VI a lancé jeudi les travaux de réalisation de la ligne à grande vitesse Kénitra-Marrakech. Ce mégaprojet stratégique, qui devrait être livré en novembre 2029, transformera considérablement l’écosystème ferroviaire national et sera une nouvelle alternative pour désengorger l’axe Casablanca-Marrakech.
À cinq ans du Mondial 2030, le Maroc accélère la cadence de réalisation de ses mégaprojets pour être prêt avant la grand-messe du ballon rond. Parmi les chantiers stratégiques, la ligne à grande vitesse (LGV) Kénitra-Marrakech, dont les travaux ont été officiellement lancés jeudi, à la gare Rabat-Agdal, par le Roi Mohammed VI.
Budgétisé à 53 milliards de dirhams (MMDH), ce projet porte sur la création d’une ligne ferroviaire d’une longueur de 430 km reliant les villes de Rabat, Casablanca et Marrakech. Ladite ligne desservira également les aéroports de Rabat et Casablanca, et sera opérée par des trains à grande vitesse (TGV) allant jusqu’à 350 km/h.
Ce chantier fait partie d’un programme ambitieux de 96 MMDH de l’Office national des chemins de fer (ONCF). Des aménagements des zones terminales de Rabat, Casablanca et Marrakech (travaux sur voies exploitées), la réalisation d’équipements ferroviaires, la construction de nouvelles gares grande vitesse, de gares de train de proximité, l’aménagement des gares existantes, ainsi que la construction du Centre de maintenance pour l’entretien des rames à Marrakech sont également prévus.
Réduction des durées de trajets
La future LGV permettra de réduire les temps de parcours entre les grandes villes desservies. Ainsi, le trajet sera de 1h entre Tanger et Rabat, 1h40 entre Tanger et Casablanca, et de 2h40 entre Tanger et Marrakech (soit un gain de temps de plus de 2h). Mieux, elle reliera Rabat à l’aéroport Mohammed V de Casablanca en 35 mn, en desservant notamment le futur Grand stade Hassan II de Benslimane.
Il est également prévu un service à grande vitesse entre Fès et Marrakech avec un trajet de 3h40, avec des trains à grande vitesse circulant sur la ligne classique de Fès jusqu’au nord de Kénitra, avant de continuer sur la nouvelle LGV jusqu’à Marrakech. Bien évidemment, une fois opérationnelle, cette LGV sera une aubaine pour les nombreux usagers, particulièrement ceux établis dans les agglomérations de Casablanca, Rabat et Marrakech.
Elle sera non seulement une nouvelle alternative pour désengorger ces trois centres urbains, notamment le trafic routier hyper dense sur ces axes, mais permettra aussi de libérer de la capacité sur les lignes du réseau classique de l’ONCF. Les chiffres de fréquentation de la LGV Tanger-Kénitra, opérationnelle depuis 2018, confirment la préférence des Marocains pour le transport ferroviaire.
L’ONCF révèle une hausse de 80% du nombre de voyageurs depuis 2019, avec un taux de remplissage de 71%. A terme, la ligne LGV devrait transporter 100 millions de voyageurs, dont 12 millions sur la ligne déjà desservie par Al Boraq. Elle permettra ainsi de réduire, chaque année, 360.000 tonnes d’émissions de Co2.
Les marchés de génie civil octroyés
Avant le top départ des travaux, l’ONCF avait octroyé plusieurs marchés de travaux de génie civil, incluant les terrassements, ouvrages d’art et rétablissement de communications et de clôtures (TOARC). Les lots 1 (63km) et 2 (64 km) ont été attribués au chinois REG et Shandong Hi-Speed Engineering Construction, pour des montants respectifs de 3,4 MMDH et 4 MMDH.
Le lot 3 (64 km) a été attribué au français GTR pour 2,22 MMDH, le lot 4 (51 km) à TGCC (2,8 MMDH) et le lot 5 (36 km) au chinois CRCC 20 pour 1,8 MMDH.
Enfin, les lots 6 (60 km) et 7 (62 km) seront réalisés par les entreprises marocaines Jet Contractors (2,09 MMDH) et Mojazine (1,9 MMDH). Selon le planning de l’ONCF, le tronçon Casablanca-Marrakech devrait être finalisé en 2029. Les essais techniques devraient démarrer vers janvier 2029, d’abord sur le tronçon Kénitra-Marrakech entre janvier et mai, puis entre Casablanca et Marrakech de mai à septembre 2029. La mise en service est prévue pour novembre 2029.
29 MMDH pour l’acquisition de 168 nouveaux trains
Parallèlement à l’extension de la LGV, l’ONCF a lancé un programme d’acquisition de 168 nouveaux trains pour rénover la flotte. D’un investissement de 29 MMDH, ce projet porte sur l’acquisition de 18 TGV pour la ligne Kénitra-Marrakech auprès du français Alstom pour près de 4,5 MMDH , 40 trains inter-city auprès du constructeur espagnol, 60 trains navettes rapides (TNR) et 50 pour le réseau de transport en commun à Casablanca, Rabat et Marrakech, auprès du sud-coréen Hyundai Rotem pour près de 16 MMDH.
Outre l’acquisition de ce matériel roulant, le Maroc prévoit la mise en place d’une unité industrielle de fabrication de trains et le développement d’un écosystème de fournisseurs et de sous-traitants.
La création d’une joint-venture entre les constructeurs et l’ONCF pour assurer la maintenance courante et industrielle couvrant la durée de vie des trains, avec une maîtrise des coûts et un taux d’intégration locale supérieur à 40%, est également dans le pipe.
Avelia Horizon, le futur TGV de la ligne Kénitra-Marrakech
Avelia Horizon, c’est le nom du modèle de TGV qui desservira la ligne à grande vitesse Kénitra-Marrakech. L’ONCF en a commandé 18 auprès d’Alstom, dont 12 en tranche ferme et six en optionnel Ces trains seront produits en France dans les usines d’Alstom puis transportés et testés au Maroc. Disposant d’une vitesse de pointe de 360 km/h, ce TGV peut rouler jusqu’à 540.000 km par an contre 450.000 km pour les TGV Inoui fabriqués par Alstom, et qui opèrent notamment en France.
Elimane Sembène / Les Inspirations ÉCO