Maroc

Déchets importés d’Italie : Qu’advient-il des cimentiers ?

Les cimentiers et les ONG sont suspendus aux résultats des «investigations» du gouvernement sur les déchets importés d’Italie. Les deux camps sont toujours mobilisés.

C’est un moindre mal pour l’Association professionnelle des cimentiers (APC). Cette structure rassemblant les quatre entreprises de ce secteur qualifie «de sage et logique» la décision du gouvernement au sujet des déchets importés d’Italie. Suite au Conseil de gouvernement du 14 juillet, l’Exécutif a décidé «de suspendre l’utilisation de l’actuelle cargaison des déchets importés d’Italie dans l’attente du parachèvement des investigations menées à ce sujet et avant de prendre une décision définitive sur cette affaire», a précisé le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi.

Amertume
«Suspendre au lieu d’interdire, c’est une sage décision», se rassure Mohamed Chaïbi, président de l’APC. Et de lancer : «Nous n’avons rien à craindre. Nous sommes disposés à subir toute investigation et faire l’audit de l’unité concernée. Cette démarche ne peut être que bénéfique pour l’ensemble de la profession». Une série de contrôles devra être effectuée dans les prochains jours par le Laboratoire national de l’environnement, le LPEE et la police de l’environnement. «La cargaison de 2.500 tonnes est stockée à l’usine de Lafarge à Bouskoura. Nous attendons le feu vert des pouvoirs publics pour passer à la combustion ou bien la renvoyer en cas de non-conformité», explique Chaïbi. Le président de l’ACP ne cache pas son amertume sur la gestion du dossier.

Le secteur du ciment s’en sort égratigné par plus de 10 jours de polémique. «Dans ce dossier, c’est l’irrationnel qui a guidé la décision publique. On n’a pas mis en avant les efforts des cimentiers pour la préservation de l’environnement. Nos usines sont équipées de contrôle continu ou de filtres ultra-puissants. Seule l’émotion a été entendue», regrette Chaïbi. «C’est une polémique infondée nourrie par un contexte de campagne électorale», accuse-t-il. L’ACP et son président, à l’origine de cette affaire dénoncent «un simple déficit de communication sur lequel les réseaux sociaux et les populistes en tout genre ont surfé». La deuxième décision du gouvernement interdit de facto l’importation de tous les déchets.

En plus des Refuse derived fuel (RDF), d’autres types de déchets sont concernés par cette décision, notamment les pneus déchiquetés, le plastique, la ferraille ou encore les vêtements usagés. «Toute importation de déchets est réglementée au Maroc par la loi. Si on suspend ces opérations le temps de vérifier que tous est aux normes, nous n’avons pas de souci avec cette mesure temporaire», précise Chaïbi. Et d’ajouter : «Le gouvernement marocain à tout le loisir de vérifier ces procédures pour s’assurer que la santé du citoyen est garantie». L’ACP rappelle que le Maroc utilise déjà 500.000 tonnes de déchets locaux dans le cadre d’activités industrielles, «dont certains sont dangereux», prévient Chaïbi. 


 

Des ONG exigent de réviser le cadre juridique
C’est un premier pas qui reste insuffisant du point de vue des ONG mobilisées sur ce dossier. «Ils sont obligés d’arrêter l’importation des déchets car il n’y a aucune base juridique. Le décret qui devait valider cette pratique n’a pas été publié au bulletin officiel», plaide Abdeslam Adib, coordinateur du Réseau démocratique pour le suivi de la COP22 (RedaCOP22). Pour l’écologiste Mohamed Benata de l’Espace solidarité et coopération de l’Oriental (ESCO),  «il faut que les déchets déposés à Safi retournent en Italie». Ces militants réclament la révision de la loi 28-00 relative à la gestion des déchets qui a montré ses limites. Une manifestation était toujours maintenue à Rabat le 17 juillet pour demander l’interdiction de cette cargaison et la réforme de la loi 28-00.


 

Mohamed Chaïbi
Président de l’Association professionnelle des cimentiers (APC)

Les Inspirations ÉCO :  La décision du gouvernement d’arrêter toute opération d’importation de déchets jusqu’à nouvel ordre aurait-elle un impact sur le rythme de production de vos unités ?
Mohamed Chaïbi : Dans un premier temps, cette décision n’aura pas d’impact sur notre production. Mais ce qui nous fait réfléchir, c’est l’avenir. Nous avons signé avec les différents ministères une stratégie de gestion des déchets. Cette feuille de route a aussi été votée au Parlement. Elle consiste à promouvoir le traitement des déchets industriels et ménagers du Maroc. Si pour les déchets industriels, le traitement est cours de réalisation, la filière des déchets ménagers reste à créer pour disposer de RDF et ce, le plus tôt possible.
 
Les cimentiers sont prêts pour financer cette transition énergétique ?
Nous sommes prêts à payer le juste prix de ces RDF. C’est notre contribution à cette transition. À cela s’ajoutent nos investissements dans les équipements destinés à ces opérations. Nous nous engageons à détruire ces déchets sans préjudice pour l’environnement. Seulement, nous ne pouvons pas payer plus que le prix que nous coûte l’importation du combustible classique.  

Avez-vous reçu le soutien de membres du gouvernement ?
Malgré le fait que nous ayons signé de nombreuses conventions avec des départements ministériels, je n’ai pas entendu des voix au sein du gouvernement défendre ces partenariats ou notre savoir-faire et nos engagements citoyens. Il faut dire que le gouvernement n’a même pas pris la défense de la ministre de l’Environnement.


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