Emploi : comment améliorer les conditions de travail dans ces secteurs d’activité
Oxfam s’attaque au travail dans les emplois récemment qualifiés d’atypiques. Dans le cadre de la célébration de la fête du travail, l’ONG vient de publier un plaidoyer visant à améliorer les conditions de travail des agents de gardiennage et des employés de nettoyage, des métiers où les professionnels sont les plus touchés par la précarité de l’emploi et la dureté des conditions de travail. Détails sur le diagnostic et la thérapie à appliquer.
L’ONG Oxfam vole au secours des agents de gardiennage et des employés de nettoyage. Dans un plaidoyer qu’elle vient de publier, dans le cadre de la célébration de la fête du travail, Oxfam relève que ces professionnels sont les plus touchés par la précarité de l’emploi et la dureté des conditions de travail, et qu’il faut lever rapidement ces dysfonctionnement pour leur offrir un travail décent et durable.
En tous cas, son diagnostic est implacable ! Par exemple, dans le gardiennage, l’ONG note que le travail des agents de sécurité nécessite souvent le dépassement des horaires de travail réglementaires, mais sans aucun impact sur le salaire. En plus de la précarité et l’instabilité de leurs emplois, les agents de sécurité se trouvent souvent confrontés à un contact direct avec les citoyens et contraints de gérer des situations de crise ou de colère en cas d’insatisfaction des usagers d’un service public, comme dans les services d’urgence des hôpitaux, par exemple.
De plus, son rôle est souvent élargi à d’autres tâches non prévues dans sa fiche de poste, puisqu’en plus de surveiller l’accès et de contrôler les allées et venues des personnes, il est souvent appelé à remplir également les tâches de coursier, d’agent d’accueil, voire même de facilitateur.
Diminuer le recours intensif à la sous-traitance…
Bref, les agents de gardiennage sont mobilisés, pratiquement tous les jours de la semaine, parfois 24/24h, y compris les weekends et jours fériés, sans pour autant prétendre aux indemnités légales relatives aux heures de travail supplémentaires ou lors des jours fériés chômés. Ces catégories se trouvent également privées du droit au congé, sans oublier qu’il est très fréquent qu’ils ne bénéficient pas de couverture sociale ni d’assurance contre les accidents de travail.
Selon Oxfam, le secteur du nettoyage ne se porte pas mieux! Les employés qui y exercent, travaillant pour le compte d’une société sous-traitante, voient souvent une partie de leur salaire prélevée par cette dernière. À ce propos, l’ONG révèle le témoignage d’une parlementaire de l’UMT qui affirme que «les femmes de ménage travaillant à la Chambre des conseillers touchent un salaire mensuel de 1.600 DH sachant que leur contrat indique une rémunération de 3.000 DH/mois.
D’autres employés de nettoyage, travaillant à mi-temps, ne perçoivent donc qu’un salaire de 800 DH/mois. Autre contrainte, ces employés peuvent parfois voir leurs journées de travail se prolonger, mais ils ne sont rémunérés que sur la base de leurs heures de travail contractuelles. Toujours à la Chambre des conseillers, «les femmes exerçant de 7h à 16h ont continué à travailler jusqu’à minuit lors des discussions sur le projet de loi de Finance, soit après la clôture desdites séances, pour le même salaire», révèle la sénatrice de l’UMT.
…Et en finir avec les contrats d’intérim
Ces femmes sont souvent engagées par des entreprises sous-traitantes via un contrat d’intérim et sont rarement couvertes par les mécanismes de protection sociale. En effet, les sociétés prestataires leur font signer des contrats de six mois à répétition. En cas de contestation de leurs conditions, ils peuvent se retrouver en situation d’arrêt de travail sans aucune visibilité de reprise.
De toute façon, la dimension précaire de leur contrat de travail réduit considérablement leurs capacités de mobilisation et de contestation. Les syndicats des travailleurs sont conscients de tous ces dysfonctionnements. Afin d’intégrer ces emploi, qualifiés récemment d’atypiques dans le marché du travail, d’instaurer la mobilité interprofessionnelle, d’élever le niveau de rémunération, de garantir les droits aux prestations de sécurité sociale, l’accès à la formation, à la protection en matière de sécurité et de santé au travail, la capacité à exercer ses droits en matière de liberté syndicale et de négociation collective…, l’ONG Oxyfam propose 13 mesures.
Parmi elles, on peut citer : le fait d’encourager les entreprises à développer et offrir des formations sur mesure aux agents affiliés à leurs structures ; d’encourager le droit conventionnel (les conventions collectives sectorielles) pour pallier les insuffisances et les spécificités des métiers atypiques ; ou encore de contraindre les preneurs d’ordre à présenter des justificatifs d’affiliation des employés à la CNSS et de vérifier tous les documents requis à la conduite du service dans les meilleures conditions permettant d’assurer la stabilité de ces travailleurs (Voir encadré).
Les propositions d’Oxfam
Oxfam propose 13 mesures pour améliorer les conditions de travail dans le gardiennage et le nettoyage à savoir : contourner les lacunes de la législation et adopter des dispositifs juridiques spécifiques propices à chaque profession relevant de l’emploi atypique
- contraindre les preneurs d’ordre à présenter des justificatifs d’affiliation des employés à la CNSS et vérifier tous les documents requis à la conduite du service dans les meilleures conditions afin d’assurer la stabilité de ces travailleurs ; accentuer le contrôle de l’État afin de veiller au respect de la réglementation, notamment pour les heures de travail et la protection sociale ; organiser la passation des marchés de manière à garantir la régularisation des salaires des agents, charges sociales, assurances… (ex: renforcer la protection sociale en abaissant les seuils sur la durée horaire minimale, mettre fin à la rigidité de l’application du principe du moins disant dans toutes les circonstances permettant aux entreprises d’en tirer bénéfice sur la base des fractions déductibles des salaires des agents
- conditionner les marchés publics au respect d’un cahier des charges exhaustif assurant la dignité de ces travailleurs ; intensifier, à travers les institutions de tutelle, les campagnes de contrôle par les inspecteurs du travail ; opter, dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises, pour des contrats permanents car la sécurité de l’emploi offre un avantage compétitif important et augmente la productivité ; réaliser des enquêtes de satisfaction auprès du public dans les secteurs de la santé et de l’éducation afin d’améliorer la qualité du service rendu, notamment par les entreprises et les établissements publics concernés ; encourager le droit conventionnel (les conventions collectives sectorielles) pour pallier les insuffisances et les spécificités des métiers atypiques ; sensibiliser les travailleurs occupant un emploi atypique sur leurs droits
- Mettre en place des cellules d’écoute des doléances d’agents de gardiennage et de nettoyage victimes d’exploitations dégradantes ; encourager les entreprises à développer et offrir des formations sur mesure aux agents affiliés à leurs structures ; et enfin professionnaliser et hybrider le métier à travers la formation continue et la valorisation des tâches avec l’usage, par exemple, de la vidéosurveillance.
Aziz Diouf / Les Inspirations ÉCO