Conjoncture. Décélération, inflation et perspectives d’amélioration
En 2022, l’activité économique a ralenti en raison de plusieurs facteurs convergents : une croissance modérée entravée par la sécheresse, des défis internationaux complexes et la montée de l’inflation. Le rapport annuel de Bank Al-Maghrib sur la stabilité financière apporte des clarifications.
Après une accélération fulgurante à près de 8% en 2021, la croissance économique du pays a ralenti drastiquement pour se stabiliser à 1,3% en 2022. Ce ralentissement s’explique en grande partie par une campagne agricole calamiteuse et une contraction des activités non agricoles. On constate ainsi un fléchissement de 12,9% de la contribution de l’agriculture à la valeur ajoutée nationale, contre 3% pour les secteurs hors agriculture.
Ces résultats marquent un contraste saisissant par rapport aux hausses de 19,5% et 6,7% enregistrées l’année précédente. De même, une divergence notable par rapport à l’année précédente réside dans la contribution intérieure à la croissance, qui a viré en négatif, entraînant un recul de 1,7 point de pourcentage, à l’inverse de la contribution positive de 9,5 points de pourcentage un an auparavant.
Cette variation s’explique par la baisse des investissements et la réduction de la consommation des ménages en réponse à l’inflation marquée à 6,6% en 2022, un sommet depuis 1992. En revanche, les échanges extérieurs ont apporté une contribution favorable de 2,9 points de pourcentage à la croissance, sous l’impulsion d’une croissance soutenue des exportations de biens et services.
Dans ce contexte, le marché de l’emploi a enregistré une perte de 24.000 emplois en 2022, comparativement à la création de 230.000 emplois l’année précédente, principalement à cause des retombées de la sécheresse sur l’emploi en milieu rural. En ce sens, les projections de Bank Al-Maghrib dessinent une croissance économique en progression, estimée à 2,4% en 2023, avant de s’affermir à 3,3% en 2024. Cette embellie découle d’un regain d’activité, aussi bien agricole que non agricole.
Quant à l’inflation, elle maintiendrait une trajectoire haussière avec une moyenne de 6,2% en 2023 et une légère réduction à 3,8% en 2024, attribuable au repli programmé de la charge de compensation. Toutefois, ces prévisions demeurent voilées par les incertitudes nées des tensions géopolitiques et des pressions inflationnistes tenaces.
Creusement du solde commercial et déficit du compte courant
La balance commerciale ne s’est pas arrangée en 2022, aggravant le déficit du compte courant à 3,5% du PIB, comparativement à 2,3% en 2021. Ce phénomène découle d’un déficit commercial en forte détérioration, atteignant 308,8 MMDH, engendré par une croissance des importations surpassant largement celle des exportations. Ce tableau défavorable a été adouci partiellement par la consolidation des transferts des MRE (+16%) et par l’excellente performance des recettes touristiques, en hausse de 170,8%, à 93,6 MMDH en 2022. Parallèlement, les investissements directs étrangers au Maroc ont augmenté de 6,8% pour atteindre 21,8 MMDH, tandis que les investissements des Marocains résidant à l’étranger ont grimpé de 7,9%, à 6,3 MMDH.
Dans ce panorama, les avoirs officiels de réserve se sont établis à 337,6 MMDH au terme de l’année 2022, représentant l’équivalent de 5 mois et 13 jours d’importations de biens et services.
Selon les perspectives tracées, et en prenant en compte les financements extérieurs projetés du Trésor, les réserves officielles devraient atteindre 361,2 MMDH en 2023 et 357,9 MMDH en 2024, soit l’équivalent de 5 mois et 17 jours, puis 5 mois et 16 jours d’importations de biens et services, respectivement.
Les besoins de financement du Trésor se sont allégés en 2022
À la clôture de l’année 2022, l’exécution de la loi de Finances a révélé un déficit budgétaire, à l’exception des revenus générés par la cession de participations de l’État, équivalent à 5,2 % du PIB. Cette proportion est en baisse par rapport à l’année précédente, où elle était de 5,9 % en 2021. Cette amélioration découle principalement de la performance remarquable des recettes fiscales et de l’importante mobilisation des mécanismes de financement spécifiques.
La variation du déficit prend également en considération l’augmentation de 5 milliards de dirhams du solde positif des comptes spéciaux du Trésor (CST), atteignant ainsi 8,6 MMDH. À noter qu’une somme de 6,7 MMDH, provenant de la contribution sociale de solidarité sur les bénéfices et les revenus et destinée au Fonds d’appui à la protection sociale et à la cohésion sociale, est incluse dans cette somme.
En considérant ces paramètres, les besoins de financement du Trésor ont atteint 71,1 MMDH à la fin de 2022, en diminution de 11,6% par rapport à l’année précédente. Cette somme a été principalement couverte par des financements intérieurs à hauteur de 65 MMDH et, dans une moindre mesure, par des emprunts à l’étranger pour un montant net de 6,1 MMDH. Le ratio de la dette du Trésor a ainsi progressé de 2,1 points, passant de 69,5% du PIB à la fin de 2021 à 71,6% en 2022.
La structure de la dette du Trésor reste dominée par la dette intérieure, représentant 76% du total, contre 24% pour la dette extérieure. En termes absolus, la dette intérieure du Trésor a atteint 722,9 MMDH à fin 2022, en hausse de 6,1% par rapport à 2021. Quant à la dette extérieure, elle s’est élevée à 228,9 MMDH, en augmentation de 12,3% par rapport à 2021.
D’après les projections de Bank Al-Maghrib, le déficit budgétaire devrait poursuivre sa tendance baissière pour se situer à 5% du PIB à fin 2023. En 2024, il s’atténuerait à 4,3% du PIB, en lien notamment avec la baisse programmée de la charge de compensation. Pour sa part, le ratio de la dette du Trésor sur le PIB devrait baisser à 69,7% en 2023 et à 68,5% en 2024.
Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO