Décodages: le financement de la TPME au coeur du débat (VIDEO)
La question du financement de la TPME a toujours été pointée du doigt comme étant la principale problématique. Mais beaucoup d’autres maillons de la chaîne restent encore à consolider. Explications.
«Le financement a toujours été posé comme la principale problématique. En réponse, nous avons beaucoup travaillé sur l’accès au financement, à travers la réforme de 2007-2009 et sur les résultats qu’on eut quelque dix ans après. Nous avons travaillé sur l’accès au financement et les résultats sont là. En 2010, sur chaque 100 dirham (DH) qui étaient donnés par le secteur bancaire, 25 DH allaient aux TPME.
Aujourd’hui, notamment depuis 2020, sur chaque 100 DH, 45 DH vont aux TPME. Autant dire qu’en l’espace de 10 ans, la part revenant à la TPME a presque doublé», explique Hicham Zanati Serghini, DG de la Société nationale de garantie et de financement de l’entreprise (Tamwilcom). Comparé aux pays de l’OCDE, le Maroc est sur un ratio de 50%, autrement dit sur chaque 100 DH, 50 DH vont aux TPME. Dans la région MENA, l’on est dans un ratio de 24%, ce qui signifie que sur chaque 100 DH, seulement 24 DH vont aux TPME. Conclusion : le Maroc se rapproche beaucoup plus des normes OCDE.
Le système financier est-il au rendez-vous lorsque l’autofinancement atteint ses limites ?
Comme on a eu à le relever dans un précédent article paru dans Les Inspirations ÉCO n°3226 du vendredi 11 novembre 2022, l’analyse du passif global des TPME montre que les fonds propres continuent de représenter leur première source de financement, avec une part de 28,5% en 2020. Les dettes auprès des associés constituent leur deuxième source de financement, s’établissant à 19,8%.
Pour expliquer de manière terre à terre ce que cela signifie, Hicham Zanati Serghini, explique que «l’entrepreneur marocain préfère ne pas mettre son argent dans le capital de son entreprise, mais être plutôt le créancier de son entreprise». Tant que le besoin de financement de l’entreprise n’est pas assez important, il est encore possible pour une TPME de fonctionner selon ce schéma. Mais jusqu’à quand ? Et comme le rappelle Mohamed Ali Tazi, Ceo de HMI, «le succès apporte d’autres problématiques de financement», en dépit du fait que les dettes commerciales (appelées aussi crédit interentreprises) constituent l’une des sources de financement de cette catégorie d’entreprise.
En effet, l’analyse du passif global réalisé par l’Observatoire marocain de la TPME révèle que les dettes commerciales représentent 20 à 25% du passif du tissu de micro-entreprises et de TPE. Rappelons que celles-ci exercent essentiellement dans des secteurs comme le commerce, la construction et l’industrie manufacturière. C’est à ce moment que la problématique de l’accès au financement externe, notamment celui des banques, est crucial, même s’il n’est pas assez présent à l’analyse du bilan de ces entreprises, avec une part d’environ 27%. Cela dit, «il y a un vrai problème de communication sur les outils de financement (accès à l’information), d’idées, d’accompagnement et de fragmentation des produits», souligne Saad Hamoumi, fondateur et DG du Cabinet Havard Consulting, selon qui «les entreprises qui font les choses dans les règles n’ont pas de problème de financement». En effet, ce ne sont pas les leviers de financement des entreprises qui manquent. Mais comme il le relève, «les projets qui sont accompagnés ont beaucoup plus de chances de réussir».
L’accompagnement est fondamental !
Comme le souligne Mohamed Ali Tazi, Ceo de HMI, «le succès d’une entreprise en croissance peut lui être aussi fatal, si elle n’est pas accompagnée en termes de financement et d’organisation». Dans la pratique, il y a une diversité de méthodes pour accompagner les entreprises en amont, par exemple en créant des incubateurs pour aider les entrepreneurs à entretenir une meilleure relation avec le banquier, comment lui vendre son projet, comment monter son business plan… Selon Bernard Labous, directeur du Retail Banking à la BMCI, «le financement n’arrive que quand on croit au projet, au créateur, au produit, etc». Et pour faciliter l’accès au financement des jeunes porteurs de projets, auto-entrepreneurs, micro-entreprises et très petites entreprises, Tamwilcom vient en appui au secteur financier. Présent sur tout le cycle de vie de l’entreprise (création, croissance, en période de difficulté, au moment de son internationalisation, voire lors de sa transmission), Tamwilcom apporte des solutions pour ouvrir l’accord de financement avec une diversité de solutions dont le programme Intelaka, une solution sur des crédits qui peuvent aller sur une longue maturité, un taux de 2% en milieu urbain et de 1,75% en milieu rural et une garantie de 80% au secteur bancaire. «Quand on regarde nos chiffres, nous avons doublé la portion de la population bénéficiaire, par rapport à ce qu’on faisait avant».
Saad Hamoumi
Fondateur et DG du cabinet Havard consulting
Entreprendre, c’est d’abord être sensibilisé à l’entrepreneuriat très jeune. Malheureusement, quand on parle aux jeunes et futurs lauréats d’écoles de commerce et d’universités, ils veulent être des salariés. Cela dénote qu’il y a un problème. On ne devient pas entrepreneur par défaut. Il y a quelque chose à faire à ce niveau.
Hicham Zanati Serghini
DG de la Société nationale de garantie et de financement de l’entreprise (Tamwilcom)
Les grands défis du Maroc sont de créer davantage d’entreprises. Faire passer celles de l’informel vers le formel. Mais aussi de renforcer le maillon de la moyenne et de la petite entreprise.