Maroc

Filière bovine : des défis majeurs à relever

En plus de l’amélioration du taux d’encadrement des éleveurs, le système d’élevage marocain doit faire appel à une sélection génétique adaptée aux conditions locales, et renforcer ses outils de contrôle et d’évaluation.

Avec 780.000 éleveurs de bovins, dont 400.000 producteurs laitiers et 380.000 éleveurs ‘’traditionnels’’, la filière bovine au Maroc doit encore relever le défi de l’encadrement des éleveurs conformément aux perspectives d’évolution de la nouvelle stratégie Green Génération 2020-2030. Une condition sine qua non, estiment les participants à la «3e Journée maroco-allemande des bovins» initiée sous forme de webinaire, jeudi, par le ministère fédéral de l’Alimentation et de l’agriculture allemand en collaboration avec le Centre de conseil agricole maroco-allemand (CECAMA) pour le développement de la filière élevage au Maroc. Actuellement, ce taux d’encadrement est fixé à 60%. «Le rôle des interprofessions, notamment Maroc Lait et la Fédération interprofessionnelle des viandes rouges (FIVIAR), sera primordial pour améliorer ce taux dans le cadre de leurs contrats-programmes. À moyen et long terme, relever ce challenge passe également par l’accompagnement des jeunes éleveurs afin qu’ils prennent la relève à travers un transfert générationnel et un accompagnement sur le plan de la formation et la mise à niveau de leurs structures de production, explique Khalid Boukhari, de la Direction du développement des filières de production, relevant de la Division des filières animales du ministère de tutelle.

Identification et traçabilité : l’ONSSA transfère son activité
En chiffres, la filière bovine au Maroc est constituée au total de 3,5 millions de têtes. Elle produit l’équivalent de 2,55 milliards de litres de lait, soit un chiffre d’affaire global de l’ordre de 9,1 MMDH, en plus de 603.000 tonnes de viandes rouges avec un chiffre d’affaires de 26 MMDH, d’où la dimension centrale de cette filière dans les politiques agricoles au Maroc. Dans le but d’assurer le suivi des bovins, ovins et caprins durant toutes les étapes de leur vie, la Fondation nationale pour l’identification et la traçabilité animale TARKIM a été créée. L’objectif de ce levier de la nouvelle stratégie est le renforcement du contrôle sanitaire et le suivi technique du cheptel. Dans ce sens, le Système national d’identification et de traçabilité animale (SNIT) assurera l’ossature de tout le programme de traçabilité au Maroc. Le transfert de l’activité d’identification et de traçabilité animale a d’ores et déjà été effectué par l’ONSSA par l’arrêté du ministre de l‘Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts n° 1601-20 du 20 juin 2020 (BO 6922). «Les activités d’identification et d’enregistrement des mouvements des animaux, dont la production est destinée à la consommation humaine, entrant dans la mission prévue au point 3 de l’article 2 de la loi susvisée n°25-08, sont déléguées, sous le contrôle de l’ONSSA, à des organismes publics ou à des personnes morales de droit privé qu’il a agréés à cet effet», note le premier article de l’arrêté du ministre de l‘Agriculture.

Insémination artificielle : un arrêté en cours d’approbation
Un autre arrêté, en cours d’approbation, sera prochainement publié au Bulletin officiel, selon Khalid Boukhari, pour mettre de l’ordre sur le plan de l’insémination artificielle. Ce nouveau texte réglementaire devra définir les modalités et les champs d’intervention de l’ensemble des parties prenantes qui travaillent autour de cette activité. À noter que l’amélioration génétique des bovins est essentiellement axée sur l’importation de bovins reproducteurs de races pures, en plus de l’insémination artificielle et l’importation de semences bovines. Sur ce dernier point, un code de procédures pour l’importation de ces semences congelées n° 51 DDFP du 5 février 2013 a déjà été établi. Il a été modifié et complété par l’avenant n°1 du 18 septembre 2019 pour les semences congelées de taureaux de races pures. Par ailleurs, le développement d’une stratégie d’amélioration génétique de la filière laitière ne peut, selon le professeur Aziz Tijani du laboratoire de génétique et d’amélioration animale relevant de l’École nationale d’agriculture de Meknès, se faire sans la collaboration d’un pays qui bénéficie d’avancées en génétique laitière, notamment l’Allemagne concernant les programmes de sélection et l’expérience dans le génotypage de masse.

La stratégie actuelle présente des limites
La stratégie actuelle reste limitée selon l’expert. «Cette stratégie permet d’améliorer la production à travers l’augmentation des effectifs de vaches, et non pas la productivité» constate-il. Selon le professeur Aziz Tijani, «le renforcement de la stratégie actuelle doit être basé sur une sélection génétique adaptée aux conditions d’élevage marocain. Autrement dit, il faut avoir un programme de sélection nationale selon les normes internationales». Pour ce faire, la filière bovine au Maroc doit prendre en considération la question d’adaptation des profils génétiques à l’environnement où ils sont placés», estime-t-il. Avant d’ajouter que «l’importation doit continuer dans des conditions bénéfiques pour le Maroc, à travers l’évaluation de cette adaptation, en plus du choix de races dans les différentes zones et de la définition de la rentabilité de la vache marocaine selon chaque race dans le système d’élevage marocain. Parallèlement, il faut renforcer les outils de contrôle. Actuellement, le Maroc ne dispose pas, selon le professeur, de méthode de sélection génétique et d’un système d’évaluation génétique. De plus, le contrôle laitier doit aussi être agréé, surtout pour les exportations qui sont conditionnées par des normes. À noter que le contrôle laitier est limité à deux aspects seulement, la quantité du lait et le taux de matière grasse, d’où la nécessité d’intégrer d’autres paramètres.

Yassine Saber / Les Inspirations Éco



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