Emploi : que veulent vraiment les talents ?
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Dans un marché du travail en perpétuelle mutation, les attentes des candidats et collaborateurs ne cessent d’évoluer. Transparence, flexibilité, reconnaissance… les entreprises marocaines sont-elles à la hauteur ? Une enquête récente révèle un écart frappant entre les discours corporate et l’expérience vécue sur le terrain.
«Les entreprises affichent fièrement leurs certifications et labels employeurs, mais derrière cette façade, se cache parfois une tout autre réalité». C’est le constat sans appel qui se dégage de la récente Enquête 2025 de Panorama RH. Si les discours des employeurs mettent en avant des environnements de travail bienveillants et des opportunités d’évolution, la perception des talents vient souvent les contredire.
Entre des processus de recrutement jugés trop longs et opaques (61% des candidats s’en plaignent), un manque de reconnaissance une fois en poste (45% des collaborateurs déclarent une expérience négative) et une déconnexion flagrante entre les valeurs affichées et la culture réelle de l’entreprise, l’étude met en lumière une tension croissante entre les aspirations des salariés et la réalité du monde professionnel.
Quand le parcours du candidat devient un parcours du combattant
Chercher un emploi devrait être une expérience stimulante, marquée par des échanges constructifs et une vision claire des opportunités offertes. Pourtant, pour une large majorité des talents interrogés, la réalité est tout autre. 70% d’entre eux déclarent que leur expérience de recrutement influence leur décision d’accepter ou de refuser une offre.
L’opacité autour des salaires, citée comme la principale source d’insatisfaction, reste un problème récurrent. Une meilleure transparence sur la rémunération et les avantages sociaux arrive en tête des axes d’amélioration souhaités par les candidats. Le processus de recrutement lui-même est perçu comme un obstacle.
En moyenne, les candidats attribuent une note de seulement 1,83/5 à la réactivité des entreprises après un entretien. L’attente prolongée, l’absence de retour et le manque de clarté dans les critères de sélection génèrent frustration et méfiance. Résultat, 65% des candidats ayant vécu une expérience négative se disent prêts à déconseiller l’entreprise à leur entourage.
Dans un contexte où la marque employeur se joue autant sur les plateformes d’avis que dans les campagnes de communication, ces mauvais retours ne sont pas anodins. 72% des candidats affirment être prêts à partager publiquement leur expérience, qu’elle soit positive ou négative. Pour les entreprises, il ne s’agit donc plus seulement de bien recruter, mais aussi d’offrir un processus de sélection respectueux et transparent, sous peine d’écorner leur image de manière durable.
Une réalité parfois bien différente des promesses
Si l’expérience candidat est un premier révélateur des pratiques RH, l’expérience collaborateur vient confirmer – ou infirmer – l’image qu’une entreprise projette d’elle-même. L’enquête montre que l’insatisfaction ne s’arrête pas une fois le contrat signé. 45% des collaborateurs interrogés jugent leur expérience en entreprise négative.
Le manque de reconnaissance est l’un des griefs les plus fréquemment cités. Alors que l’alignement des valeurs avec l’entreprise est un critère clé pour 60% des talents, beaucoup déplorent un décalage entre le discours corporate et les pratiques internes.
De même, si les opportunités de développement professionnel figurent parmi les trois attentes principales des salariés, elles restent insuffisamment prises en compte. La qualité de vie au travail est un autre point de friction majeur. Un équilibre vie professionnelle/vie personnelle respecté est jugé essentiel par 68% des répondants, mais peu d’entreprises en font une réelle priorité. L’étude révèle aussi une forte attente autour de plus de transparence et d’un accès facilité à l’information, cités parmi les axes d’amélioration prioritaires.
Dans un contexte où 62,3% des collaborateurs se disent prêts à partager publiquement leur expérience en entreprise, il devient évident que le discours employeur ne suffit plus. Une politique RH inadaptée ne se cache plus derrière un label ou un prix, elle se dévoile à travers les témoignages des employés.
L’heure de vérité pour les employeurs
La question qui se pose alors est celle de la sincérité des labels et distinctions que s’attribuent certaines entreprises. Sont-ils le reflet d’un véritable changement ou ne servent-ils qu’à masquer des dysfonctionnements structurels ? L’enquête de Panorama RH laisse peu de place au doute, les talents ne sont plus dupes. Dans un marché du travail de plus en plus concurrentiel, il ne suffit plus d’afficher de belles valeurs sur un site Internet ou d’organiser des événements corporate pour fidéliser ses employés.
Aujourd’hui, la véritable marque employeur ne se construit pas par des campagnes de communication, mais par l’expérience authentique vécue au sein des entreprises. Celles qui ont compris cette réalité ont une longueur d’avance, les autres risquent de voir leur attractivité s’éroder, à mesure que les candidats et collaborateurs exigent plus de cohérence entre discours et actions.
À l’ère de la transparence et du partage instantané des expériences, les employeurs n’ont plus d’autre choix que de transformer en profondeur leurs pratiques s’ils veulent véritablement attirer et retenir les talents.
Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO