Maroc

Documents de recherche : BAM décortique les dynamiques de l’inflation

À travers un document de travail édité par Bank Al Maghrib qui a analysé les déterminants de l’inflation au Maroc durant la dernière décennie, le rôle des facteurs externes s’est considérablement consolidé dans le sillage de l’accélération de l’intégration du Maroc à l’économie mondiale. La demande domestique impacte de plus en plus faiblement l’évolution de l’inflation, alors que la dynamique des poussées inflationnistes est essentiellement influencée par son passé. 

Les dés sont déjà jetés par Bank Al-Maghrib. L’envolée de l’inflation qui donne des sueurs froides à la sphère économique et sociale, se situerait à 3,9% en moyenne en 2023 avant d’enregistrer un nouveau rebond en 2024 à 4,2%. Et ce, en lien avec la décompensation programmée des prix des produits subventionnés alors qu’en 2022, l’inflation devrait ressortir à 6,6% après 1,4% en 2021, tirée essentiellement par l’accélération de la hausse des prix des produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. Pour mieux analyser la question de la hausse généralisée des prix, la Banque centrale a publié un rapport plus approfondi sur les contributions des facteurs domestiques et externes à la dynamique de l’inflation au Maroc. Selon le document, les résultats des travaux empiriques confirment déjà la prédominance du rôle des facteurs externes pour expliquer la dynamique de l’inflation, notamment durant les dernières années.

Dans ce sens, le rôle croissant des facteurs externes dans la dynamique de l’inflation est principalement dû, selon la même source, à l’intégration économique et commerciale de plus en plus importante des pays, en raison d’un côté, de l’augmentation de la part des produits importés dans le panier de consommation des ménages, et de l’autre côté, de la forte dépendance des prix domestiques à l’évolution de la demande étrangère. En outre, le développement des chaînes de valeur mondiales a favorisé une plus grande concurrence par les prix et une pression à la baisse sur les marges bénéficiaires des entreprises.

Pour le Maroc, le pays a connu, depuis la crise financière internationale de 2007, une période prolongée d’inflation modérée, accompagnée d’une atonie de l’activité économique et d’une baisse des taux d’intérêt. Mais à partir de l’année 2022, cette tendance a commencé à s’inverser et l’inflation affiche une hausse continue dans un contexte de fortes pressions sur les prix des matières premières et de tensions géopolitiques au niveau mondial.

Les résultats de l’étude
En remontant l’analyse plus loin, l’inflation au Maroc a globalement affiché, au cours des trois dernières décennies un profil modéré et stable selon l’étude en question. Les années 1990 marque le début de cette tendance avec un taux d’inflation qui est revenu d’une moyenne de 6,2% à 1,6% sur la période 1996-2005. Une certaine hausse a été observée entre 2006 et 2008 à cause du renchérissement des prix des matières premières, mais un retour à un taux moyen de 1,1% a été effectué à partir de 2009 dans un contexte post crise financière internationale. Cependant, les répercussions économiques de la pandémie de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine ont contribué à la hausse significative des prix, observée à partir de fin 2021.

D’un point de vue analytique, les résultats de ce travail ont montré que la demande domestique impacte de plus en plus faiblement l’évolution de l’inflation, alors que la dynamique de l’inflation est essentiellement influencée par son passé. Dans le sillage de l’accélération de l’intégration du Maroc à l’économie mondiale, le rôle des facteurs externes s’est considérablement consolidé, eu égard aux mutations qu’a connu le cadre de politique monétaire. Les anticipations d’inflation sont de plus en plus influentes.

Dans ce sens, la courbe de Phillips qui analyse la dynamique de l’inflation en fonction de l’activité économique, l’inflation passée et les anticipations d’inflation, a connu un léger aplatissement au Maroc durant la période post crise financière de 2008. Cet aplatissement est principalement dû à la prédominance de l’inflation importée dans la formation des prix en lien avec la persistance de la dépendance énergétique, l’accélération de l’insertion du Maroc à l’économie mondiale, la libéralisation progressive des prix des produits administrés et la réforme de la caisse de compensation.

Une inflation modérée jusqu’en 2019
Les facteurs externes, de nature désinflationniste, ont contribué à maintenir une inflation modérée jusqu’en 2019. L’étude susmentionnée renseigne que les modèles ont été estimés sur des données trimestrielles allant de 2006 à 2019 alors que la période 2020-2022 a été exclue à cause de son caractère exceptionnel qui risque d’impacter les résultats nécessitant une modélisation spécifique pour prendre en considération notamment les perturbations des chaînes de valeur mondiales et le renchérissement du coût du fret maritime. La prépondérance des facteurs externes est ainsi en ligne avec l’accélération de l’insertion du Maroc à l’économie mondiale.

Cette influence s’exerce à travers différents canaux dont principalement l’ancrage du dirham sur l’euro, l’ouverture commerciale et l’assouplissement des restrictions sur les flux de capitaux. Aussi, le modèle VAR structurel avec restrictions des signes (SRVARs) a confirmé les résultats de la courbe de Phillips au vu de la prédominance des chocs d’offre domestique et d’inflation importée ainsi que la modération de l’influence des chocs de demande. Les résultats ont également mis la lumière sur la contribution significative des chocs de politique monétaire et des anticipations de l’inflation.

En dépit d’un environnement macro-financier qui reste marqué par un certain nombre de contraintes structurelles, les réformes entreprises commencent à apporter leurs effets, selon le rapport de BAM. Lesdites réformes visent à préserver la soutenabilité des équilibres budgétaires et à renforcer le rôle de la politique monétaire à travers un cadre analytique plus exhaustif et les perspectives d’adoption du ciblage d’inflation dès lors que le taux de change ne constituera plus l’ancre nominal.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO


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