Les mises en garde des députés
L’évaluation des parlementaires de la nouvelle loi sur le Fonds de l’entraide familiale appelle l’État à appliquer de manière souple les nouvelles mesures destinées à couvrir les femmes divorcées en situation précaire. Même si le montant des aides a totalisé plus de 181 MDH, entre 2012 et 2017, le taux des fonds débloqués n’a pas dépassé le tiers des dotations qui ont été réservées.
Le rapport parlementaire, élaboré suite au vote à l’unanimité de la loi 83-17, montre que les dotations réservées au fonds «sont suffisantes pour couvrir les charges financières qui devront s’ajouter après l’intégration des nouvelles catégories», souligne le rapport de la Commission des secteurs sociaux au sein de la 1re Chambre. Le grand problème légal à trancher est celui de pouvoir définir, «de manière définitive, le statut de la femme divorcée en état de pauvreté, et qui a suscité un débat approfondi au sein de la nouvelle loi à propos de son droit aux aides et qui met un terme aux divergences en matière d’interprétation». En contrepartie, les enfants mineurs sous tutelle des femmes divorcées seront autorisés à déposer eux-mêmes des demandes pour bénéficier des aides, ainsi que la possibilité d’ester au sein du tribunal le plus proche du lieu de résidence des enfants. De nouveaux délais plus courts ont été prévus pour le secrétariat-greffe qui doit traiter les demandes en 3 jours maximum. Un amendement important aux règles de fonctionnement du fonds a été introduit dans le projet et concerne l’article 13 qui a ordonné l’arrêt des aides, dans le cas où la situation des femmes change.
Le bilan dressé par les députés
Les données communiquées aux membres de la commission indiquent qu’entre 2012 et décembre 2017, ce sont 17.656 décisions judiciaires qui ont été prises, avec une hausse des décisions exécutées durant 2017 avec 5.241. Le fonds a débloqué durant la même période un total de 55,1 MDH, avec 4.021 décisions qui ont été exécutées en 2016. «Vu l’engouement remarquable pour bénéficier des dotations de la part des catégories concernées, les dotations ont été multipliées pour permettre au fonds d’assumer ses responsabilités», constate le rapport parlementaire. Le bilan dressé montre qu’à fin décembre 2017, un total de 181 MDH a été débloqué. Pour les députés, la complexité des procédures ne résulte pas uniquement de la loi, mais également des décrets qui fixent la liste des documents demandés pour obtenir l’aide. Malgré l’évolution des femmes bénéficiaires, de 803 en 2012 à 5.241 en 2017, «le pourcentage des dotations réservées au fonds n’a pas dépassé le tiers». Parmi les pistes préconisées par les députés, «la formation de conseillers au sein du ministère de la Justice et qui seront chargés de faire des enquêtes pour l’identification des catégories pauvres qui méritent les aides, et mettre un terme à la démarche actuelle qui accorde aux auxiliaires de l’autorité de déterminer les femmes qui pourront bénéficier de l’aide». Les membres de la commission ont surtout mis en garde contre «la diabolisation» des bénéficiaires, essentiellement après la hausse des seuils des aides, «et cela, sous prétexte des fraudes qui sont commises pour accéder aux aides», indique le rapport parlementaire.
Le fonds est solvable jusqu’au 2021
Selon les estimations des députés, le budget du Fonds de l’entraide familiale s’élève à 1 MMDH, dont 18 à 20% uniquement ont été débloqués. La solvabilité de cette instance étatique est garantie jusqu’à 2021. «Le gouvernement a décidé à ce que l’année 2018 soit celle de l’évaluation des contraintes qui seront engendrées par l’élargissement du taux de la couverture et comment la jurisprudence sera appliquée», indique l’argumentaire du département de tutelle étalé devant les députés. Parmi les projets sur lesquels les députés veulent garder la main, l’identification des bénéficiaires, qui est entre les mains du ministère de l’Intérieur qui travaille «actuellement sur la fixation des cas de la pauvreté de manière précise», selon le rapport. La moyenne annuelle des cas concernés n’a, par contre, pas été donnée aux députés, tout comme le flou qui entoure toujours les interventions du fonds qui n’auront pas d’effet rétroactif et ne concernent par conséquent que les ruptures familiales qui ont «la force jugée», selon le jargon judiciaire, c’est-à-dire les divorces définitifs s’accompagnant d’une insolvabilité totale du mari.