Assurance agricole : où en est le Maroc ?
Le Maroc est l’un des rares pays africains à offrir à ses agriculteurs une subvention pour l’assurance à hauteur de 90%. Malgré ce coup de pouce, seuls 30% des opérateurs sont assurés alors que le royaume connaît en ce moment sa pire sécheresse depuis 30 ans.
Salué par l’ensemble du secteur, le programme exceptionnel de lutte contre les effets de la sécheresse et le retard des précipitations est plus qu’une bouffée d’oxygène pour les agriculteurs. Et l’un des axes principaux de ce programme ambitieux, qui prévoit une série de mesures urgentes couvrant les différents pivots du secteur agricole, est sans doute l’assurance agricole, à côté de la protection du capital animal et végétal, la gestion de la rareté des eaux ainsi que l’allègement des charges financières des agriculteurs et des professionnels. D’ailleurs, il sera procédé, sans délai, au paiement des indemnisations pour un capital assuré par les agriculteurs atteignant 1,12 MMDH sur une superficie de 1 million d’hectares. La Mutuelle agricole marocaine d’assurances (MAMDA) a annoncé sa contribution à la mise en œuvre dudit programme à travers deux mesures phares consistant à accélérer le rythme de l’expertise et à accorder la priorité aux zones touchées. C’est ce qu’a affirmé, jeudi dernier, Mahmoud Oudrhiri, directeur général délégué de la MAMDA-MCMA, qui a expliqué que l’assurance multirisque climatique a pour objectif de couvrir les agriculteurs contre une multitude de risques agricoles, notamment la sécheresse, les inondations et les problématiques liées aux grandes cultures telles que les légumineuses, les céréales et les graines oléagineuses. Mais à combien s’élèvent les cotisations pour bénéficier de l’assurance agricole ?
Couverture élargie
Pour permettre aux travailleurs de la terre de bénéficier d’une protection, il a été lancé en 2016 un produit d’assurance agricole «Taamine Al Mahssol» dans le cadre d’un partenariat public-privé entre l’État et la société Saham Assurance. Il devait permettre aux agriculteurs de bénéficier d’une couverture très élargie. Dans le détail, le produit bénéficie de subventions importantes, puisque la part payée par l’agriculteur ne représente, en moyenne, que 10% à 15% de la prime d’assurance, le reliquat étant pris en charge par l’État ? L’offre que proposent aujourd’hui les professionnels du secteur, en l’occurrence la MAMDA, 1er assureur du monde agricole au Maroc, donne une panoplie de protections aux agriculteurs face aux aléas allant de la sécheresse à la grêle, en passant par le gel, les vents violents, les inondations… L’assurance couvre les céréales comprenant essentiellement le blé tendre, le blé dur, l’orge, le maïs et des légumineuses, à savoir les fèves, les lentilles, le petit pois, le pois chiche et les haricots. Pour chaque culture, le capital assuré est égal au montant correspondant au niveau de garantie choisi multiplié par la superficie assurée, alors que les niveaux de garantie varient en fonction de la zone géographique et la nature des récoltes. La cotisation est calculée suivant le niveau de la garantie choisie et se compose de deux variantes : le montant à payer par le sociétaire et le montant de la subvention de l’État.
La sécheresse accélère la donne
Ce qui fait du Maroc l’un des rares pays africains à mettre en oeuvre une assurance agricole subventionnée jusqu’à 90%. Si le produit a fait beaucoup de bien au monde agricole, le taux de couverture de l’assurance agricole ne représente aujourd’hui que 30%. À l’origine de cette «faible» couverture, malgré les subventions de l’État, une méconnaissance du produit d’assurance ? Faudrait-il impliquer davantage les conseils régionaux pour une plus grande vulgarisation ? Une certitude, le potentiel reste encore grand alors que l’agriculture marocaine est de plus en plus soumise à des épisodes de sécheresse aiguës, notamment en périodes printanière et estivale. En effet, le Maroc connaît sa pire sécheresse depuis 30 ans, les pluies se font rares dans de nombreuses régions et les retenues d’eau des barrages continuent de baisser de manière inexorable, selon les spécialistes. Les données de la Direction générale de l’eau, relevant du ministère de l’Équipement, au 20 février 2022, montrent que les retenues des principaux barrages nationaux se limitent à 5,34 milliards de mètres cubes sur une capacité totale de 16,1 milliards de mètres cubes, soit un taux de remplissage moyen de seulement 33,1%. À la même période de l’année dernière, ce taux était encore de 48,4%, soit près de 2,3 milliards de mètres cubes de plus. Cette nouvelle donne devrait sans doute pousser les agriculteurs à souscrire l’assurance agricole.
Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO