Politique

Mohamed Benabdelkader : “Nous sommes bien avancés dans la mise en place des textes de loi”

Mohamed Benabdelkader.
Ministre de la Justice

Le ministre de la Justice revient sur les principaux points qui permettent de faire de l’administration judiciaire un véritable service public pour les citoyens marocains.

L’amélioration de la gouvernance pourra-t-elle se faire sans le renforcement des ressources humaines ?
Pour préparer un texte de loi, il faudrait d’abord consolider les acquis et les droits. Par ailleurs, il faudrait savoir comment accéder à ces métiers : faudra-t-il des examens ou des concours ? Doit-on mettre en place des centres de formation aux métiers de la justice ? Le modèle suivi au Maroc n’est pas le bon. En effet, pour accéder aux métiers de la justice, il faut seulement passer des examens, à travers lesquels il n’y a pas de sélection selon les besoins existants. Dans le cadre des rencontres du ministère avec les responsables judiciaires, la problématique du déficit de ressources humaines est toujours posée. Au lieu de parler de déficit, il faudrait plutôt, à mon avis, chercher à savoir quels postes sont véritablement occupés. A-t-on vraiment optimisé les ressources humaines existantes ? On ne le sait pas ! Car il nous manque un maillon très important dans la chaîne du capital humain : il s’agit du Référentiel des emplois et des compétences (REC), qui existe dans tous les systèmes de la fonction publique. Sans ce dernier, nous ne pouvons pas estimer les ressources manquant au département judiciaire. Même pour procéder à la promotion ou à la sanction d’un fonctionnaire, nous n’avons pas de référentiel pour le faire. Nous sommes en train d’ouvrir ce chantier concernant les fonctionnaires de la justice pour préciser et identifier leurs tâches quotidiennes ; à partir de là, on pourra déduire l’existence d’un déficit, ou au contraire un excédent de postes au sein de l’administration.

N’est-il pas temps d’amender les textes relatifs à l’organisation des métiers de la justice ?
Parmi les compétences du ministère, il y a cette relation de tutelle vis-à-vis des professions auxiliaires à la justice. Cela concerne les avocats, les greffiers, les experts, les traducteurs… qui sont représentés par des associations. En effet, avec un certain nombre de professions, comme les associations de barreau des avocats, les notaires et les adouls, nous sommes avancés dans l’élaboration d’un nouveau texte de loi. Nous considérons que la réforme et la modernisation de la justice passe aussi par la modernisation de ces professions. Il y a un dialogue établi, des concertations à travers des groupes de travail qui avancent sur la révision des textes de loi existants. L’essentiel est que cela se fasse dans le cadre de la confiance mutuelle. Je vous assure qu’il y a par ailleurs des signaux favorables qui nous permettront d’aboutir à la modernisation de ces métiers.

Qu’en est-il des projets de loi toujours en suspens ?
Il est vrai que j’ai pris les commandes du ministère de la Justice depuis un an et trois mois. Depuis, j’ai déjà présenté deux textes de loi. Le premier concerne la lutte contre le blanchiment d’argent. Et aujourd’hui, nous tenons la troisième réunion dans le cadre de la Commission de la justice, de législation et des droits de l’Homme. C’est dire que nous avançons très bien concernant ce texte de loi. Un autre texte de loi est dans le pipe, celui relatif à l’arbitrage, la médiation et l’arbitrage sociale, que j’ai présenté au gouvernement et au Parlement. Par ailleurs, un autre projet de texte de loi sera adopté, dans les prochains jours, par le Conseil de gouvernement, qui concerne la loi sur l’organisation judiciaire. Et sa révision s’est faite en concertation avec nos partenaires.

Certains spécialistes estiment que le besoin de créer un «tribunal foncier» se fait sentir. Cette mission incombe-t-elle au ministère de la Justice ?
C’est l’un des sujets concernés par une concertation avec le pouvoir judiciaire. En effet, la mise en place ou non d’un tribunal foncier s’inscrit dans l’organisation judiciaire. Nous, ministère, considérons que nous sommes certainement concernés. S’il y a nécessité de créer ce tribunal, cela sera certainement fait, mais encore faut-il mobiliser des experts dans le domaine, former les magistrats. À vrai dire, nous n’avons pas encore abordé cette thématique. Elle a l’a été au niveau du Parlement, mais nous ne l’avons pas encore abordée avec les pouvoirs judiciaires.

L’administration judiciaire est épinglée pour sa lenteur. Croyez-vous que la digitalisation, à elle seule, permettra de remédier à cela ?
Nous avons élaboré un schéma directeur de la transformation digitale du système judiciaire, avec ses paramètres, principes et enjeux. Concernant ce dernier point, l’enjeu de la transformation n’est pas uniquement d’assurer la rapidité de l’administration. On peut accélérer un service administratif judiciaire, mais ce n’est pas toujours dans le souci de la rapidité. Il s’agit d’assurer l’efficacité, la transparence. Il y a en fait un enjeu d’éthique publique dans la digitalisation. Moins on fréquente les agents publics, moins il y a le risque de corruption. Donc plus on dématérialise un service, mieux c’est. 

La séparation des pouvoirs, ingrédient important de la gouvernance de l’administration judiciaire

Intervenant dans la cadre d’une table ronde tenue à l’Université Mundiapolis de Casablanca, organisée par Honoris United Universities et l’Institut des sciences politiques, juridiques et sociales, le ministre de la Justice Mohamed Benabdelkader a traité le sujet de «la Gouvernance de l’administration judiciaire». Il a
ainsi abordé plusieurs points liés à la nécessité de faire de l’administration judiciaire un véritable service public pour les citoyens. Le respect du principe de séparation des pouvoirs étant crucial, les rapports que la justice entretient avec les pouvoirs législatif et exécutif sont indissociables de sa gouvernance. Cette dernière repose également sur la capacité des lois à répondre aux besoins sociaux et sur la qualité des autres institutions publiques. Le ministre a aussi rappelé le rôle des politiques publiques dans l’élaboration d’une administration judiciaire forte et saine, qui permet de protéger efficacement les justiciables.

Sanae Raqui / Les Inspirations Éco


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