Maroc

Délais de paiement : ce que dit le rapport du ministère

L’Observatoire des délais de paiement vient de publier son premier rapport annuel. Il en ressort que le Maroc est à la traine en matière de délais de paiement. Il reste du chemin à faire, surtout pour le privé, de sorte à enfin respecter les 60 jours fixés par la loi.

Du nouveau en matière de délais de paiement ! L’Observatoire des délais de paiement, relevant du ministère de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration, vient de publier son premier rapport annuel. Selon le département de Mohamed Benchâaboun, «la publication de ce rapport fait suite aux décisions prises lors des troisième et quatrième réunions de l’Observatoire des délais de paiement et conformément à l’article 8 du décret n°2-17-696 du 30 novembre 2017 fixant les modalités de fonctionnement et la composition de l’observatoire». Fruit d’une collaboration entre Bank Al-Maghrib (BAM), la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), la Trésorerie générale du royaume (TGR) et la Direction des entreprises publiques et de la privatisation (DEPP), ce rapport ambitionne de contribuer au renforcement de la transparence en matière de délais de paiement et, ainsi, de concourir à la consolidation de la confiance entre les opérateurs économiques.

Un rapport annuel pour instaurer la confiance
C’est une première expérience qui s’inscrit dans une démarche progressive et constructive interpellant les opérateurs publics et privés pour intensifier leurs efforts en vue d’une meilleure maîtrise de leurs processus de paiement. Et des efforts, il va en falloir encore plus puisqu’il ressort du document, qui a traité le sujet sur les années 2018 et 2019, que le Maroc n’est pas encore au niveau de cette réforme majeure qui vise l’amélioration du climat des affaires et la relance de l’économie nationale. En effet, si les indicateurs du secteur public sont globalement rassurants et s’inscrivent en droite ligne avec les engagements de l’argentier du royaume et la loi n°49-15 du 25 août 2016, modifiant et complétant la loi n°15-95 formant Code de commerce et édictant des dispositions particulières relatives aux délais de paiement (voir encadré), il n’en est pas de même pour le secteur privé, où les insuffisances d’application de la loi persistent. Le rapport indique, en effet, que le niveau des délais de paiement des entreprises privées demeure largement supérieur aux délais réglementaires.

Le secteur privé, un très mauvais élève
Les calculs effectués par BAM sur l’évolution des délais de paiement du secteur privé font ressortir, à fin 2018, une moyenne globale de 152 jours de chiffre d’affaires (JCA) pour les délais clients, et de 105 jours d’achat (JA) pour les délais fournisseurs, soit un dépassement de 45 jours par rapport au seuil réglementaire de 60 jours fixé par la loi. Dans ces conditions, le solde commercial des entreprises marocaines fait ressortir une position nette prêteuse avec une moyenne équivalant à 73 JCA, relève la même source. L’étude nous apprend également que plus de 40% des entreprises marocaines se font payer dans des délais supérieurs à 90 JCA et environ un quart d’entre elles règlent leurs fournisseurs au-delà de 120 JA. En allant plus loin, c’est-à-dire en procédant à «la classification des entreprises par tranche de délais», le rapport fait ressortir qu’en 2018, un peu plus que la moitié des entreprises ont été payées dans les délais réglementaires de 60 jours, 8% entre 60 et 90 jours, délai pouvant être consenti entre les partenaires, et 41% dans des délais supérieurs à 90 jours, dont 84% d’entre elles observant des délais au-delà de 120 jours. Pour ce qui est des délais de paiement fournisseurs, 62% des entreprises honorent leurs engagements dans des délais inférieurs à la limite réglementaire, près du tiers des entreprises payent leurs fournisseurs après 90 jours, tandis que 79% d’entre elles sont dans des délais supérieurs à 120 jours. Selon BAM, cette configuration est restée la même depuis des années : «Les pratiques de paiement semblent ne pas s’améliorer avec une persistance des comportements retardataires.»

Les TPE, les plus affectées
Par taille d’entreprise, le rapport confirme une évidence : les délais de paiement sont particulièrement défavorables aux petites structures. La lecture par taille montre en effet que les grandes et moyennes entreprises semblent davantage maîtriser leurs délais de paiement, au moment où les très petites rencontrent de nombreuses difficultés. Pour les grandes entreprises (GE), leur moyenne de délais clients s’est établie à 92 JCA, mettant en évidence le pouvoir de négociation et le rapport de force qu’elles imposeraient à leurs partenaires commerciaux. Concernant le règlement des dettes fournisseurs, les GE mettent en moyenne 118 JA, contre 111 JA pour les PME et 104 JA pour les TPE, note le rapport. Pour ce qui est du solde commercial, et bien que l’ensemble des catégories d’entreprises soient dans une situation nette prêteuse, les niveaux les plus élevés en 2018 sont enregistrés chez les TPE, avec une moyenne de 78 JCA. En revanche, la situation est moins contraignante pour les GE et les PME, dont les niveaux de solde commercial se situaient, en 2018, respectivement à 9 JCA et à 26 JCA.

Des délais les plus longs dans le secteur «Transports et entreposage»
Par secteur, il ressort du rapport qu’en général, ce sont les entreprises dont l’activité est orientée vers une clientèle de particuliers qui affichent les niveaux les plus bas. À titre d’illustration, 83% des entreprises opérant dans le secteur de l’«Hébergement et restauration» récupèrent leurs créances avant la limite réglementaire des 60 jours, avec une moyenne, à fin 2018, de 44 JCA. Quant aux secteurs d’activité dont la clientèle est composée essentiellement d’entreprises, les délais de paiement ressortent à des niveaux plus élevés. En effet, les délais les plus longs en 2018 ont été observés dans le secteur des «Transports et entreposage» avec 220 JCA, suivi des «Industries manufacturières» (188 JCA) et des «Activités immobilières» (163 JCA). Ce constat peut aussi être relevé au niveau des «Activités de services» et dans les «Informations et communication» avec des moyennes respectives, à fin 2018, de 161 JCA et 158 JCA. Notons que ce premier rapport n’a pas donné d’éclairage sur les délais de paiement dans les régions du royaume.

Les crédits interentreprises privé-privé à 392 MMDH
Ceci étant, selon la CGEM, qui a également fourni, dans ce rapport, une analyse qui corrobore les chiffres de BAM, «la véritable problématique des délais de paiement se situe dans les relations commerciales entre sociétés privées. Le montant de crédits interentreprises privé-privé se situe à 392 MMDH et la catégorie TPE est celle qui souffre le plus de l’allongement des délais de paiement, avec 212 JCA». S’exprimant sur l’évolution des délais de paiement dans le public, le patronat explique que «les délais de paiement du secteur public ont connu une amélioration par rapport aux dernières années, grâce notamment aux efforts de dématérialisation dans la gestion de la relation entre entreprise et ordonnateur. Toutefois, les délais de paiement déclarés par certaines administrations laissent sceptiques des entreprises privées travaillant avec le public».

L’État, les collectivités territoriales et les EEP dans les normes

Pour commencer, les délais de paiement des établissements et entreprises publics (EPP) ont connu une tendance baissière avec un délai moyen global passant de 55,9 jours en décembre 2018 à 42 jours en décembre 2019. Selon le rapport annuel de l’Observatoire des délais de paiement, qui en a fait l’annonce, cette baisse est due aux efforts déployés en la matière par le ministère de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration, ainsi qu’aux mesures prises par les EEP en termes de procédures internes, de systèmes d’information et de relations avec leurs partenaires, est-il expliqué. Concernant les marchés publics, l’État est passé de 146 jours en 2016 à 58 jours en 2017, pour enfin tomber à 39 jours en 2018, tandis que les collectivités territoriales sont passées de 142 jours en 2016 à 58 jours en 2017, et finalement 44 jours en 2018.

Aziz Diouf / Les Inspirations Éco


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