Dispositifs médicaux : le Maroc voit grand
Le Medical Device Day a rassemblé acteurs publics et privés pour définir une stratégie visant à doubler l’intégration locale, réduire la dépendance aux importations (90% actuellement) et transformer le Royaume en hub régional, soutenu par un partenariat académique fort.
Le Maroc ambitionne de renforcer sa souveraineté sanitaire en développant son industrie des dispositifs médicaux. C’est ce qui ressort de la première édition du Medical Device Day (MDD), organisée cette semaine à Rabat par la Fédération marocaine des industries de la santé (FMIS).
Cette rencontre sectorielle a réuni les principaux acteurs publics et privés autour d’une vision commune, qui est de renforcer l’industrialisation locale et promouvoir la souveraineté sanitaire nationale.
Opportunité stratégique
Le secteur des dispositifs médicaux est considéré comme un pilier essentiel pour atteindre la souveraineté industrielle et sanitaire du Maroc. Bien que le processus pour atteindre l’autosuffisance dans le Royaume soit relativement récent, le pays dispose d’un marché en forte croissance soutenu par plusieurs facteurs clés.
Parmi ceux-ci figurent la généralisation de l’Assurance maladie obligatoire (AMO) et le développement continu des infrastructures hospitalières. Ces éléments contribuent à stimuler la demande pour des produits locaux innovants et adaptés aux besoins spécifiques du pays.
Dans un discours lu en son nom par son chef de cabinet, Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie, a mis en avant les avancées significatives réalisées dans la structuration du secteur, notamment grâce à la mise en place de clusters régionaux et à la création de la FMIS.
Dans cette optique, il a rappelé les efforts entrepris dans le cadre de la politique de substitution aux importations, avec plusieurs projets en cours visant à réduire la dépendance externe. Ces initiatives illustrent, selon lui, l’engagement du gouvernement à transformer le Maroc en un hub régional pour la production de dispositifs médicaux.
90% de la demande nationale est satisfaite par des produits importés
Mehdi Tazi, vice-président général de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), a quant à lui présenté un panorama chiffré. En 2024, le chiffre d’affaires généré par les industries liées aux dispositifs médicaux s’élève à 7 MMDH, employant environ 4.000 personnes, ce qui témoigne de l’importance grandissante de ce secteur pour l’économie nationale.
Le vice-président du patronat s’est également projeté sur les principaux défis à moyen terme. Il a ainsi relevé que l’insuffisance de la production locale demeurait un obstacle majeur, puisque plus de 90% de la demande est actuellement satisfaite par des produits importés.
En parallèle, l’accélération technologique impose aux entreprises locales de miser sur l’innovation pour rester compétitives. À cet égard, Mehdi Tazi a appelé à tirer parti des nouvelles technologies, notamment celles axées sur la médecine préventive, afin de moderniser le secteur et répondre aux attentes croissantes des patients.
Une stratégie pour doubler le taux d’intégration locale
De son côté, Naoufal Lahlou, président de la FMIS, a insisté sur le rôle capital d’une industrie médicale résiliente pour assurer la souveraineté sanitaire nationale.
Il a rappelé dans ce sens que la pandémie de covid-19 a permis au Maroc de prendre conscience des vulnérabilités inhérentes à une forte dépendance aux importations. Cette expérience a révélé la nécessité d’un approvisionnement local robuste et diversifié.
À travers le Medical Device Day, la FMIS ambitionnait de rassembler toutes les parties prenantes pour identifier les leviers d’industrialisation et définir une feuille de route ambitieuse. L’objectif, à terme, est de doubler le taux d’intégration locale et d’accroître significativement le nombre de ressources humaines qualifiées.
Un partenariat académique pour accompagner la transformation
L’École nationale supérieure des arts et métiers de Rabat (ENSAM), partenaire académique de cet événement, joue un rôle clé dans la formation des talents nécessaires à la réussite de cette ambition industrielle. Son directeur, Samir Belfkih, a souligné la responsabilité partagée entre les acteurs académiques, les institutions publiques et le secteur privé pour impulser le développement du Royaume.
À cet effet, il a mis en avant la création du Directoire consultatif industriel, un organe stratégique destiné à aligner les programmes de formation, de recherche et de développement sur les besoins réels du tissu industriel. Ce mécanisme constitue un véritable pont entre les mondes académique et socio-économique, facilitant ainsi les collaborations intersectorielles.
Le président de l’Université Mohammed V, Mohammed Rhachi, a également réaffirmé l’engagement du corps universitaire à soutenir la compétitivité de l’industrie médicale. Avec un vivier de 50.000 chercheurs prêts à accompagner ce secteur, l’université entend se positionner comme un partenaire de choix pour innover et relever les défis technologiques à venir.
Le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation a d’ailleurs alloué 200 MDH pour financer des projets scientifiques sur les quatre prochaines années, démontrant ainsi son soutien à long terme.
Vers une souveraineté vaccinale renforcée
La Chambre des conseillers a adopté à l’unanimité le projet de loi n° 61.24, visant à modifier le Code du médicament et de la pharmacie.
Ce texte législatif soutient l’ambition du Maroc de bâtir une industrie vaccinale nationale capable de répondre aux besoins locaux et ceux du continent, tout en assurant un strict contrôle qualité conforme aux normes internationales.
Il prévoit notamment une procédure de révision des données de production et des tests de chaque lot de vaccins avant leur mise sur le marché. Une étape clé pour asseoir la souveraineté sanitaire du Royaume.
Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO