Maroc

Gestion des catastrophes naturelles : l’IRES pointe du doigt la gouvernance publique

Plusieurs lacunes entravent la gestion efficace des catastrophes naturelles dans notre pays. Il est non seulement question de gestion mais également d’anticipation. C’est ce qui ressort du dernier rapport de l’Institut royal des études stratégiques (IRES). Le document propose, entre autres, des orientations stratégiques en matière de prévention.

Quelles sont les lacunes qui empêchent la bonne gestion des catastrophes naturelles ? Quels sont les dispositifs juridiques et institutionnels mis en place pour la gestion des crises naturelles ? Et qu’en est-il des politiques publiques adoptées ? Autant de questions qui se posent après le séisme du 8 septembre dernier et le lourd bilan matériel et humain qui en a découlé.

Planification territoriale déficiente
Dans son rapport, l’IRES constate que, lors du séisme d’Al Haouz, l’action des acteurs institutionnels et non institutionnels a été freinée dans un contexte d’urgence par «une planification territoriale des risques et de gestion de crise déficiente dans les zones rurales et isolées». Une situation qui a levé le voile sur plusieurs lacunes auxquelles il est urgent de remédier afin d’éviter le pire en cas de survenance d’une autre crise.

Parmi ces lacunes, le rapport déplore, notamment, l’absence de scénarios de coordination entre les intervenants, étudiés à l’avance, l’absence de plans locaux de prévention des risques de catastrophes spécifiques aux zones touchées et un déficit de moyens disponibles dans les communes et les douars isolés touchés pour la gestion des catastrophes. A cela s’ajoutent l’absence d’accès d’urgence aux sites touchés ainsi qu’une lente mobilisation des secours locaux et le manque de systèmes d’information géographiques précis. Sans oublier un défaut d’optimisation des secours aux victimes (aides en doublons, aides de première urgence mal ciblées, défaillances et lenteurs de définition des critères d’octroi de l’aide mobilisée, aides détournées), ainsi qu’un déficit de sensibilisation, d’éducation et de formation des acteurs locaux à la prévention aux risques des catastrophes.

L’Institut royal estime notamment que ces manquements établis à la suite de l’expérience du séisme de la région d’Al Haouz «mettent en perspective des enjeux d’ordre plus général et à caractère structurel, à savoir l’importance de la science et de la connaissance en matière de prévention et de gestion des risques des catastrophes naturelles».

Un cadre financier en mutation
Selon le dernier rapport publié par l’IRES, le cadre financier relatif à l’anticipation et la gestion des risques de catastrophes naturelles est toujours en voie d’évolution. Concrètement, plusieurs dispositifs financiers dédiés sont déjà mis en place. Il s’agit notamment du Fonds de lutte contre les effets des catastrophes naturelles (FLCN) institué par la Loi de finances de 2009. Ce fonds concerne la gestion des aléas des inondations, des crues torrentielles, des séismes, des chutes de pierres et de blocs, des glissements de terrains, des phénomènes d’érosions du littoral et des tsunamis.

Pour sa part, le Fonds de solidarité contre les évènements catastrophiques, créé en 2019, dédommage les victimes non assurées ou insuffisamment assurées. Il est constitué en établissement public doté d’un conseil d’administration présidé par le Chef du gouvernement.

En outre, et en complément des fonds publics, la loi oblige d’intégrer le risque catastrophique dans les contrats d’assurance des particuliers (contrats couvrant les biens et ceux couvrant les dommages). Le rapport de l’IRES souligne que «la gestion des risques des catastrophes naturelles exige des moyens très importants, qui le plus souvent dépassent les moyens du pays concerné». Il préconise qu’«au niveau international, les acteurs nationaux peuvent s’appuyer sur les mécanismes de la coopération internationale».

Un cadre juridico-institutionnel à parfaire
En matière de gestion et d’anticipation des catastrophes naturelles, le Royaume dispose d’un cadre juridique et institutionnel qui s’est considérablement renforcé lors des dernières décennies. On peut citer, notamment, l’élaboration de la Stratégie nationale de gestion des risques des catastrophes naturelles 2020-2030, le plan «Vigisrisque» destiné à renforcer l’anticipation des inondations et leur gestion intégrée, le Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation (PNAEPI) 2020-2027, les Plans nationaux d’urgence (PNU) ainsi que les Plans nationaux de sauvetage en mer en cas de fuite de produits dangereux et de pollution maritime.

Le rapport de l’IRES indique que ce cadre juridico-institutionnel doit encore évoluer de manière à répondre à tous les paramètres de la gestion et de l’anticipation des crises naturelles. Il propose, notamment, une gamme d’orientations stratégiques pour une meilleure gouvernance de ces crises.

Des orientations stratégiques à trois niveaux
Ces propositions et orientations stratégiques se conçoivent en trois niveaux d’analyse : la gouvernance globale, l’anticipation et la prévention, et la résilience. L’Institut royal des études stratégiques propose, notamment, de développer une gouvernance institutionnelle globale, structurante et prospective des risques de catastrophes. Il préconise aussi de mener des approches stratégiques de la résilience «multirisques et multi-crises» intégrées aux politiques publiques au niveau national et local. Comme il incite à intégrer la connaissance, le savoir et la culture du risque dans les valeurs sociales et culturelles de prévention et de résilience sociétales selon les axes suivants.

Le rapport met aussi l’accent sur la nécessité de développer une culture d’anticipation des risques de catastrophes au niveau national et local en encourageant en priorité l’intégration des connaissances prospectives dans les politiques publiques, la formation à la prospective des risques des catastrophes naturelles, l’adoption de technologies innovantes en matière de prévention et d’alerte des risques : technologies spatiales, robotique et technologies intelligentes, réseaux sociaux, Intelligence data, Intelligence artificielle, ainsi que le renforcement des capacités d’analyse stratégique, de veille et de prospective au niveau national et local, appliquées à la gestion des risques de catastrophes.

Ahmed Ibn Abdeljalil / Les Inspirations ÉCO


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