MarocTable ronde

Inclusion numérique : encore du chemin à parcourir

«L’inclusion numérique au Maroc : Comment réussir le pari ?». C’est le thème de la dernière table ronde organisée par Les Inspirations ÉCO. Pour débattre de cette thématique, plusieurs experts ont été conviés. Il s’agit de Hind Lfal, Secrétaire générale du groupe Orange Maroc, et Ghita Hannane, Country officer de la Société financière internationale (IFC), filiale de la Banque mondiale. Étaient également présents Ahmed Lkhaouja, expert de l’Union internationale des télécoms (UIT), Hassan Belkhayat, président de la Commission écosystème au sein de la CGEM, et Hamid Ben Elafdil, chef d’entreprise et président de la fondation Jadara. Le débat a porté sur plusieurs aspects inhérents à la situation actuelle de l’inclusion numérique dans le Royaume.

Le Maroc a réalisé des progrès significatifs en matière d’inclusion numérique au cours des dernières années, selon les derniers chiffres de la Banque mondiale. Le Royaume se classe actuellement à la 61e position à l’échelle des TIC dans le monde, ce qui constitue un progrès phénoménal. Néanmoins, la fracture numérique reste un réel problème dans l’exécution du Nouveau modèle de développement.

En 2023, le taux de pénétration d’Internet dans les ménages est estimé à 87% contre 66% en 2015, indique une récente enquête TIC de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT). Ce taux varie considérablement en fonction de la région et de la catégorie sociale. Le taux de pénétration pour les ménages est de 92% dans les villes contre 77% dans les zones rurales. En termes de catégories, l’enquête de l’ANRT indique que l’accès à Internet est essentiellement mobile avec un taux de pénétration de 146% à fin juin 2023. Alors que le taux de pénétration pour les ménages est, à fin juin 2023, de 17,2% pour l’ADSL et de 8,1% pour le FITH.

En tête du classement
Dans le même registre, le Maroc améliore son  classement dans l’Indice de développement des technologies de l’information et de la communication (IDI) de l’Union internationale des télécommunications (UIT), avec un score de 85,1, indique le dernier rapport de l’organisme international qui le positionne à la 61e place. «C’est un jump phénoménal que nous avons réalisé», se réjouit Hind Lfal, secrétaire générale d’Orange Maroc. Cette position dépasse la moyenne mondiale située à 72,8 sur 100, ainsi que la moyenne en Afrique (47,4). Le Maroc dépasse aussi la moyenne mondiale (70,5%) en ce qui concerne le pourcentage des «Individus utilisant Internet» avec un taux de 92,8%.

Pour ce qui est des «Ménages disposant d’un accès Internet à domicile» et de la Couverture 3G/4G, dont les moyennes mondiales respectives sont de 70,8% et 92,5%, le Royaume reste bien positionné avec des taux respectifs de 90,7% et 99,2%.

«Il est certain que le pays a réalisé des avancées majeures en termes d’inclusion sur le mobile. Depuis plusieurs années, on dépasse les 125-130% de taux d’adoption du mobile», assure Hind Lfal qui déplore un retard sur le fixe.

Les estimations sont comprises entre 17 et 18% pour la DSL et de 8% pour la fibre. «On a encore un enjeu important sur cette partie fixe», indique-t-elle. L’infrastructure fait partie des enjeux majeurs qui permettent l’inclusion numérique, et notamment le fixe. Le risque, c’est de creuser un peu plus le fossé qui sépare le monde urbain et rural, élargissant davantage la fracture numérique du pays. En tout cas, les opérateurs investissent fortement dans les infrastructures. Ce sont quelques 10 MMDH qui sont misés chaque année pour renforcer les infrastructures

Le constat alarmant de la Cour des comptes
Cependant, les dernières observations de la Cour des comptes, relatives au développement digital au Maroc, soulignent que les stratégies nationales pour stimuler le développement numérique «n’ont pas atteint les résultats escomptés», soulignant notamment que le plan Maroc numérique 2020 n’a pas été déployé. La Cour explique ce déficit par la «non-implication suffisante des acteurs publics et privés concernés», ainsi que par les retards financiers dus à l’insuffisance des ressources des fonds spéciaux du Trésor, dont le Fonds du service universel des télécommunications. Dans son rapport, la Cour des comptes rappelle que la fracture numérique constitue un défi majeur pour le développement nécessaire de connectivité et plaide pour l’adoption d’une stratégie nationale afin de libérer le potentiel du numérique.

«Cette fracture numérique est de nature à entrainer un impact négatif sur le développement du Maroc», estime la secrétaire générale d’Orange.

D’où le risque d’une marginalisation sociale et économique des personnes qui n’ont pas accès aux technologies numériques. Or, le potentiel du pays est intéressant en la matière. Le Nouveau modèle de développement a effectivement fixé un objectif de 100% de taux de pénétration de la population d’ici 2030. «Il s’agit là d’un enjeu important qui ne peut être atteint qu’avec un écosystème public et privé fort, qui regarde dans la même direction, avec une stratégie du digital qui ne devrait pas tarder à être annoncée», constate la secrétaire générale d’Orange Maroc qui estime que chacun doit jouer son rôle en termes d’infrastructures, d’équipements…Le Maroc gagnerait à accélérer la cadence pour gagner davantage en croissance.

«Quand on développe le très haut débit de 10% en matière de taux de pénétration, on gagne mécaniquement 1 point de PIB», relève Ahmed Khaouja, expert de l’UIT, se basant sur les chiffre de la Banque mondiale.

Justement au niveau de la BM, la société financière internationale (IFC), son bras armé, se focalise sur quatre angles essentiels. Il y a d’abord l’entrepreneuriat digital, tout ce qui tourne autour de l’innovation, l’infrastructure digitale et enfin le capital humain. «L’idée est de savoir comment permettre aux gens d’accéder à l’inclusion numérique, mais aussi de développer les talents au niveau du digital», souligne Ghita Hannane, responsable Maroc de L’IFC. Et puis, le dernier volet est celui du digital, qui est un facteur d’inclusion financière. «Nous couvrons donc le volet FinTech.», conclut-elle.

Ahmed Ibn Abdeljalil / Les Inspirations ÉCO


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