Haut-Atlas : le séisme a aggravé la vulnérabilité des zones sinistrées
Pauvreté multidimensionnelle, exposition à plus de vulnérabilité et taux d’activité économique… le séisme qui a ravagé le Haut-Atlas a exacerbé les inégalités socioéconomiques dans quatre régions déjà vulnérables du fait de leur topographie majoritairement montagneuse, selon le profil sociodémographique de la zone sinistrée, réalisé par le HCP.
Le séisme qui a frappé cinq provinces et une préfecture du Royaume a, avant tout, entraîné des pertes humaines et matérielles. Il a également exacerbé les inégalités socioéconomiques dans quatre régions déjà vulnérables en raison de leur topographie majoritairement montagneuse (Haut-Atlas). Il s’agit des régions de Marrakech-Safi, Drâa-Tafilalet, Souss-Massa et Béni Mellal-Khénifra. C’est l’une des leçons à tirer du profil sociodémographique de la zone sinistrée, réalisé par le HCP. Au total, cette zone englobant 169 communes sinistrées abritait une population de plus de 2,4 millions d’habitants, répartis dans 475.928 ménages.
Le taux de pauvreté monétaire deux fois supérieur à la moyenne
En considérant l’ensemble de la zone exposée au séisme, la moyenne du taux de pauvreté monétaire atteint 8%, ce qui est supérieur à deux fois le taux national (4,8%). Ce constat révèle que les provinces comprises dans la zone géographique du séisme connaissent une situation économique plus précaire que la moyenne nationale.
Par contre, la pauvreté monétaire à l’échelle nationale a connu une baisse importante, de 14,2% en 2004 à 4,8% en 2014 pour s’établir à 1,7% en 2020. Notons que des disparités persistent même au sein des territoires précités puisque les taux de pauvreté monétaire varient considérablement d’une province à l’autre au sein de la zone sinistrée.
Dans le détail, la province d’Azilal présente le taux le plus élevé (20,7%), ce qui est plus de quatre fois supérieur au taux national. La province de Taroudant enregistre également un taux élevé (9,6%), suivie de près par Ouarzazate (8,6%), tandis que Chichaoua, Al Haouz et Marrakech affichent des taux respectifs de 7,1%, 5,5% et 1%. S’agissant du taux de pauvreté multidimensionnelle, qui tient compte de plusieurs dimensions de la privation au-delà de la seule dimension monétaire, le profil sociodémographique de la zone sinistrée démontre que ce taux varie significativement à l’instar de la pauvreté monétaire entre les provinces de la zone sinistrée.
Taux de vulnérabilité : une moyenne dépassant le taux national
Dans ce sens, c’est également la province d’Azilal qui présente le taux le plus élevé de pauvreté multidimensionnelle (28,8%), tandis que Marrakech affiche le taux le plus bas, à seulement 2,8%. Ces chiffres témoignent d’une diversité considérable en termes de privation dans les différents territoires de la zone. Les indicateurs de pauvreté multidimensionnelle incluent des aspects tels que l’accès à l’éducation, à la santé, à l’eau potable, au logement, entre autres. Ainsi, une province avec un faible taux de pauvreté monétaire peut néanmoins présenter un taux élevé de pauvreté multidimensionnelle, soulignant l’importance de cette mesure plus complète de la privation.
À cet égard, en se référant à l’ensemble de la zone sinistrée, la moyenne du taux de pauvreté multidimensionnelle a atteint 18,5%, ce qui est nettement supérieur au taux national du Maroc, qui est de 8,2%. De même, la moyenne du taux de vulnérabilité pour la zone sinistrée est de 21,5% dépassant également le taux national qui est de 12,6%. Ces résultats indiquent que, dans l’ensemble, les provinces de cette zone géographique sont confrontées à une plus grande privation multidimensionnelle et à un risque accru de vulnérabilité par rapport à la moyenne nationale. Concernant le taux de vulnérabilité, qui mesure la propension des individus à tomber dans la pauvreté en cas de choc socioéconomique, de catastrophe ou de crise, les disparités entre les provinces sinistrées restent importantes.
La province d’Azilal affiche le taux de vulnérabilité le plus élevé, à 25%, suivie de près par Chichaoua avec 22,9%. Marrakech présente le taux de vulnérabilité le plus bas, à seulement 5%. La vulnérabilité peut être influencée par divers facteurs, tels que la stabilité de l’emploi, la sécurité sociale, ou encore la résilience aux chocs économiques. Les provinces avec des taux de vulnérabilité élevés nécessitent une attention particulière pour mettre en place des filets de sécurité sociale et des politiques de protection économique selon les conclusions du HCP.
Activité économique : des disparités significatives
En ce qui concerne l’activité économique, le taux d’activité de la zone sinistrée s’élève à 45,6%. Bien que ce chiffre soit légèrement inférieur à la moyenne nationale (47,6%), il convient de noter que les zones sinistrées englobent des provinces qui connaissent des niveaux variés d’activité économique. Par milieu de résidence, le taux d’activité des provinces sinistrées en milieu urbain est de 48,3% contre 49,1% au niveau national.
Pour le milieu rural, le taux est de 43,7% contre 45,1% au niveau national. Les provinces endommagées présentent des taux d’activité variant de 41,3% à 50%. Marrakech affiche le taux d’activité le plus élevé, tandis que Taroudant présente celui le plus bas. Par milieu de résidence, avec un taux de 39,9%, Azilal enregistre le taux d’activité le plus bas, alors que Marrakech se positionne toujours en tête des zones sinistrées en matière d’activité. Pour le milieu rural, et à l’exception de Marrakech (47,7%) et Al Haouz (45,6%), toutes les provinces affichent un taux d’activité inférieur à celui national.
Dans l’ensemble de la zone sinistrée, le taux d’activité des hommes est substantiellement plus élevé que celui des femmes, illustrant des inégalités persistantes sur le marché du travail. Les femmes affichent un taux d’activité de seulement 16,5%, alors que les hommes atteignent 76,2%. En se penchant sur les communes sinistrées, force est de constater que l’analyse de ce taux d’activité révèle des disparités significatives qui peuvent influencer les niveaux de vie et la qualité de vie des habitants de ces communes.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO