Maroc

Industrie pharmaceutique : les acteurs locaux face au défi de la souveraineté sanitaire

Avec une croissance de 50% de son chiffre d’affaires en 2023, l’industrie pharmaceutique marocaine se positionne comme un pilier central de la souveraineté sanitaire du Royaume. Fort d’un écosystème dynamique regroupant 50 établissements pharmaceutiques industriels (EPI), le secteur couvre désormais 80% des besoins en médicaments du pays et ambitionne de s’imposer sur le marché africain.

Avec une augmentation de 50% de son chiffre d’affaires par rapport à 2022, l’industrie pharmaceutique marocaine a connu une année record en 2023. Considérée comme un des secteurs les plus dynamiques du pays, l’industrie pharmaceutique s’est révélée être un pilier crucial pour la souveraineté sanitaire du Royaume.

C’est ce que confirme le Policy Brief du Policy Center For The New South (PCNS), rédigé par Henri-Louis Vedie et qui traite de «la filière pharmaceutique industrielle du Maroc est-elle prête à relever le défi de la souveraineté sanitaire du royaume ?». Ledit document explore la capacité de la filière pharmaceutique industrielle marocaine à répondre aux défis de la souveraineté sanitaire du pays.

Un écosystème dynamique et en expansion
Le Maroc dispose de 50 établissements pharmaceutiques industriels (EPI), regroupant des entreprises de taille variée, allant des petites et moyennes entreprises à des filiales de multinationales. Depuis la création de Pharma-Cooper en 1933, cet écosystème s’est largement développé, avec 21 EPI comme étant des filiales marocaines de leaders mondiaux dans leur domaine.

Ce dynamisme est soutenu par une stratégie de développement ambitieuse mise en place dans le cadre du plan d’accélération industrielle 2014-2020, relayé par un fonds de développement industriel depuis 2015. Aujourd’hui, ce secteur couvre 80 % des besoins en médicaments du Royaume, faisant du Maroc le deuxième producteur pharmaceutique en Afrique, après l’Afrique du Sud, et le cinquième dans la région MENA. La filière se distingue par sa diversité et son intégration dans le tissu économique global du pays.

En effet, le secteur pharmaceutique marocain ne se contente pas de répondre à la demande nationale, mais joue également un rôle important sur la scène internationale. L’ouverture du marché pharmaceutique marocain à des multinationales a permis d’introduire des standards internationaux de production et de qualité, renforçant ainsi la compétitivité des produits marocains sur le marché mondial.

Un moteur de croissance interne et externe
Le secteur pharmaceutique bénéficie de deux moteurs de croissance, à savoir interne et externe. En interne, la généralisation de la couverture médicale à tous les Marocains et la suppression de la TVA sur les médicaments depuis janvier 2024 promettent d’accroître considérablement la consommation de médicaments. Les projections démographiques, avec une population vieillissante, soutiennent également cette croissance.

En effet, une population vieillissante entraîne naturellement une augmentation de la consommation de médicaments, particulièrement pour les traitements chroniques. À l’externe, le Maroc se positionne pour répondre aux besoins pharmaceutiques de l’Afrique.

Actuellement, seulement 10 % de la production est exportée, bien que le continent ne produise que 3% des médicaments qu’il consomme. Les multinationales considèrent l’Afrique comme un marché à fort potentiel, et le Maroc est bien placé pour en tirer parti grâce à ses EPI d’excellence et à son attractivité pour les investissements directs étrangers (IDE).

Les efforts du pays pour accroître ses exportations pharmaceutiques sont soutenus par une série d’initiatives visant à renforcer les capacités de production et à améliorer les infrastructures logistiques. Le pays a également mis en place des accords de partenariat avec plusieurs pays africains pour faciliter l’accès aux marchés et promouvoir les produits pharmaceutiques marocains.

Des EPI d’excellence pour soutenir la souveraineté sanitaire
Selon le Policy Brief, les EPI marocains, tels que Sothema, Cooper Pharma, Pharma 5 et Biotechnologies (Marbio) Maroc, illustrent le potentiel du pays à renforcer sa souveraineté sanitaire. Sothema, par exemple, est un leader dans la fabrication de génériques et de produits sous licence, avec une stratégie de croissance tant nationale qu’internationale. Cotée à la Bourse de Casablanca, Sothema a enregistré un bénéfice net de 282 millions de dirhams en 2022, en progression de 9,3 % par rapport à 2021.

Cooper Pharma, depuis sa création en 1933, est devenu un modèle unique avec une triple activité de fabricant, distributeur et grossiste. Ce laboratoire pharmaceutique est certifié par diverses autorités sanitaires internationales et est présent dans 24 pays.

Pharma 5, quant à elle, est l’un des premiers génériqueurs du Royaume, avec une production accrue grâce à la première usine intelligente du continent, inaugurée en 2023. Cette usine, totalement digitalisée, permet à Pharma 5 de multiplier par cinq sa capacité de production. Biotechnologies (Marbio) Maroc, bien que récemment créé en 2023, montre déjà un fort potentiel.

Ce projet, financé par un partenariat public-privé incluant le Fonds Mohammed VI pour l’investissement et des groupes bancaires marocains, vise à établir le Maroc comme un leader africain dans la production de vaccins. L’usine en cours de construction à Benslimane devrait être achevée fin 2024, avec l’ambition d’avoir la plus grande capacité africaine de production de vaccins.

Les génériques, un levier pour la souveraineté sanitaire
La production de médicaments génériques au Maroc permet de réaliser des économies substantielles, essentielles pour préserver les équilibres financiers de l’assurance maladie et améliorer la balance commerciale du pays.

En 2021, ces économies ont atteint 3,77 milliards de dirhams, confirmant l’importance de cette filière pour la souveraineté sanitaire. Les médicaments génériques constituent une alternative moins coûteuse aux médicaments brevetés, permettant ainsi de réduire les dépenses de santé tout en garantissant l’accès à des traitements efficaces.

Le Maroc, en mettant l’accent sur la production de génériques, parvient à répondre aux besoins de sa population tout en réduisant sa dépendance vis-à-vis des importations de médicaments coûteux. La guerre russo-ukrainienne et la pandémie de Covid-19 ont mis en évidence l’importance de la souveraineté sanitaire.

En réponse à ces crises, le Maroc a intensifié ses efforts pour accroître la production locale de médicaments génériques, réduisant ainsi sa vulnérabilité aux perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales. Cette stratégie renforce également la capacité du pays à répondre rapidement aux urgences sanitaires en garantissant un approvisionnement stable en médicaments essentiels.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO

 


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